Sortie de crise et union nationale: Pourquoi et comment
La crise est là, bien douloureuse et bien inquiétante. Il n’y a pas besoin de disserter longtemps là-dessus: tout le monde en est convaincu même ceux qui se plaisent encore à dire que tout est bien dans le meilleur des mondes (et des gouvernements) possibles.
Depuis le 14 janvier 2011, j’ai appelé à plusieurs reprises à la création d’un gouvernement d’union nationale pour faire aboutir les objectifs d’une révolution spontanée et innocente ; expression pure d’une colère populaire étouffée depuis de nombreuses années.
Il a fallu plus de 20 mois de gouvernement « provisoire» et « transitoire » , des jeunes chômeurs désespérés engloutis par la mer et des extrémistes brûlant ce qui leur tombe sous la main, y compris l’ambassade de la plus grande puissance du monde et une école fréquentée par 600 enfants, pour que nos hommes politiques et les dirigeants des partis et du gouvernement s’aperçoivent que le pays est réellement en danger, ce qui était visible pour tout un chacun.
Puisque le constat est unanime, que faut-il faire pour sauver notre pays en danger ? Continuer tranquillement les confrontations et les disputes démoralisantes ? On prend ainsi le risque d’une seconde révolution ou, pire, d’une contre-révolution ou même le retour de la dictature si la confusion et l’irresponsabilité des dirigeants continuent à sévir !
Il y a donc lieu de raison garder, de mettre fin aux querelles de toutes sortes et à l’instabilité qui s’aggrave et isole le pays à l’échelle internationale. Il faut se ressaisir, dominer ses sentiments et ses ressentiments, ses colères et ses haines, se comporter en citoyen d’un même pays qui ne mérite pas ce sort. J’ai posé le problème de l’union nationale nécessaire pour rompre avec cette routine destructrice. Partout on parle maintenant de l’union nationale et souvent, sinon toujours, on en approuve l’idée puisqu’il est difficile de la refuser sans nuance. Pourquoi alors essaie-t-on de l’éviter ?
L’union nationale va à l’encontre des intérêts partisans et de la volonté de puissance et d’accaparement du pouvoir. Les uns voudraient profiter du vâgue et de l’incertain de la situation, avant et après le 23 octobre 2012, pour compléter leur occupation de l’Etat et de ses rouages afin de « réussir » les élections législatives et de durer quelques années ou plusieurs décenniess au pouvoir avec l’intention déclarée d’islamiser un pays qui est musulman depuis 15 siècles !
Les autres, qui ont très mal « joué » aux élections du 23 octobre 2011 et qui espèrent pouvoir «chasser» le vainqueur, le « conquérant » et ses quelques alliés. Les uns et les autres ne font que spéculer sur l’avenir et ni les uns ni les autres ne veulent abandonner ces spéculations et travailler ensemble. Les excès du parti dominant actuellement au pouvoir alimentent une impatience générale de voir les « islamistes » mettre fin à leur « stage » au pouvoir et prendre le temps d’observer et d’apprendre l’art du gouvernement.
Aussi, on ne voit pas quelle autre solution peut servir le pays aujourd’hui, un simple « remaniement », un élargissement du gouvernement à quelques autres « soutiens » ? Il est clair que ce genre de solution n’a pas donné de résultats probants. Le système « gouvernement - opposition » ne peut pas servir la Tunisie : le conflit sera permanent et le pays continuera à en souffrir. Ce système est légitime et courant dans les pays démocratiques stables. Demain nous le serons, il faut l’espérer. Mais nous en sommes encore loin aujourd’hui.
Bref, aujourd’hui l’union nationale est nécessaire et personne ne peut l’éluder ou l’éviter sans desservir son pays. Il est du devoir de chacun, partis, gouvernement, opposition, syndicats, associations de la société civile, de la soutenir mais aussi d’y participer et ne pas se contenter d’être spectateur, comme je l’entends dire.
Il y a lieu toutefois de bien concevoir et construire cette union nationale que nous ne cessons d’évoquer. Il ne faut pas qu’elle soit improvisée et qu’elle tourne à la confusion.
La conception et la construction de l’union nationale appelle l’examen de cinq grandes questions :
1. Les préalables qui s’imposent
2. L’objectif à définir et les tâches à accomplir
3. Les moyens à mettre en place
4. Le consensus nécessaire et la légitimité obligatoire : le référendum
5. Le timing et la durée.
1. Les préalables qui s’imposent : la paix
Une union nationale ne peut être constituée et ne peut fonctionner que dans un calme total tant au point de vue politique que social. Il y a lieu donc d’éliminer à cet effet toutes les causes de dispute, d’affrontement et d’agitation aussi bien en matière politique qu’en ce qui concerne la vie sociale. En un mot, le calme est obligatoire.
Si cette condition préalable n’est pas acceptée sérieusement, on ne peut guère recourir à la solution de l’union nationale pour résoudre la crise.
Pour être plus précis, les partis, les syndicats ouvriers et patronaux et leurs dirigeants doivent pouvoir accepter d’ajourner confrontations politiques et agitations sociales pour après, s’il y a lieu, la période de l’union nationale. Tous les problèmes qui pourraient se poser à cet égard devraient pouvoir trouver une solution au sein des organismes de l’union nationale, évitant ainsi toute agitation intempestive, le recours à la rue et l’utilisation de la violence : un traité de paix entre Tunisiens en quelque sorte, c’est le minimum que l’on puisse exiger de chefs politiques et syndicaux responsables. Ces derniers doivent pouvoir rechercher à se faire pardonner toutes les agitations des vingt derniers mois notamment et celles qui les ont précédées depuis l’Indépendance. C’est le moment de prouver leur patriotisme et leur sens de l’intérêt général. On peut raisonnablement s’attendre à ce qu’ils se montrent à la hauteur de la situation.
2. L’objectif général et les tâches de l’union nationale
Cet objectif consiste à sortir le pays de la crise et de lui permettre de traiter les problèmes les plus urgents et les plus importants qui concernent la vie de la population, qu’il s’agisse de la sécurité, du chômage, de l’emploi, notamment celui des jeunes diplômés, des prix et des rémunérations, du coût de la vie, de la Caisse de compensation, des régions en retard qui vivent dans des conditions encore plus difficiles, pour ne citer que les plus urgents.
Il y a aussi des questions fondamentales qui doivent être abordées par les organismes de l’union nationale. Il s’agit principalement de la relance économique, c’est-à-dire de la promotion des investissements, de la croissance économique dont dépendent l’expansion de l’emploi, la réduction du chômage et le rééquilibrage de notre balance des paiements en déficit permanent depuis l’indépendance.
Cette relance économique exige une réforme profonde dans deux secteurs vitaux de la vie du pays : la réforme du système éducatif, devenue une «fabrique de chômage» selon de nombreux auteurs et observateurs sinon leur unanimité et en second lieu la réforme du système financier et fiscal qui vit une crise grave depuis de longues années: les banques, comme et plus que dans les autres pays sont sous-administrées et mal gérées, la fiscalité doit être simplifiée et revue.
Il y a aussi l’examen d’une révision générale des rôles respectifs de l’Etat et des autres collectivités publiques dont il faut alléger les tâches en vue de réduire une bureaucratie paralysante et de promouvoir les agents de la société civile, entreprises et organisations, pour leur faire assumer plus de responsabilités, les motiver et les faire participer activement à la vie publique au lieu de tout attendre de l’Etat.
3. Les moyens et organismes de l’union nationale
L’union nationale a besoin d’être encadrée et gérée. Son encadrement peut être confié à un « Conseil de la République » qui sera composé des représentants des partis politiques, syndicats et autres participants à l’union nationale. Sa mission consiste à concevoir la politique générale du pays et l’application de cette politique par le gouvernement d’union nationale.
Ledit gouvernement est chargé de la gestion des services publics dans tous les domaines de la vie économique et sociale. Il devra être composé de personnes expérimentées et indépendantes non affiliées à une fraction politique ou autre de manière à garantir la neutralité de leur gestion. Cette gestion est suivie par le Conseil de la République chargé de l’apprécier et de l’orienter sans se substituer au gouvernement qui doit garder son indépendance dans la conduite des affaires et des services publics du pays.
Les deux organismes, Conseil de la République et gouvernement, doivent rendre compte périodiquement de leur action et des résultats de leur gestion à l’Assemblée nationale constituante dont le rôle sera triple : achever la constitution et les lois d’application concernant les partis politiques et leur statut, les élections et la constitution de l’Instance indépendante ainsi que les autres instances et organismes concernant l’information, la presse et l’audiovisuel ainsi que le Conseil supérieur de la magistrature ou la Cour constitutionnelle, toutes institutions nécessaires à la mise en place d’un ordre juridique et politique établissant un cadre solide pour le régime démocratique qu’il faut enraciner dans le pays.
L’Assemblée, qui portera le nom d’Assemblée nationale, aura en outre un rôle législatif et politique durant la période d’union nationale. Pour que l’esprit de l’union nationale soit sauvegardé, ses décisions doivent être prises à la majorité des 4/5 de ses membres. Il y aura ainsi concordance entre la conduite du Conseil de la République, du Conseil du gouvernement et de l’Assemblée nationale.
4.Le consensus nécessaire et la légitimité obligatoire
L’union nationale suppose l’accord entre une partie significative du corps politique et social dont les représentants doivent décider de l’institution de l’union nationale et de son fonctionnement. Un accord de l’union nationale doit donc être établi retraçant l’objet de l’union nationale, les tâches à remplir durant la période de l’union nationale, les moyens d’action de cette union et les organismes prévus à cet effet, la durée de la période de l’union nationale, la protection de cette période par l’absence de conflits politiques et sociaux et le report de toutes les élections à la fin de cette période de manière à éviter l’agitation et l’instabilité que peuvent provoquer de telles consultations et pour éviter de perturber le travail à accomplir par les institutions de l’union nationale. Eviter des élections précipitées, sans un statut des partis politiques, une loi électorale et adaptée à notre situation et à notre public citoyen, un paysage politique mieux structuré avec un nombre limité de partis importants et capables de se relayer au pouvoir calmement et efficacement.
Celles du 23 octobre 2011 n’ont pas bénéficié de toutes ces conditions et n’ont pas réussi à redresser la situation générale du pays. Au contraire, elles ont accru la confusion et ont été peu représentatives, la moitié du corps électoral s’étant abstenue et un déséquilibre flagrant entre les forces électorales ayant conduit à la domination d’une fraction politique représentant uniquement 20% du corps électoral.
Il y a lieu donc de remédier à cette situation en se donnant le temps de construire les bases d’un régime démocratique viable pouvant conférer la stabilité nécessaire au pays et permettant à ses organismes de fonctionner convenablement. Le consensus est donc nécessaire sur l’ensemble de ces dispositifs.
Ce consensus est, certes, difficile à réaliser après les 20 mois d’agitation et de crise qu’on vient de vivre. Il est cependant absolument indispensable. Même s’il représente un important sacrifice des acteurs de la scène politique.
Ceux-ci doivent revenir à la raison et réussir à calmer le pays. Cela n’empêche pas leurs formations de travailler constructivement et d’organiser leur implantation et l’encadrement des citoyens pour obtenir leur participation à l’effort que l’union nationale est appelée à fournir. Il leur est demandé également de présenter des propositions et des réformes de manière à enrichir la réflexion nationale et garantir un meilleur succès de l’union nationale qui sera aussi le succès de la Révolution et la réalisation de ses objectifs.
Ce consensus n’est toutefois pas suffisant. Ce serait trop facile de gouverner au moyen de simples consensus. S’il est souvent nécessaire, il reste toujours limité. Il faut qu’il débouche sur la légitimité légale, au moyen d’une consultation populaire, d’élections ou d’un référendum comme on y est contraint dans les circonstances actuelles.
La situation actuelle est la suivante : le 23 octobre 2012, le mandat de l’Assemblée constituante doit prendre fin, légalement. Les électeurs ont tété convoqués le 23 octobre 2011 au moyen d’un texte législatif. Le décret-loi n°1086 du 3 août 2011 a convoqué les électeurs, ils ne sont pas venus tout seuls pour élire le 23 octobre 2011 une Assemblée constituante qui doit établir une nouvelle constitution dans un délai d’un an après sa première réunion suite à la vérification définitive du vote. Ce décret-loi en outre répond à la décision prise par les dix partis politiques les plus importants à l’époque dont le parti sorti majoritaire de ces élections.
L’exigence des principaux dirigeants a été confirmée par le décret-loi promulgué à l’époque par le président de la République, « provisoire » comme toutes les autres institutions, et dont l’autorité et la légitimité consensuelle ne peuvent être discutées aujourd’hui, après coup en quelque sorte par les partis de la thèse invraisemblable qui veut que l’Assemblée constituante est « souveraine» et «maîtresse» d’elle-même, ce qui est la négation de principe de tout ordre légal : si c’est le cas en effet, l’Assemblée constituante pourrait décider une ou plusieurs années selon son bon plaisir, ce qui est absurde. Il y a là un problème très sérieux et au lieu d’affirmer des thèses dangereuses et bizarres, il aurait fallu chercher des solutions dès le départ dont la meilleure consiste à terminer dans les délais la mission qui lui a été confiée par la loi et confirmée par les électeurs.
Aujourd’hui, il est trop tard pour trouver une solution et le 23 octobre, l’Assemblée nationale constituante doit d’elle-même mettre fin à son mandat pour ne pas fonctionner dans l’illégalité, illégalité constituant un précédent dépouillant la loi et les élections de toute utilité. On se contente de gouverner par simple consensus, ce qui est une innovation juridique intéressante mais qui ouvre la porte à toutes sortes d’illégalités : on voit ainsi le danger auquel on s’expose.
Par ailleurs, l’Assemblée constituante, qui n’a pas fonctionné uniquement comme constituante, comme le veut le décret-loi qui a convoqué les électeurs pour en élire les membres, a eu à remplir des fonctions ne figurant pas dans son mandat légal et elle est devenue par nécessité, et en pratique, une Assemblée législative et un Parlement politique devant nommer les membres du gouvernement, le Premier ministre, le chef de l’Etat, tâches réglementées par la « petite constitution » qui ne peut pas avoir « aboli » le décret-loi convoquant les électeurs et leur indiquant l’objet de l’élection et la durée du mandat de l’Assemblée à élire, pour la simple raison qu’on ne peut pas tromper l’électeur, le convoquer pour élire cette Assemblée, laquelle s’attribue ensuite le droit de ne pas respecter ce qui a été annoncé aux électeurs. Comment ensuite s’étonner de voir les électeurs s’abstenir désormais de participer aux élections, ne sachant pas exactement pourquoi ils votent, à quoi sert leur vote.
Il est donc inutile de recourir à une démonstration juridique forcée. Il convient simplement de trouver la solution qui doit permettre à l’Assemblée constituante de continuer calmement et sereinement l’établissement de la constitution en prolongeant légalement son mandat. Cette légalisation et cette légitimation de la prolongation du mandat de l’Assemblée ne peuvent être réalisées qu’au moyen de la reine des lois, celle établie par le corps électoral dans son ensemble, c’est-à-dire le référendum.
Ce référendum doit intervenir pour la solution de l’union nationale, objet de consensus entre les parties concernées mais qui doit être soumise au vote populaire par le moyen du référendum. Ce qui nous amène à examiner la durée de l’union nationale qui doit être en même temps celle du mandat de l’Assemblée constituante, qui est aussi législative et politique, c’est-à-dire trois ans, ce qui lui permettra d’accomplir sa tâche sans précipitation et sans les querelles et les disputes qui l’ont empêchée jusqu’ici de finir son travail.
5. La durée de l’union nationale et le calendrier de sa réalisation : le référendum
Pourquoi trois ans. Cette proposition a été largement discutée. Nous avons en effet vécu 20 mois après le 14 janvier 2011 et souffert de ce qui est provisoire et transitoire, comme je l’ai souvent signalé. En moins de deux ans en effet, nous avons eu quatre gouvernements «provisoires» successifs, dont deux, ceux du Premier ministre du président déchu au nombre de deux, très brefs, souffrant de son appartenance au régime aboli, le troisième est le gouvernement de l’ancien ministre de l’Intérieur de Bourguiba et le quatrième celui constitué après les élections, dénommé « Troïka » et qui ne réussit pas à marier les contraires, la droite conservatrice et la gauche «socialiste» et progressiste.
On connaît les résultats de cette gestion qui a fini par exposer le pays à des dangers sérieux. Aucun gouvernement, quelle que soit sa bonne volonté, ne peut dans ces conditions sauver le pays, rétablir la sécurité, redresser l’économie, stabiliser la société et instaurer le calme et la paix.
Il faut donc donner du temps au temps. Ce qui explique la fragilité des gouvernements concernés par ces mandats très courts, c’est leur concentration totale sur la conquête du pouvoir et la préparation des élections. Tout était traité en fonction de cet objet : plaire aux électeurs, leur promettre monts et merveilles, mettre la main sur les instruments du pouvoir pour «gagner» ces élections, etc., autant de « tâches » qui empêchent de s’occuper de l’essentiel : les problèmes concernant la population, l’emploi, le chômage, l’éducation, le système financier, la balance des paiements, tous problèmes considérés comme trop techniques pour attirer les champions de la politique. La population attendra. Attendra-t-elle ? La patience et l’obéissance ont des limites.
Cela explique pourquoi on a proposé la durée de 3 ans pour la période de l’union nationale. C’est un minimum si l’on veut réaliser les objectifs urgents et qui n’ont pu l’être par les gouvernements successifs. Cette période de trois ans doit se dérouler dans le calme et la paix: il s’agit en effet de déposer les armes «politiques» et de s’occuper du pays qui appelle au secours. Le sentiment patriotique n’a pas complètement disparu : le patriotisme aujourd’hui est de regrouper toutes nos énergies et tous nos moyens pour sauver le pays qui avait jusqu’ici, malgré ses faiblesses, une bonne réputation parmi les nations, qui a inauguré le «printemps arabe» et l’espoir d’une vie meilleure et d’une grande destinée nationale. L’enjeu en vaut la peine. On doit pouvoir y faire face dans l’enthousiasme en y associant surtout les nouvelles générations, tenues à l’écart durant de nombreuses décennies et qui ont fini pour certains par se désintéresser du sort de leur pays.
Des spéculations négatives ont été exprimées au sujet de cette période de trois ans. Pour certains, c’est prolonger la domination du parti islamiste et ses excès. Pour d’autres, il faut éliminer ce parti le plus vite possible comme s’ils étaient totalement sûrs de gagner les élections, alors qu’apparemment au moins, ils ne peuvent guère s’y préparer en quelques semaines ou quelques mois.
La période de trois ans a été proposée parce qu’elle pourra permettre aux organisations politiques de s’étoffer, de s’implanter, d’avoir des bases solides, celles de droite s’étant imposées par leur conflit avec le régime précédent et la répression qu’elles ont subie. L’objectif est de parvenir au bout de cette période de trois ans à «restructurer» le paysage politique, dans le calme et le sérieux, pour avoir des structures politiques équivalentes pouvant se relayer au pouvoir et assurer la continuité de l’Etat et le bonheur des populations.
A tous points de vue donc, cette durée de trois ans s’impose: c’est du bon sens. Le chef de l’Etat au pouvoir aujourd’hui l’a déjà entrevue et proposé avant les élections du 23 octobre 2011. Elle est sans aucun rapport avec les intérêts de telle ou telle fraction politique.
Elle présente également un intérêt majeur : réconcilier les Tunisiens après la longue période de dictature qui les a montés les uns contre les autres. Et ce avec l’espoir que toutes les parties concernées, à force de travailler ensemble pour l’intérêt supérieur du pays, finiront par trouver la doctrine et le programme réalistes et acceptables pour tout le monde, en laissant aux citoyens le soin de décider de leurs relations avec la religion ou les doctrines sociales et philosophiques. On évite aussi toute sorte de «fitna», de sédition et de guerre fratricide. C’est pourquoi il est proposé d’ajourner toutes les élections législatives, présidentielles, municipales et autres pour après la période de l’union nationale afin de bien les préparer pour qu’elles puissent contribuer à l’installation d’une réelle liberté démocratique dans le calme et la paix. Il y a lieu cependant de revoir la composition des conseils municipaux par les organismes de l’union nationale en attendant l’établissement de la constitution et les élections municipales ou régionales. Le calendrier de l’union nationale doit tenir compte de l’actualité et des problèmes en suspens. Le référendum proposé doit prolonger le mandat de l’Assemblée constituante et permettre à celle-ci d’achever son travail.
Il reste quelques semaines pour en convenir et éviter une crise à ce propos. La préparation de l’accord de l’union nationale doit intervenir le plus tôt possible pour être soumis au référendum. Cette préparation doit se terminer avant la fin de l’année pour que le référendum puisse intervenir en janvier 2013 et l’accord sur l’union mis en vigueur dès le début de 2013. Si les décisions sont prises avant le 23 octobre 2012, il n’y aura pas de crise, l’Assemblée constituante continuera normalement son travail, par consensus jusqu’à fin décembre 2012, son mandat est prolongé et il l’est par le référendum à partir de janvier 2013. Ce calendrier est donné à titre indicatif et tient compte des urgences du moment. On doit pouvoir le discuter, le modifier éventuellement, l’adopter et l’appliquer ensuite si l’Eternel nous guide dans le bon sens.
M.M.