L'ambassade U.S à Tunis attaquée par des manifestants : 2 morts et 27 blessés
Un calme précaire régnait ce vendredi en début de soirée, aux abords du bâtiment où forces de police et militaires patrouillaient à pied, dans des voitures et des blindés au milieu de rues recouvertes de débris de ce quartier chic de Tunis, d'habitude si calme. On compte selon un bilan provisoire 2 morts et 27 blessés (chiffres qui viennent d'être confirmés par le ministre de la santé) dont deux seraient dans un état critique. Parmi les blessés, on compterait autant de manifestants que de blessés.
Une épaisse fumée enveloppait en partie l’ambassade américaine à Tunis, prise d’assaut par un grand nombre de manifestants appartenant pour la plupart à la mouvance salafiste qui entendaient protester contre le film ''L’innocence des musulmans» jugé blasphématoire et dont des séquences circulent depuis quelques jours sur Internet.
Les forces anti-émeutes ont tenté à coups de matraques, de tirs de gaz lacrymogènes et des tirs de sommation de contenir les assaillants mais ces derniers sont parvenus à pénétrer en force dans l’enceinte de la chancellerie. Des voitures stationnées sur le parking auraient été incendiées à coup de cocktails Molotov. Un immense nuage de fumée noire était visible du parking de l'ambassade. Même l’intervention d’unités de l’armée, épaulée par un hélicoptère, n’a pas dissuadé les émeutiers de soumettre le bâtiment à un déluge de pierres. Selon certaines informations non confirmées, le personnel de l'ambassade y compris l'ambassadeur ont été évacués par la Brigade Anti-Terroriste.
Le drapeau américain a été retiré et remplacé par le drapeau noir des salafistes
A quelques centaines de mètres de là, à El Aouina, l'école américaine a été incendiée et pillée. Selon Shemsfm, des manifestants ont été vus sortant de l'école, emportant des ordinateurs. Si l'on en croit Mosaïquefm, on a dû recourir à un camion volé pour transporter le butin en toute impunité, en l'absence des forces de Sur la voie express Tunis-La Marsa un gros bouchon s'est formé depuis la caserne de la garde nationale d'El Aouina contraignant les forces de l'ordre à détourner la circulation vers la Soukra.
La situation a été jugée suffisamment grave pour que Hamadi Jebali interrompe son congé de deux jours qu'il avait entamé ce vendredi pour reprendre ses activités.
Invité vendredi soir sur le plateau d'El Watanya, Rached Ghannouchi (pourquoi pas le chef du gouvernement ?) a certes condamné l'attaque, mais en a fait porter la responsabilité première à l'auteur du film en question et à... l'absence d'une loi incriminant l'atteinte au sacré. Il en a profité pour faire incongrûment la promo du gouvernement. Il faut reconnaître que celui-ci en avait bien besoin au moment où le pays ressemble de plus en plus à un bâteau ivre.
Cela dit, la facilité avec laquelle les assaillants ont investi cette ambassade réputée être la plus sécurisée du pays, retiré le drapeau américain pour le remplacer par le drapeau noir des salafistes puis brûlé une soixantaine de voitures stationnées sur le parking à l'intérieur de l'enceinte de la représentation diplomatique suscite bien des interrogations : sommes-nous devenus incapables d'assurer la protection d'une ambassade ? Pourquoi avoir permis aux manifestants de s'en approcher alors qu'il aurait fallu établir un périmètre de sécurité ? La manifestation était-elle autorisée ? Pourquoi les renforts ont-ils tardé ? Pourquoi l'école américaine qui figurait parmi les cibles possibles des manifestants n'avait-elle pas été sécurisée ? Autant de questions qui ont eté posées lors d'un débat sur la même Watanya à Ali Larayedh, ministre de l'intérieur. Inutile de dire que les réponses nous ont laissés sur notre faim.
Ce qui est sûr, c'est que le prestige ou ce qu'il en reste de notre pays en prend un sacré coup. Pendant le week end, les images de "la prise d'assaut" de l'ambassade des Etats Unis ont passé en boucle sur toutes chaînes de télévision internationales et fait la "une" des grands journaux. Une contre-publicité dont on se serait bien passé, au moment où on s'échine à attirer les investisseurs et les touristes.