Ils ont aimé la Tunisie
Ce 7 Novembre 2012, l’ancien Président ben Ali aurait pu achever une vingt cinquième année de « règne » à la tête de la république tunisienne.
Malheureusement pour lui, il a eu une fin chaotique, car il a fini par se mettre quasiment tout le monde à dos, à l’intérieur comme à l’extérieur du pays.
Des secousses menées par une jeunesse spontanée, efficacement relayées par les réseaux sociaux, finirent par avoir raison d’un régime politique miné par les réseaux mafieux et les trafics d’influence.
Et pourtant, nous sommes bien aujourd’hui un 7 Novembre et certains tunisiens ne pourront s’empêcher de penser à l’ère Ben Ali et de comparer avec embarras les derniers jours du défunt régime avec notre inquiétante actuelle situation.
Un 7 Novembre, la tentation est évidemment forte de comparer l’ère Ben Ali et celle de l’après Ben Ali. Pour ma part, je préfère évoquer en ce jour les noms d’autres personnalités quasi anonymes, qui ont eu chacune à sa manière un lien fort avec la Tunisie.
J’évoquerai d’abord la mémoire d’Abdallah Ben Amor Ben Mohamed El Ghoul résistant qui prit le maquis en 1942 et lutta ardemment l’arme au poing contre les forces coloniales de l’époque.
Il finit par être arrêté le 22 Avril 1947 et passé par les armes le 20 Décembre 1950.
Son avocat, Maître Max Scemama rapporte que devant le peloton d’exécution, Abdallah El Ghoul ne se laissa pas bander les yeux .Avant de tomber sous les balles des soldats, il cria de toutes ses forces, Vive Bourguiba.
La famille du martyr ne demanda point de dédommagement à qui que ce soit à ce jour.
El ghoul aimait son pays passionnément. Il faisait partie de cette race d’hommes qui défend depuis plus de trois mille ans notre pays du fin fond du Sahara jusqu'aux plus hautes cimes de l’Aurès, contre les innombrables hordes qui n’ont fait que dévaster notre vaste territoire.
Qu’à travers lui, tous nos martyrs soient reconnus et bénis.
Son avocat Max scemama se rendit à ses propres frais, à Paris même, pour solliciter une grâce présidentielle qui ne vint jamais.
Max Scemama, futur député sous bqourguiba faisait partie aussi de ces Tunisiens qui avaient tant donné à la nation. Ses coreligionnaires en sont aujourd’hui réduits à solliciter la protection de l’armée tunisienne pour espérer vivre en sécurité dans un pays qui est aussi le leur depuis la nuit des temps. Triste histoire, qui survient dans un pays ou on s’apprête à proclamer une nouvelle constitution où probablement, les tunisiens ne seront pas tous égaux en droits.
Autre personnalité dont j’aimerais évoquer le souvenir, Thomas Antoine, qui fut durant deux petites années Ambassadeur de Belgique en Tunisie.
Ce dernier rejoint son poste à Tunis lors du dernier semestre 2008.
Il s’investit de suite dans sa mission et multiplia les contacts avec ses interlocuteurs tunisiens .l’homme est humaniste et philosophe .Il est guidé par la passion. Il s’attacha avec sa femme à la Tunisie et voulait tout connaître de ce peuple, de ce pays jusqu’aux techniques de la fabrication de la céramique artisanale.
Ensuite, Il eut aussi comme nous tous le triste privilège de vivre les élections présidentielles de 2009, au cours desquelles le président Ben Ali fut reconduit à la tête de l’exécutif tunisien.
Comme d’autres diplomates, il émit de sérieux doutes sur la crédibilité des résultats des élections tunisiennes.
Seulement voilà, les observations du diplomate devinrent publiques lors d’échanges au parlement belge et déclenchèrent une crise diplomatique entre un régime tunisien à bout de souffle et une diplomatie belge prise de court par la tournure inhabituelle des événements.
Thomas Antoine quittera, avec énormément de tristesse la Tunisie à laquelle il s’était tellement attaché, quelques semaines avant la chute du régime Ben Ali. Il partit discrètement vers une autre destination et assuma jusqu’au bout son engagement.
Il appartient à cette école belge qu’elle soit humaniste ou « libreexaministe » mais qui place en toute circonstance l’homme au centre de ses préoccupations.
L’école est le lit de la démocratie où on n’enseigne plus que la tolérance, le droit à la différence. L’école est un ascenseur social qui permet à chaque citoyen méritant de prétendre aux plus hautes charges de l’état sans aucune forme de discrimination. L’actuel premier ministre belge en est la parfaite illustration.
Qu’ils soient tunisiens ou non El ghoul, Scemama, Thomas ont aimé chacun la Tunisie chacun à sa manière.
Plus que jamais la Tunisie a besoin de l’amour des siens. Plus que jamais la tunisianité a besoin d’être préservée.
Riadh Azaïez
Citoyen tunisien