La guerre des lettres
Depuis deux semaines, je regarde les images sur l’agression contre Gaza, diffusées en boucle par les Chaînes de télévision, complètement tétanisé, ne sachant que faire ; et puis, soudain, une idée lumineuse me traverse l’esprit : je vais, sans tarder, mener une guerre… aux lettres.
Tout au long de cette guerre, je ferai de mon mieux pour bafouer les règles les plus élémentaires de la convention de Genève.
Je ne ferai aucune différence entre un O et un M.
Je tirerai à bout portant dans la tempe du N.
Je ne donnerai pas l’occasion à l’alphabet de respirer.
Aucun répit ne leur sera accordé.
J’userai de bombes à fragmentation et d’uranium appauvri et de toutes sortes d’armes non reconnues.
Je barrerai la route à toutes les formes d’aides et d’où qu’elles viennent y compris celles de l’ONU.
Aucun journaliste ne sera toléré sur le champ de bataille. Ainsi la guerre des images n’aura pas lieu. Et je n’en serai qu’à mon avantage.
Je serai le seul à décider aussi arbitrairement que possible d’amputer un R ou de laisser à un V la vie sauve.
Je lancerai des obus sur les ambulances. J’assassinerai impunément tous les volontaires des ONG.
Mon armée de terre ratissera tous les coins et recoins pour que mon aviation puisse larguer, par la suite des bombes phosphoriques interdites, elles aussi, par la convention de Genève.
Peu importe les consonnes qui seront à l’école.
Peu importe les pauvres voyelles.
Elles partiront toutes en fumée.
J’éradiquerai des familles entières de P.
J’égorgerai des T qui étaient tranquillement installés au fond de leurs lits.
Je ricanerai à chaque fois que le conseil de sécurité de l’ONU se réunirait pour condamner mes agissements.
Je commettrai des crimes de guerre et il n'y aura personne pour m'arrêter.
Et si les médias internationaux voulaient m'entendre, je répondrais naturellement que c'était le A qui avait commencé.
Triste sort pour un clavier qui était simplement étendu devant un écran. Mais je ne saurais épargner des touches qui étaient incapables de décrire les sentiments que je ressentais.
Khalil
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