Notes & Docs - 15.06.2009

Parlements: quel rôle pour plus d'efficience aux projets de développement

La crise financière internationale et la crise économique globale qui s’est ensuivie, ont créé  une nouvelle situation caractérisée par des difficultés majeures pour le développement de l’Afrique suite aux effets de ces deux crises à savoir la baisse des investissements, l’amenuisement des revenus fiscaux et l'abaissement du flux de l’aide. Cette situation, qui est actuellement alarmante, nous oblige tous, pays et donateurs, à réfléchir sur le meilleur moyen d’optimiser les ressources rares existantes, financières, naturelles ou matérielles pour pouvoir y faire face.

Invité en tant que parlementaire tunisien et africain, je vais me limiter aux axes qui m’ont été proposés par les organisateurs à savoir le rôle des parlements pour une plus grande efficacité des politiques et projets de développement, le rôle des parlements dans la reddition des comptes des gouvernements dans la gestion des ressources du développement dans le contexte de la crise financière actuelle et les actions que les partenaires au développement doivent privilégier pour assurer une plus grande efficacité de l’aide et une amélioration des conditions de vie des populations dans le contexte du programme d’action d’Accra.

  1. ROLE DES PARLEMENTS POUR UNE PLUS GRANDE EFFICACITE DES POLITIQUES ET PROJETS DE DEVELOPPEMENT

Le rôle particulier qui incombe au parlement est de savoir veiller à la bonne exécution des budgets nationaux et défendre les intérêts nationaux. Les parlements doivent non seulement s’attacher au contrôle budgétaire mais aller au delà de cette mission vers une participation étroite dans l’élaboration des stratégies nationales de développement, mais également à leur mise en œuvre, suivi et évaluation.

Il est indéniable que le contrôle parlementaire revêt une importance stratégique pour les parlements. Des trois dimensions de la mission fondamentale du parlement que sont l'action de légiférer, celle de surveiller les actes du gouvernement, de ses ministères et de ses organismes, et celle de prendre position sur diverses questions d'intérêt public, c'est assurément celle du contrôle parlementaire qui est la plus authentiquement caractéristique de l'apport des parlements et des commissions parlementaires aux affaires de l'État.

Pour le contribuable, le contrôle parlementaire constitue une valeur ajoutée. Il permet d'empêcher et même de prévenir les erreurs administratives et les abus de pouvoir, d'éviter le gaspillage des fonds publics ou la malversation administrative, d'amener l'appareil gouvernemental à bien préciser ses cibles et à mieux répondre aux attentes des citoyens. Exercer efficacement le contrôle parlementaire, c'est faire en sorte que le citoyen et plus particulièrement le contribuable en ait davantage pour son argent.

Dans le processus budgétaire, le Parlement doit veiller à exercer une triple mission

  1. Participer à la détermination des stratégies et politiques
  2. Contrôler l’action du Gouvernement
  3. Assurer une bonne gouvernance et limiter la corruption

En exerçant ces différentes missions, les parlements contribuent de ce fait à la transparence et à la responsabilité dans la gestion du patrimoine de l’Etat permettant ainsi de réduire le gaspillage des ressources.

Partant de l’expérience de mon pays qui a été classée par la Banque Mondiale 2ème au monde sur le plan efficacité de gestion des fonds publics, je peux dire que les Parlements doivent bénéficier, pour accomplir efficacement leurs missions, d’un certain nombre d'atouts :

  • L’autonomie

L’autonomie repose sur la possibilité de s’exprimer librement dans l’enceinte du Parlement, et sur un budget des dotations qui permette aux parlementaires de jouir d’une indépendance financière suffisante pour ne pas dépendre en permanence de l’Exécutif.

  • Un système d’information adéquat

Au cœur de toute action de contrôle, y compris le contrôle parlementaire, figure désormais la nécessaire amélioration de l'accès à l'information.

Or, on peut raisonnablement douter que les membres des commissions qui ont à étudier les détails des projets de loi des finances ont toute l'information nécessaire pour consentir à leur adoption. Ainsi, s'ils ne peuvent choisir librement les groupes et les experts à consulter, s'ils ne disposent pas d'un éclairage indépendant et de la documentation pertinente, comment peuvent-ils se prononcer en toute conscience? Est-ce raisonnable de demander le consentement à l'adoption d'un projet de loi sans connaître de quelle façon le gouvernement prévoit de l'appliquer ?

Les documents budgétaires transmis par le Gouvernement doivent être également complets, détaillés et précis et les données macroéconomiques qui les accompagnent émaner de sources gouvernementales mais aussi internationales et indépendantes de l’Exécutif. Les ONG et les milieux universitaires constituent d’autres sources importantes d’information et d’analyse que les parlements peuvent mettre à contribution.

Par ailleurs, les participants ont pris note du fonctionnement des différentes institutions qui sont établies pour concourir au contrôle de l’exécution du budget. Qu’il s’agisse de l’Auditor Général (dans le système anglo-saxon) ou de la Cour des comptes, ces institutions doivent jouir d’une indépendance leur permettant de fonctionner sans contrainte de la part du Gouvernement. La Cour des Comptes tunisienne en est un exemple édifiant. Ces institutions supérieures de contrôle constituent un outil très important  pour la reddition des comptes et une source précieuse d’informations. On ne peut pas concevoir une loi de règlement du budget sans un rapport de l’institution supérieure de contrôle qui éclaire les parlementaires sur les conditions dans lesquelles le budget a été exécuté et le degré d’atteinte des objectifs.

"Avec un budget plus lisible, le Parlement pourra exercer pleinement son rôle dans le pilotage stratégique de l'action de l'Etat et veiller à la bonne gestion des finances publiques. Les crédits étant présentés par action et par titre,  il pourra, par exemple, apprécier la politique d'investissement relatif à un programme mais aussi le coût d'une action. Le débat budgétaire ne sera plus centré sur l'évolution à la marge du budget d'une année sur l'autre, mais sur la pertinence des dépenses au sein d'une mission, en examinant à la fois les moyens et les objectifs. Le Parlement pourra faire évoluer la répartition des crédits au sein d'une même mission ou créer un programme (...). Le Parlement doit disposer dans ce cadre du pouvoir d'audition et d'enquêtes renforcés, du droit de procéder à toutes investigations sur pièces et sur place ainsi que du droit de solliciter l’institution supérieure des contrôle (la Cour des comptes ou le vérificateur général ou l’inspection générale selon les pays) dans le cadre d'une mission de contrôle et d'évaluation."

  • Une implication plus grande des parlementaires dans le processus de préparation du budget

Il est reconnu que l'intervention du député au processus de préparation d'un projet de loi est marginale. S'il intervient peu en amont, il en est de même en aval : il lui est très difficile de suivre la mise en œuvre d'une loi.

En réalité, ce qui est demandé au bout du compte aux députés en matière de législation en général et en matière de législation financière en particulier, c'est de consentir à l'adoption d'un projet de loi. Avant de donner ou de refuser ce consentement, il est du devoir des députés d'examiner l'opportunité du projet de loi et de vérifier en détail son contenu. Ce pouvoir de contrôle est dévolu à tous les députés. Encore faudrait-il que ce consentement soit éclairé.

Il est également important qu'une concertation permanente existe entre le Gouvernement et le Parlement à toutes les étapes du processus budgétaire. Dans certains pays, le Parlement a la possibilité de débattre et de se prononcer sur les intentions politiques du Gouvernement et leur traduction en rubriques budgétaires..

Pour être efficace, le Parlement doit avoir la possibilité de modifier la définition d’un programme, et de changer l’affectation des dépenses entre les programmes, capacité d’enquête et de vérification au stade de l’exécution. L’objectif est de permettre l’examen des budgets à partir des finalités de l’action publique, classées en missions, programmes et actions et de favoriser ainsi la réforme de l’Etat et l’allégement de ses structures, grâce à un exercice plus efficace du contrôle parlementaire.

Dans les systèmes bicaméraux, la seconde Chambre (Chambre haute) joue généralement un rôle important dans le processus budgétaire conjointement avec la Chambre basse. Elle constitue un forum supplémentaire d’examen et de débat du projet de loi de finances. En règle générale, lorsque la responsabilité du budget est commune aux deux Chambres, la primauté est donnée à la Chambre basse.

  • Renforcer les moyens de travail du député

Faire mieux en matière de contrôle parlementaire, c'est d'abord consacrer plus de temps et d'efforts à la préparation des députés et, en particulier, des membres des commissions parlementaires. C'est aussi les outiller avec des analyses et des synthèses, des grilles d'analyse, des extraits de la documentation pertinente. C'est leur donner accès à une expertise indépendante.

C'est leur donner le temps de parole suffisant pour être en mesure de questionner les aspects nébuleux, de vérifier des données, de tester des hypothèses. Faire mieux, pour les commissions parlementaires, c'est aussi se prononcer à l'égard des questions qu'on leur a soumises ou qu'elles ont décidé d'explorer de leur propre chef. C'est faire en sorte qu'au minimum les témoignages recueillis fassent l'objet d'une synthèse dans le rapport qui donne suite à une consultation publique, de façon qu'ils ne soient pas simplement retranscrits, en vrac, dans le Journal des débats. Enfin, faire mieux, c'est chercher, formuler et recommander des solutions ou des actions pertinentes aux problèmes examinés, ainsi que d'en assurer plus tard le suivi en requérant les réactions des personnes et des organismes interpellés par la commission, ou en exigeant des comptes des entités imputables.

L’ouverture à la société civile et la contribution de celle-ci au processus budgétaire renforce l’efficacité et la transparence. La société civile peut aider le Parlement à traduire les préoccupations de certains secteurs de la société en politiques efficaces, y compris en matière budgétaire. C’est aussi un pool d’expertise dans lequel le Parlement peut puiser. Les organisations de la société civile peuvent, par exemple, être des sources indépendantes d’informations utiles et d’analyses pouvant éclairer le processus budgétaire. Il est donc intéressant de l’associer par le biais de consultations, d’auditions publiques.

La fonction publique parlementaire doit être également stable, de bon niveau, ne pas dépendre de l’Exécutif et capable d’assister techniquement les parlementaires dans leurs missions, notamment budgétaires. Il est extrêmement important  que les députés disposent  de fonctionnaires parlementaires compétents et efficaces.

  • Collaboration étroite avec le pouvoir exécutif

Il incombe aux gestionnaires de mettre minutieusement en application et de faire respecter l'esprit et la lettre des lois adoptées par le Parlement et des règlements y afférents. Les lois proprement dites, documents juridiques complexes, énoncent souvent les objectifs des programmes en termes généraux, sans entrer dans le détail de l'application. Le gouvernement et ses organismes centraux fournissent des indications supplémentaires sous forme de règles et de directives. Ils en fournissent aussi en tant que formation sur l'application des dispositions prises par le Parlement et sur la façon de rendre compte au Parlement des dépenses par rapport aux budgets, des recettes et des réalisations.

Il est également important qu’ une concertation permanente existe entre le Gouvernement et le Parlement à toutes les étapes du processus budgétaire. Dans certains pays, le Parlement a la possibilité de débattre et de se prononcer sur les intentions politiques du Gouvernement et leur traduction en rubriques budgétaires..

Pour être efficace, le Parlement doit avoir la possibilité de modifier la définition d’un programme, et de changer l’affectation des dépenses entre les programmes, capacité d’enquête et de vérification au stade de l’exécution. L’objectif est de permettre l’examen des budgets à partir des finalités de l’action publique, classées en missions, programmes et actions ; et de favoriser ainsi la réforme de l’Etat et l’allégement de ses structures, grâce à un exercice plus efficace du contrôle parlementaire.

Dans les systèmes bicaméraux, la seconde Chambre (Chambre haute) joue généralement un rôle important dans le processus budgétaire conjointement avec la Chambre basse. Elle constitue un forum supplémentaire d’examen et de débat du projet de loi de finances. En règle générale, lorsque la responsabilité du budget est commune aux deux Chambres, la primauté est donnée à la Chambre basse.

  • Une plus grande Publicité de ses travaux

La meilleure garantie d’un travail optimal du Parlement en matière budgétaire est la publicité qui entoure les travaux de celui-ci. La presse a un rôle majeur à jouer dans le retentissement du débat budgétaire, sa vulgarisation, son explication et sa transformation en débat politique essentiel accessible au plus grand nombre.

  1. ROLE DES PARLEMENTS DANS LA REDDITION DES COMPTES DES GOUVERNEMENTS DANS LA GESTION DES RESSOURCES DU DEVELOPPEMENT DANS LE CONTEXTE DE LA CRISE FINANCIERE ACTUELLE.

L'importance prise par les exigences de contrôle et de reddition des comptes est l'une des évolutions les plus marquantes du fonctionnement des démocraties occidentales ces dernières années.
En effet, le contrôle de l'administration par le Parlement représente plus qu'une exigence pour les parlementaires mais un devoir. Dans le cadre de cette mission de contrôle, le Parlement a une obligation de résultat. Il doit avoir la capacité de proposer des alternatives aux questions dénoncées et de faire le suivi de ses propositions du fait que l’administration est parfois insensible à ses recommandations. Le contrôle parlementaire devrait être astreint à un devoir de performance.

Dans ce cadre, le Parlement doit disposer de la Capacité d’amendement du budget. Si le Parlement exerce pleinement sa mission budgétaire, il dispose du droit de modifier le budget par voie d’amendement.

Cependant, la promotion d'un système de responsabilité du gouvernement passe nécessairement par la mise en place de l’obligation de rendre compte. Cette obligation devrait exister à tous les niveaux de la hiérarchie administrative afin de permettre à l'Administration de répondre de l'utilisation qu'elle a faite des ressources engagées et du degré de réalisation des objectifs tracés. Si l’administration n’est pas outillée pour fournir l’information adéquate et à temps, le système de reddition des comptes ne peut pas fonctionner et le parlement serait dans l’impossibilité de mettre en question la responsabilité du gouvernement.

Par ailleurs, la promotion du cadre budgétaire vers un budget par objectif revêt actuellement une importance fondamentale dans le renforcement de la capacité du parlement dans la mise en œuvre de la reddition des comptes du gouvernement.

La  programmation de la dépense sur plusieurs années et la généralisation de l’évaluation des résultats sont des mécanismes qui contribuent à l’efficacité des dépenses et à l’analyse de l’atteinte des objectifs en d’autres termes de l’efficacité.

En outre, la gestion axée sur les résultats en termes de développement favorise une prise de décision fondée sur des preuves en vue d’améliorer l’efficacité de la gestion des ressources de développement. Le renforcement des capacités institutionnelles – qui comprend la planification pluriannuelle, la budgétisation axée sur les résultats, la fonction évaluation, les capacités statistiques, la comptabilité publique, les mécanismes de contrôle et les OSC – permettent d’établir un lien entre les revues annuelles des stratégies et programmes de développement et les budgets. Ceci mettra à la disposition du parlement l’information adéquate lui permettant de demander des comptes au gouvernement.

  1. LES ACTIONS QUE LES PARTENAIRES AU DEVELOPPEMENT DOIVENT PRIVILEGIER POUR ASSURER UNE PLUS GRANDE EFFICACITE DE L’AIDE ET UNE AMELIORATION DES CONDITIONS DE VIE DES POPULATIONS DANS LE CONTEXTE DU PROGRAMME D’ACTION D’ACCRA

L’efficacité de l’aide est devenue une préoccupation croissante de la communauté des bailleurs de fonds, qui s'est traduite notamment par la fixation des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD, 2001), par la Conférence de Monterrey sur le financement du développement (2002) et par la Déclaration de Paris (2005).
L’engagement de la communauté internationale à doubler l’aide pour financer les Objectifs du Millénaire pour le Développement a soulevé de nouvelles questions concernant l’efficacité de l’aide au développement.

Le Programme d’Action d’Accra accorde la priorité au renforcement des capacités des pays et à la mise en œuvre d’un partenariat plus efficace et plus inclusif, ainsi qu’à une utilisation accrue de la gestion axée sur les résultats.

Dans ce cadre, je crois que l’action la plus importante sur laquelle les donateurs doivent insister est la Transparence et l’obligation de rendre compte. La transparence et l’obligation de rendre compte sont des facteurs essentiels pour l’obtention de résultats sur le front du développement. Les donateurs diffuseront régulièrement des informations détaillées et actualisées sur le volume, l’affectation et, lorsqu’ils sont disponibles, les résultats des dépenses consacrées au développement de façon à permettre l’établissement de budgets plus exacts, la tenue d’une comptabilité plus fidèle et une vérification des comptes plus précise par les pays en développement.

Ceci permettra des évaluations régulières de l’utilisation de l’aide au développement et garantira d’une certaine manière l’atteinte des objectifs pour lesquels les fonds ont été alloués. Ces évaluations doivent être mutuelles entre les bailleurs des fonds et les états bénéficiaires de l’aide. Elles incluront le contrôle parlementaire et la participation de la société civile et des citoyens.
 
Evénement en marge # 8 Lundi, 11 Mai 2009
Renforcer la Priorité Accordée aux Résultats de Développement

PROGRAMME

I.  Introduction par la Banque Africaine de Développement

II. Quelles bonnes pratiques face à de nouveaux défis?

  • Représentants de Pays Membres Régionaux # 1
  • Représentants de Pays Membres Régionaux# 2
  • Banque Africaine de Développement 

III. Perspectives et Priorités 

  1. Plénipotentiaires du Fonds Africain de Développement
  • La Communauté Africaine de Pratique (Cop-MFDR)
  • Seydou YAYE, Cop-MFDR, Niger.
  • Sylvester OBONG, Cop-MFDR, Kenya.
  1. Parlementaires
  • Jameleddine Khemakhem, Sénateur, membre du Parlement panafricain, Tunisie
  • Luc OYOUBI, Député, Président de la Commission des Finances de l’Assemblée Nationale, Gabon.
  1. Représentants de la société civile
  • Florence ETTA EBAM, African Gender Development, Kenya.

IV. Discussions

V.  Conclusions: Banque Africaine de Développement
 

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