L'énigmatique Abdelhakim Belhadj: du treillis de djihadiste au costume du politique
Que savons-nous de précis au fait sur ce qui se passe en Libye, depuis le déclenchement de la révolution, le 17 février 2011? Quel rôle y jouent les islamistes et surtout l’une de leurs principales icônes, Abdelhakim Belhadj, émir du Groupe islamique combattant libyen, ancien compagnon de route de Ben Laden en Afghanistan ? Et comment la Tunisie a servi de base arrière pour la révolution libyenne jusqu’à la chute finale du régime de Kadhafi ? Le livre de Isabelle Mandraud, reporter au Monde, Du djihad aux urnes, Le parcours singulier d’Abdelhakim Belhadj nous fournit un éclairage exceptionnel.
L’angle choisi établit un large panorama: comment un jeune Arabe, Libyen ou autre, «tombe-t-il» dans le djihadisme, échangera le confort douillet familial et les perspectives d’une brillante carrière contre les affres d’une guerre d’un autre âge, au fin fond de l’Afghanistan, dans le froid glacial et face à tous risques? Mais, et c’est encore plus intéressant, une fois ses illusions perdues, saura-t-il se départir du djihadisme pour se convertir à l’action politique et à la démocratie? Abdelkérim Belhadj, énigmatique, controversé, mais aussi charismatique, s’avère emblématique, offrant des clés essentielles tant pour découvrir cet univers que décoder le personnage. L’évocation des liens particuliers de Belhadj, tissés de longue date avec le chef d’Ennahdha, Rached Ghannouchi (depuis 1992, et renforcés après la révolution), et de nombre d’épisodes de la révolution libyenne qui se sont déroulés en Tunisie, confèrent une dimension particulière supplémentaire à l’ouvrage.
Les lecteurs du Monde connaissent déjà la rigueur et le talent d’Isabelle Mandraud, en charge de la section Maghreb, qui couvre de très près «le Printemps arabe», très attentive à l’islam radical. Ils lui découvrent dans ce livre un heureux mixage des genres journalistiques, entre enquête, reportage et interviews, avec un sens aigu de la précision, s’appuyant sur une riche documentation et dans certains passages qui s’y prêtent, une plume bien romancée. Elle s’intéressait depuis longtemps à Belhadj, mais leur première rencontre ne remonte qu’au 8 décembre 2012, lorsqu’elle lui a été présentée à l’hôtel le Palace à Gammarth. Ils se reverront plusieurs fois à Tunis et à Tripoli où l’y accompagnera son compagnon fidèle de reportage, Nicolas Fauqué. De plus de 60 heures d’entretiens au total, elle a pu tirer l’essentiel de ce livre, le reste est alimenté par des recherches très fouillées et d’entretiens avec d’autres djihadistes libyens.
Tour à tour, Isabelle Mandraud nous fais suivre Abdelhakim Belhadj durant sa prime jeunesse à Tripoli, son engagement islamiste, son départ en Arabie Saoudite avant de se rendre en Afghanistan, ses années de combats, son ultime discussion avec Oussama Ben Laden qui marquera la rupture entre les deux, «l’un prônant une campagne de terreur mondiale, l’autre un djihad national encadré par des règles». Et le voilà voué à une longue errance entre le Soudan, la Turquie, l’Iran, l’Irak, la Chine et la Malaisie où il se fera finalement arrêter pour être livré à Kadhafi. Les conditions de sa capture, avec sa femme enceinte, et de leur remise aux services libyens sont rocambolesques. Le récit des séances de torture est insupportable et les épreuves endurées en prison sont un véritable supplice. Viennent ensuite les «révisions idéologiques», les discussions entre anciens djihadistes, les tentatives de récupération par Seif al-Islam Kadhafi à la recherche d’ouverture pour le régime agonisant de Kadhafi et la remise en liberté.
Nous retrouverons Belhadj à la veille de la révolution et le voilà reprendre les armes cette fois pour libérer son pays de la dictature. A la tête de ses partisans qui atteindront 23 000 hommes, il parviendra à prendre Tripoli et s’attaquer au sanctuaire légendaire de Bab Al Azizia. Le Conseil national de transition le reconnaîtra en gouverneur de Tripoli. Mais, il aura à en déchanter bientôt, sous le coup des rivalités internes et de puissants jeux d’influence. A l’approche des élections, troquant le treillis contre le costume, il fonde son parti, Hizb el -Watan, mais n’arrivera pas à se faire élire, se contentant d’arracher un seul siège. Loin de se résigner à ce premier verdict des urnes, il poursuit son combat, cette fois-ci absolument politique. «On a beaucoup écrit sur le cheminement, l’embrigadement, qui pousse un homme à devenir djihadiste», se demande, intriguée, Isabelle Mandraud. Mais, l’inverse? Quelqu’un qui a vécu toute sa vie avec des armes à la main peut-il devenir soudain un politique «normal»? Une véritable interrogation qui interpelle le lecteur de ce livre.
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Pour répondre à la question d'Isaelle M, on peut avoir manié les armes pendant longtemps et puis faire une carrière politique. Il y a au moins un précédent qui s'appelle Yasser ARAFAT. Pour le reste, je n'oublie pas que c'est l'OTAN qui est allé chercher A Bleadj et ses acloytes pour renverser le Pauvre diable Lybien, qui avait sur la fin fait toutes les concession possibles à l'occident. Il y a peut être aussi derrière ce "changement" de stratégie et de tactique les conseils en communication de ces mêmes commanditaires. On le sait aujourd'hui, au lendemain de la révolution, l'occident a "choisi" pour nous canaliser l'internationale islamiste. Pour eux c'est la plus apte à nous "occuper" pour les 20 -30 prochaiens années et à stabiliser le climat propre aux affaires internationales. Je pense qu'ils ont mal calculé. En tout cas nous devons leleur montrer.
Une véritable épopé;Castro;Guevarra ont aussi porté les armes mais ils avaient un projet de société dans la tete.Quel est le projet de Belhaj certe plus avenant en costume;l 'hmme a des convictions;et n a pas monayé celles ci pour les renier en contre partie de privilèges des khaddafi.L 'Otan a eu khaddafi qui a dilapidé l 'argent du pays ni universités ni hopitaux;avec des domages collatéraux;la mrt de civils lybiens.la Lybie doit se reconstruire; s 'unir;un vaste chantier pour Belhaj et d 'autres
En dehors des motivations personnelles de cette journaliste qui change de couleur selon la saison, dans ce pays plus personne ne pourra nous faire prendre des vessies pour des lanternes. Quant à encenser le journal Le Monde, il y a bien longtemps qu'il ne représente plus aucune référence.
A mon avis etre djihadiste ,est une forme de colère pour celui qui l'applique. Au départ j'appelle cela un engagement pour une cause qui n'aboutit pas et qui se transforme en djihad.Tout est possible à notre époque!
le MONDE fondé par Hubert Beuve Mery aidé pae le général de GaULLE;était un journal fe réference;avec une équipe de journalistes chevronnés n' hésitant pas à critiquer la politique gaullienne ;il a poursuivi lentement son déclin pourdevenir la voix de ses maitres seul est resté le nom du journal ;l 'esprit et l 'éthique se sont envolés.C est devenu un journal de propagande orienté et de carrieristes qui changent d 'opinion au gré de l 'humeur de leurs maitres