F Hollande osera-t-il proposer la conversion de dette ?
A quelques jours du déplacement, les 4 et 5 juillet, du couple F Hollande, on scrute encore les communiqués des chancelleries dans l’espoir d’y trouver un ordre du jour plus détaillé des entretiens. En vain, et pourtant ce ne sont pas les sujets qui manquent. Il est vrai que cette rencontre ne se présente pas sous les meilleurs auspices. F Hollande est au plus bas dans les sondages, tandis que notre Troïka engluée dans ses contradictions hésite quant à la posture à adopter: nationalisme ombrageux ou réconciliation post-Sarkozy. Le calendrier prévoit, diners officiels, rencontre avec la société civile, et un discours à l’assemblée constituante. L’hôte provisoire de Carthage se fendra d’une diatribe sur l’amitié franco-tunisienne. Le premier ministre balbutiera quelques mots sur le succès de la transition démocratique, quand le titulaire du perchoir de l’assemblée réitérera les raisons de sa confiance à son camarade de l’internationale socialiste. Reliquats de contentieux comme futurs liens de coopération, une multitude de sujets d’un mutuel intérêt ! Les questions épineuses de l’immigration choisie, des visas ou du protocole fixant les quotas de migrants seront-elles abordés ? Celle de la récupération des biens mal acquis aujourd’hui clairement identifiés et circonscrits ?
Mais comme il est d’usage désormais dans la diplomatie moderne, le président français, en VRP de l’économie, sera flanqué d’une délégation d’hommes d’affaires. La France, il est vrai, reste le premier partenaire commercial et financier du pays ! Une rencontre au sommet MEDEF – UTICA, en présence des deux présidents, préparée de longue date clôturera ce rendez-vous. Un temps fort qui pourrait bel et bien occulter et éclipser à lui seul toutes ces questions en suspens ! Business as usual ?
La non moins « politique » question de la dette occupera-t-elle la place qu’elle mérite ?
Les opinions publiques des deux rives sont partagées à ce sujet. F Hollande pourra-t-il réitérer sa promesse de campagne de transformer une partie de la dette en don ? Son vis-à-vis tunisien osera-il reparler de dette odieuse et de se départir quelque peu de l’engagement d’honorer sa signature souveraine ? Sera-t-il envisagé, -a minima-, une possible renégociation des termes de cette dette pour cause de force majeure ? Rien n’est moins sur ! La commission d’audit de la dette n’a jamais produit le moindre document au grand dam de ses inspirateurs. Une commission d’ailleurs et depuis enterrée sans bruit, par le quarteron de ministres en charge des questions dites économiques et non moins accompagné par le silence assourdissant de la BCT. Il est vrai que le FMI est passé par là.
Coté tunisien cependant, s’il est toujours possible de diverger sur le caractère soutenable ou pas de cette dette, il est néanmoins et unanimement possible de convenir que son poids constitue une entrave, un handicap majeur pour l’amorce d’une relance.
Ce n’est donc pas tant la gestion de cette dette vis-à-vis des grands équilibres qui est en cause et question ici, mais bien plus fondamentalement, de la capacité du pays à se reconstituer des marges de manœuvre suffisantes. Mais au juste de quoi parle-t-on ? Citons la BCT pour s’éviter de mauvais procès. Dixit: « L’encours de la dette avec la France s’est accrue de 376 MDT pour s’élever à 3.394 MDT en 2011. La part de ce pays dans le total de l’encours s’est consolidée pour s’établir à 13,4% ». Il conviendrait aussi de noter que la France intervient, -mais pour quelle part exacte-, via l’Union Européenne au travers de la BEI dont l’encours est de 3552 MDT. Ces chiffres ne sont là qu’à titre indicatif d’autant que nous ne disposons pas non plus de la présence française via les marchés financiers de l’ordre de 5441 MDT, montant sur lequel la BCT reste muette. Autant dire que nous ne nous hasarderons pas à donner un montant précis qui faisant polémique se traduirait par une possible une dénonciation pour « divulgation de fausses informations ». Restons appliqué, sait-on jamais par les temps qui courent ! Mais tout de même l’ordre de grandeur n’a rien à voir avec celui de d’autres pays. La BCT nous dit : « L’encours de la dette avec l’Allemagne a, de son côté, poursuivi sa tendance baissière, pour s’établir, au terme de l’année 2011, à 350 MDT. La part de ce pays dans l’encours total passe à 1,4% contre 1,7% à la fin de 2010 ». On le voit bien, -toutes choses égales par ailleurs- le rapport Allemagne-France s’établit dans une proportion de 1 à 10. Pour le coup, c’est bien plus sérieux ! Mais alors une question se pose.
Va-t-il advenir à la dette française, ce que l’Allemagne de Merkel dans sa rigueur légendaire et sa mansuétude pour le pays a réussi à négocier, à savoir une conversion de dettes dont beaucoup semblent se satisfaire ! Une ignominie!
Nos dirigeants et élites du moment n’ont pas expliqué ce que ce mécanisme scélérat dénommé aussi « Debt-Equity Swap » signifie réellement. Une transformation de dettes en projets d’investissement ainsi payés d’avance. Il est vrai que les non-initiés, les crédules n’y ont vu que du feu ! L’aide allemande
Nous ne pouvons refaire l’histoire des ravages de ce mécanisme, particulièrement bien connu de l’Amérique Latine de la fin des années 90. Une braderie dont on ne se remet difficilement. Les termes de la négociation de conversion de cette dette allemande n’ont toujours pas été rendus publics. Une possible décote ? Des engagements pris sur de possibles ouvertures du capital de sociétés publiques ou de créations à venir ? Et dire que nos grands argentiers ne jurent que par la « bonne gouvernance ». Une infamie!
Aussi serait-il si incongru, si discourtois, de demander à la France la transformation en don, en annulation, en rééchelonnement de tout ou partie de cette dette ? Serait-ce abusif de revoir la maturité, la durée, les taux, et de réexaminer les prolongements désastreux de ce que pudiquement la BCT appelle l’effet-change. Or des solutions « techniques » à cette question « politique » existent. Il ne s’agit au final que de volonté et de courage. Parlez-en au club de Paris et au consortium de banques françaises dans leur relation avec les pays d’Amérique Latine d’alors, ou plus récemment avec la Grèce.
Nous avons bien conscience que les considérations évoquées ici, échapperont à certains de nos citoyens bien trop préoccupés par leurs fins de mois et leur pouvoir d’achat qui s’effiloche au fil du temps, sans même parler des laissés pour compte. On l’aura compris, le problème loin d’être technique, est éminemment politique ! Récupérer sous une forme ou une autre de 2 à 4 Milliards DT, voire plus, une broutille ? Alors les possibles annonces qui ne manqueront pas de clore en « fanfare » cette rencontre, telle une possible construction d’un pont à péage à Bizerte, d’une université ou d’un hôpital privés en partenariat, ne changeront rien à l’affaire.
Nous reviendrons sur cette question aussi souvent qu’il le faudra, qui cette fois-ci encore pourrait bel et bien être enterrée…. et ce afin que le pays trop longtemps mal traité, retrouve le second souffle dont il a tant besoin.
A bon entendeur, salut…..
Hédi Sraieb,
Docteur d’Etat en économie du développement.
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Il me semble qu'avant même de penser à une éventuelle conversion de la dette, il faudrait analyser cette même dette. Comment a t'elle été contracté? A quoi a t'elle servie ? A l'heure ou la justice Européenne remet en question la question du gel des avoirs des trabelsi et consorts, nous somees en droit également de s'intérroger par rapport au bien fondé de cette même dette. En un mot, l'argent qui a été prété aux Trabelsi sous couvert de l'Etat, doit être remboursé par ses bénéficiaires, à savoir les trabelsi...
la france est aussi en deficit de plusieurs milliards d'euros,je vois mal hollande lacher du lest pour la tunisie,en plus du chomage,de la precarité,du manque d'investissement,de baisse de la balance commerciale avec l'allemagne. vivre en france avec un salaire de 3000 euros par mois;juste pour manger et dormir. des miliers de tunisiens souhaitent rentrer en tunisie meme des commercants faute d'interets