La Tunisie profonde hausse le ton
Plusieurs villes tunisiennes connaissent un vif regain de tension, parfois marqué par des éruptions de violence, alimentées par une actualité riche en tragédies humaines mais aussi par la contestation sociale qui ne semble pas près de se calmer.
Le drame des dizaines de jeunes migrants clandestins tunisiens portés disparus après le naufrage de leur embarcation de fortune au large de l’ile italienne de Lampedusa a suscité une immense émotion dans certaines villes dont les « harragas » sont originaires. Au Fahs, les établissements publics et privés ainsi que les commerces sont restés fermés, ce lundi, les habitants ayant protester contre l’absence d’informations sur le sort de dix des leurs, péris ou disparus dans le naufrage.
Les principales voies de circulation dans et autour de la ville ont été bloquées par des obstacles dressés à la hâte et des pneus enflammés.
Jérissa était elle aussi le théâtre de troubles à la suite de l’annonce de la mort d’un jeune originaire de cette cité minière des suites de mauvais traitements policiers qu'il aurait subis lors de son interrogatoire, dans les services de la police judiciaire à Tunis. Cette mort suspecte a d’ailleurs fait l’objet d’un communiqué du ministère de l’Intérieur qui a annoncé la mise aux arrêts de quatre agents de l’ordre impliqués dans cette affaire.
L’émoi de la population de Jérissa était d’autant plus perceptible que des échauffourées ont eu lieu entre les forces de l’ordre et des groupes de jeunes qui se sont rassemblés pour protester contre le déficit de réactivité des autorités dans la gestion de la tragédie de Lampedusa (cinq passagers de l’embarcation naufragée seraient originaires de Jérissa) et accessoirement pour dénoncer les ennuis judiciaires d’un autre fils de la région, Ayoub Messaoudi, ancien conseiller à la Présidence de la République.
La Présidence du Gouvernement a rejeté implicitement les accusations d’indifférence adressées aux autorités par les proches des victimes en annonçant « l'ouverture d'une enquête sur les circonstances de la disparition de plusieurs dizaines d'immigrés clandestins tunisiens » et la mise en place d’une cellule de crise.
D'ailleurs, la tragédie de Lampedusa ne semble pas dissuader les candidats à l’émigration clandestine. Les forces de sécurité et les gardes-côtes ont fait avorter, ce lundi, une tentative d’émigration clandestine et interpellé dans ce cadre 156 personnes de différentes nationalités au large de Ktef (gouvernorat de Médenine. Cette recrudescence des tentatives de ce genre en provenance du sud de la Méditerranée dait suite aux informations sur une hypothétique décision des autorités italiennes de régulariser la situation d’un nouveau contingent d’immigrés clandestins.
Pour revenir aux troubles dans certaines villes tunisiennes, El-Hamma (gouvernorat de Gabès) connaît, depuis demanche soir, une vive tension à la suite d’une émeute au cours de laquelle des jeunes ont incendié un poste de police et provoqué des dégradations dans divers quartiers de la localité.
La ville natale du président d’Ennahdha Cheikh Rached Ghannouchi qui connaît depuis plusieurs semaines un calme précaire sur fond de revendications sociales, interrompue dans la nuit de dimanche à lundi par un déchaînement de violences qui contraignit l’armée à intervenir pour tenter de calmer les esprits. Les émeutiers, des jeunes pour la plupart, entendaient obtenir la libération d’un individu interpellé peu auparavant par la police pour des faits de contrebande. Ils ont d’abord observé un sit in de protestation devant le siège de la délégation mais la situation a rapidement dégénéré en affrontements violents avec les forces de l’ordre.
Des tirs de sommation ont été entendus dans la ville jusqu’à une heure très tardive de la nuit, selon des témoins cités par une source informée.
A Gafsa, une grande manifestation a parcouru dimanche les principales artères de la ville pour réclamer davantage de développement, d’emploi et de dignité. Les manifestants ont également appelé à la rupture avec les pratiques de l’ancien régime et à la remise en liberté des personnes arrêtées à la suite de mouvements sociaux. Devant le siège du mouvement Ennahdha, au centre-ville, les manifestants ont scandé des slogans hostiles au gouvernement, s’arrêtant ensuite devant le bâtiment de la radio régionale pour appeler à la liberté de la presse et dénoncer les tentatives de mainmise sur les médias.
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et ce n'est pas fini, si l'état ne respecte pas la date de l'élection, et si n'est rien fait d'ici le 23 octeobre 2012, il faut s'attendre à des raz de marées dans toutes les villes de Tunisie, scandant ENNAHDHA dehors.
Serait-ce, enfin, le début du sursaut populaire devant la confiscation de sa révolution ?