Rached Ghannouchi : le système parlementaire n'est pas une cause sacrée pour nous
Rached Ghannouchi n’avait pas entamé sa conférence de presse qu’il devait consacrer à la composition du bureau exécutif et à ses conseillers qu’une journaliste de Dar Essabah l’interpelle : pour la première fois la police intervient à l’intérieur du siège du journal. Quelle est la position d’Ennahdha ? Le sujet principal de la conférence est expédié en dix minutes pour laisser la place aux sujets qui intéressent les journalistes et l’opinion publique. Les réponses du leader d’Ennahdha souvent lapidaires et ont laissé les journalistes sur leur faim c’est ce qui explique que Cheikh Mourou et Ameur Larayedh se soient cru obligés de venir à sa rescousse pour clarifier certains points, lorsqu’il s’est agi pour le premier de la criminalisation des atteintes au sacré ou des rapports avec la presse pour le second.
-les nominations à la tête des médias et des principales institutions du pays : ces nominations font partie des prérogatives du gouvernement. Ennahdha n’est pas concernée. Il est tout à fait normal qu’un gouvernement cherche à nommer des hommes qui croient au bien-fondé de sa politique et s’engagent à l’appliquer, étant entendu que ces choix doivent faits sur la base de la compétence et l’intégrité des promus.
-l’affaire Assabah : nous ne sommes pas au courant de ce qui s’est passé cette nuit. Nous sommes contre la violence d’où qu’elle vienne (NDLR : à l’insu des journalistes, le directeur fraîchement nommé, appuyé par la force publique a fait procéder dans la nuit de mercredi à jeudi au changement d’une page sur laquelle figurait un communiqué du syndicat des journalistes de dar Essabah et empêché la distribution de l’édition originale).
-les critiques de Marzouki contre Ennahdha lors de la séance d’ouverture du congrès du CPR : nous avons été surpris par ces critiques que nous trouvons injustes. La réaction des représentants du mouvement Ennahdha qui ont quitté la salle était légitime. Certains cadres de ce parti nous ont fait savoir que le président se faisait l’écho des critiques concernant ce prétendu noyautage d’Ennahdha des rouages de l’Etat et qu’il ne s’agissait pas d’une position personnelle. Dans ce cas, il faut être plus clair dans ses propos, car ce n’est pas ce que nous avons tous compris. On ne peut pas être à la fois au sein de la troïka et la critiquer. En tout cas, s’il y a des tiraillements, c’est tout à fait normal. E Je tiens à nous rassurer : la coalition gouvernementale restera jusqu’aux prochaines élections.
- les manifestations du 31 aout et du 7 septembre : nous ne les organisons pas, mais nous les soutenons.
- La date des prochaines élections : nous espérons vivement qu’elles aient lieu à la date fixée. Car on ne peut vivre indéfiniment vivre dans une période transitoire. Les élus doivent mettre les bouchées doubles pour rédiger la constitution. Mais je ne suis pas habilité à vous dire quand auront lieu ces élections. Il faudrait poser la question au Dr Ben Jaafar.
- L’affaire Lotfi Zitoun : il n’entre pas dans les prérogatives, ni la vocation de notre mouvement d’enquêter sur la propriété des journaux. Quant aux réactions de M. Zitoun aux accusations dont il a fait l’objet, chacun est libre de réagir comme il l’entend.
- Ennahdha est-elle encore favorable au régime parlementaire ?
Nous sommes toujours pour ce système, parce qu’il est le mieux à même de barrer la route à la dictature. Ce n’est pas un hasard si l plupart des pays démocratiques ont opté pour ce régime. Je n’arrive pas les craintes que les Tunisiens nourrissent à cet égard. C’est véritablement une exception tunisienne. Pourtant la principale cause de la dictature qu’ils ont subie est le choix du régime présidentiel. Cela dit, nous ne considérons le choix du régime parlementaire comme une cause sacrée sur laquelle il ne faut pas transiger.
-le phénomène salafiste : c’est un phénomène tout à fait compréhensible. Il est le résultat de l’oppression dont l’islam a fait l’objet depuis des dizaines d’années dans ce pays. Il faut l’appréhender comme un phénomène intellectuel. Mais s’il se traduit chez certains par la violence, alors il faut sévir car nul n’est au dessus de la loi.