Déficit budgétaire et lutte contre les inégalités: Le marteau et l'enclume
En période de crise ou carrément de récession tout gouvernement est amené à arbitrer entre l’ajustement de son budget en fonction de ses recettes et la lutte contre la montée des inégalités pour préserver sa cohésion sociale. En effet, c’est en période de récession que les déficits budgétaires apparaissent à cause d’une réduction des recettes fiscales ou d’un ralentissement de leur augmentation, tandis qu’au même temps les dépenses, notamment à caractère social, ont tendance à augmenter. Cet effet de ciseau peut conduire à l’aggravation du déficit budgétaire. Un déficit qui pourrait, éventuellement, contribuer à soutenir la demande et la croissance économique? L’intervention de l’Etat se heurte donc à la contrainte budgétaire! D’où la question centrale: Est-il souhaitable, opportun, au nom de la lutte contre les inégalités, de creuser davantage le déficit budgétaire? Telle est la problématique que nous proposons d’analyser dans cette contribution.
Mais avant de rentrer dans le vif du sujet et d’interroger donc la théorie et l’histoire économique des nations en la matière, plus précisément le courant keynésiens et le courant ultralibéral ainsi que la question de la soutenabilité de la dette, je souhaite, dans un volet introductif, définir les deux concepts clés de notre sujet, à savoir : Budget et Inégalités. Ainsi, les lectrices et les lecteurs pourront mieux en saisir toutes les difficultés, les complexités et les subtilités. Nous verrons, dans une troisième et dernière partie, Comment faire, alors, de l’égalité une réalité et comment la financer dans le cas de la Tunisie?
1/ Budget et inégalités: Deux concepts à éclairer
1.1/ Le budget de l’Etat: de quoi parle-t-on?
Le budget de l’Etat est un document retraçant l’ensemble des recettes et des dépenses de l’Etat pour une année civile (du 1er janvier au 31 décembre). Le budget de l’Etat, avant qu’il reçoive le nom de « loi de finance », est préparé par le gouvernement et voté par le parlement:
- Les recettes, ou ressources, du budget de l’Etat proviennent surtout de la fiscalité, c’est-à-dire des impôts et taxes directs et indirects payés par les contribuables. En Tunisie, cette ressource de financement représente 62% du total des recettes de l’Etat en 2013, soit près de 16,6 milliards de dinars. Le reste étant financé par des recettes provenant des domaines de l’Etat (10%), des emprunts (21%), des privatisations (3,5%) et des fonds spéciaux (3,5%).
- Les dépenses de l’Etat sont aussi appelées charges budgétaires ou dépenses publiques. On distingue généralement les dépenses publiques ordinaires (rémunérations des fonctionnaires, aides à l’emploi,…) qui sont de l’ordre de 66% du total des dépenses (une hausse de 10 points par rapport à 2011), soit près de 16,9 milliards de dinars (une hausse de 14,8% par rapport à 2012) et les dépenses publiques en investissement, qui sont à peine de 1 milliards en 2013 contre 4 milliards de dinars en 2011. On peut rajouter les dépenses suivantes : remboursement du principal et intérêt de la dette (4,2 milliards),…
Pour tout budget, l’égalité des recettes et des dépenses correspond à un équilibre. Dans le cas ou les recettes sont supérieures aux dépenses, on parlera de solde budgétaire positif (excédentaire), dans le cas contraire on parlera de solde négatif c’est-à-dire déficitaire. Dans ce cas de figure, l’Etat serait amener à contracter des emprunts (obligations d’Etat, bons de trésor) pour financer le déficit public et/ou d’augmenter le taux des prélèvements obligatoires (cotisations sociales, impôts et certaines taxes). Avec la première solution, l’emprunt alimente la dette publique, qu’il faut ensuite rembourser et pour laquelle il faut supporter des frais financiers qui pèsent en retour sur le budget et les générations futures ; avec la seconde, l’activité économique peut être ralentie -Nous y reviendrons-.
1.2/ Les inégalités: Un phénomène multidimensionnel et cumulatif
Les inégalités de revenu disponible (revenu du travail + revenu du patrimoine + revenu de transferts [aides de l’Etat] – impôts et cotisations sociales) engendrent des inégalités de patrimoine. Et inversement. De même, les inégalités de conditions de travail engendrent des inégalités face à la maladie et à la mort ; et, les inégalités face au logement contribuent aux inégalités face à la santé et à l’école. Pire encore, les inégalités de situation socioéconomique et socioprofessionnelle des parents provoquent chez leurs enfants des dispositions et des capacités diverses face à la formation scolaire. Celles-ci se traduiront par des résultats scolaires inégaux, débouchant ainsi sur des qualifications professionnelles inégales et des insertions inégales dans la division du travail.
En fait, les inégalités forment un processus cumulatif: les privilèges s’accumulent et les handicaps se multiplient. Et, elles tendent à se reproduire dans le cours des générations. Le creusement des inégalités affaiblit le lien social et peut déboucher sur un niveau d’instabilité des institutions publiques qui rend le futur très incertain. Les agents économiques, qui doivent planifier leurs actions sur le long terme, éprouvent une aversion pour l’incertitude, par conséquent, ils restreignent leur investissement. La lutte contre les inégalités est donc nécessité absolue à la fois sur le plan humain, pour assurer la cohésion sociale et libérer l’homme du besoin, mais aussi économique, pour soutenir la croissance et le maintien de la stabilité des institutions!
2/ Que dit la théorie économique et l’histoire des nations?
2.1/ La politique keynésienne préconise un déficit budgétaire accompagné d’une redistribution des revenus
D’après l’analyse keynésienne, financer aujourd’hui les dépenses publiques destinées à faire face au sous-emploi ou au besoin d’infrastructures par l’endettement est susceptible de créer, demain, une situation meilleure ; de surcroît, l’amélioration de l’emploi et infrastructures nouvelles permettrait d’accroître mécaniquement des recettes publiques et donc de financer a posteriori les dépenses initiales. En clair, l’Etat peut recourir à un déficit budgétaire. Il accroît ses dépenses sans augmenter ses recettes. Il pallie partiellement l’insuffisance des investissements privés en investissant lui-même. Le déficit est ponctuel, il doit être couvert ex post par le surcroît de recettes que la croissance, qu’il aura contribué à relancer, doit assurer.
Selon le multiplicateur keynésien, l’accroissement autonome des dépenses budgétaires, sans que les recettes ne s’accroissent, induit une augmentation plus que proportionnelle de la production nationale. L’accroissement des dépenses budgétaires accroît également la demande, qui accroît la production. Cela induit une distribution de revenus supplémentaires qui, utilisés à raison de la propension marginale à consommer (la part supplémentaire, en pourcentage du revenu, consacrée aux dépenses de consommation), donnent lieu à une production supplémentaire, etc.
En outre, la redistribution favorise la croissance de la demande, en augmentant les bas revenus qui ont la plus forte propension à consommer et en réduisant les hauts revenus dont la propension à épargner (la part supplémentaire, en pourcentage du revenu, consacrée à l’épargne) et la plus élevée.
2.2/ La politique libérale préconise la rigueur budgétaire
Les libéraux considèrent que l’emprunt public comme étant injuste car l’emprunt d’aujourd’hui sera remboursé demain : la charge des déficits publics actuels est reportée donc sur les générations futures.
De plus, d’après ce courant de pensée, en économie ouverte l’effet multiplicateur annoncé par Keynes est réduit, en raison d’une plus grande contrainte extérieure. Ainsi, un solde budgétaire déficitaire risque de détériorer la balance commerciale:
- Si l’offre ne s’adopte pas à l’accroissement de la demande, à cause d’anticipations des producteurs à la récession, ou d’au taux d’utilisation des capacités de production proche de la saturation, cela relance l’inflation, non la croissance.
- Un effet d’éviction se produit pour financer le déficit, car l’Etat draine de l’épargne qui est évincée du financement de l’économie privée.
- Le recours au crédit, pour financer le déficit, entraîne un surcroît d’inflation par le mécanisme de la création monétaire.
- La hausse de la dette publique induit une hausse de la demande de capitaux, ce qui favorise la hausse des taux d’intérêt. La dette subit alors un effet « boule de neige » et la rentabilité économique des entreprises baisse.
Ils préconisent donc la suppression ou du moins la réduction du déficit budgétaire. Au même temps, ils pensent qu’au delà d’un certain seuil, le taux d’imposition a un effet dissuasif : il y a un risque réel d’évasion et de fraude fiscale ; il peut également provoquer une désincitation au travail. Ainsi, passé ce seuil, les recettes fiscales diminuent, comme le montre la courbe de Laffer, ci-après. Il faut donc réduire la pression fiscale afin de relancer le travail et la production.
2.3/ La dette publique et le risque de perte de souveraineté
La dette des Etats peut constituer une menace pour la souveraineté. Si les emprunts contractés ne justifient pas un investissement rentable à moyen et long terme le risque d’une situation de surendettement est réel. De facto, les Etats se trouvent exposés à l’opinion des agences de notation et les emprunteurs exigeraient des primes de risque plus élevées. N’est-ce pas, hélas, notre situation?
Le risque de perte de souveraineté pour un Etat pourrait survenir lorsqu’il ne peut plus faire appel aux canaux classiques de financement. Il se trouve donc dans l’obligation de solliciter un soutien extérieur. Le FMI, à titre d’exemple, dont nous connaissons les conditions catastrophiques ou un pays tiers en échange de contreparties politiques. D’ailleurs, dans le cas de la Grèce, certains parlementaires allemands indélicats avaient même suggéré, récemment, qu’elle cède quelques-unes de ses îles pour alléger sa dette ! -vu l’engouement de certains de nos partenaires occidentaux pour l’île de Jerba…!-.
Autre exemple assez illustrant : celui de l’Egypte de 1875 dont la dette publique avait été multipliée par 33 fois en 10 ans et était devenue absolument « hors de contrôle ». Il fallait, en effet emprunter aux banques européennes pour financer des travaux d’infrastructures réalisés par des entreprises européennes. Mais aussi le train de vie excessivement couteux, dispendieux, d’Ismaël pacha, le vice-roi d’Egypte. «Les Anglais et les français, Riaz Akhoune et Vincent Lepage écrivirent, placèrent le pays sous tutelle en exerçant un contrôle dual : pendant plusieurs années, le ministre des finances de l’Egypte ne fut autre qu’un banquier anglais et le ministre des travaux publics, un banquier français, avant que le pays ne soit finalement directement placé sous protectorat en 1882 ». (in la revue Diplomatie, N°54, janvier-février 2012, P.13.). N’avons-nous pas subi le même procédé qui a abouti en 1881 à la même conclusion ?
En conclusion de ce volet théorique et historique, nous pouvons affirmer que dans un contexte de crise, la marge de manœuvre budgétaire est limitée, par conséquent la lutte contre les inégalités s’avère difficile pour ne pas dire importune! Les recettes budgétaires sont rigides à la hausse alors que les dépenses budgétaires sont rigides à baisse. De plus, une dette publique excessive et insoutenable risque de faire perdre à une nation sa propre souveraineté!
3/ Comment faire, alors, de l’égalité une réalité et comment la financer?
Faire du recul des inégalités un objectif guidant la répartition des richesses, suppose qu’une société qui place l’idéal égalitaire au cœur de son système de valeurs. C’est le cas généralement des sociétés démocratiques. En réalité, les choix politiques ne traduisent pas toujours les principes affichés. Et même quand il y a une véritable volonté et politique de lutte contre les inégalités, les résultats ne sont pas toujours à la hauteur des efforts consentis. Nous observons dans les pays occidentaux, malgré les multiples actions et prestations sociales en faveurs des plus démunies, la pauvreté dans ces pays ne cesse de progresser et la montée de l’exclusion d’une certaines frange de la population est devenue une menace réelle sur la cohésion sociale et la stabilité des institutions. Comment faire, alors, de l’égalité une réalité et comment la financer?
3.1/ Les instruments de la lutte contre les inégalités
Pour garantir la cohésion sociale, il faut limiter contre les inégalités sociales. Les pouvoirs publics disposent d’une palette d’instruments, à la fois correcteurs des inégalités et transformateurs de la société.
3.1.1/ La correction des inégalités monétaires
La correction des inégalités monétaires est souvent considérée comme un axe primordial de la politique de lutte contre les inégalités, car elles sont souvent le point d’ancrage des autres inégalités. L’Etat peut:
- agir sur la formation des revenus en revalorisant les salaires minimums;
- corriger les inégalités via l’impôt sur le revenu. En effet, l’impôt progressif permet, en plus du resserrement des revenus, de diminuer la concentration des patrimoines et des revenus qui en auraient été issue ;
- redistribuer des prestations sociales pour limiter la pauvreté. Ainsi, les facteurs traditionnels de la pauvreté, tels le handicap physique, le nombre élevé d’enfants ou vieillesse peuvent être enrayés.
3.1.2/ La correction des inégalités sociales
L’action des services publics contribue à la réduction des inégalités, en faisant en sorte que chacun puissent accéder, sans distinction de niveau de revenus, à une offre de biens et de services essentiels.
L’Etat tunisien assure déjà l’accès de tous –ou presque- à des services comme les routes, la sécurité ou encore l’éducation et la santé. Il devrait :
- valoriser davantage l’éducation et la formation professionnelle;
- renforcer sa présence et ses garanties sur le plan de la santé;
- Multiplier les programmes des logements sociaux pour améliorer les conditions de vie des plus démunis.
3.1.3/ La décentralisation un autre moyen pour lutter contre les inégalités
La création des entités régionales permet non seulement de luter contre les dysfonctionnements bureaucratiques et la lourdeur administrative mais surtout elle permet le développement des complémentarités et l’émergence des synergies inter et intra-Région. Ainsi, la régionalisation permet une meilleure efficacité (efficience) des différentes institutions et organisations publiques dans l’exercice de leur fonction (leur pouvoir), ce que les spécialistes appellent «le principe de subsidiarité»: Ce qui est national à l’Etat, ce qui régional à la Région, ce qui est communale à la Commune, en l’occurrence à la Municipalité (voir aussi notre article: «la décentralisation: une nécessité démocratique» in la revue Leaders, N°10 de mars 2012) .
3.2/ Les moyens de financement de la lutte contre les inégalités
3.2.1/ La dette
a) La Tunisie devrait se prévaloir du principe de la dette odieuse!
D’après le graphique ci-dessus élaboré en 2011 par le Comité pour l’annulation de la dette du Tiers Monde, sur les 19 milliards de dollars de dette extérieure publique contractée par la Tunisie entre 1987 et fin 2009, près de 10 milliards sont considérées comme étant «une dette odieuse» par conséquent la Tunisie est en mesure de demander leur annulation!
En effet, d’après la théorie du centre international canadien sur la loi du développement durable les trois conditions pour pouvoir désigner la dette tunisienne comme étant une dette «illégitime», «odieuse» donc, sont réunies: absence de consentement, absence de bénéficie, créanciers avertis.
En réalité, la situation est éminemment plus complexe et surtout elle dépend de la nature des rapports de forces actuelles, d’où certaines interrogations s’imposent sur l’identité des créanciers, la nature des dettes, les conditions, les circonstances, identification des projets qui ont pu bénéficier de ces emprunts,…bref, il faudrait un véritable audit mais aussi une forte détermination politique pour demander et exiger l’annulation partielle de notre dette, c’est-à-dire l’annulation totale des 10 milliards qui sont dus à la dictature.
b) Les conditions d’utilisation de la dette publique
La Tunisie dispose encore d’une légère marge de manœuvre, la dette publique représente aujourd’hui 46% de son PIB : Elle peut encore emprunter particulièrement auprès de nos partenaires du Golf, voire même organiser un emprunt obligataire national où la bourgeoisie tunisienne et certains Tunisiens résidents à l’étranger pourraient apporter, grâce à un sursaut patriotique, leur concours à cet effort national. Ces nouveaux emprunts ne doivent surtout pas servir pour payer les frais de fonctionnement de l’Etat (salaires des fonctionnaires et dépenses courantes) mais ils doivent impérativement, nécessairement, être investis dans un grand programme d’infrastructure (routes, hôpitaux, universités,…) et des projets rentables à moyen et long terme. Il faudrait donc une politique budgétaire expansionniste, active, contra-cyclique, en somme une politique de relance par l’investissement. Pour que cette politique atteigne son objectif, son optimum, et que le principe du multiplicateur keynésien joue pleinement, il faudra, obligatoirement, confier les travaux à des entreprises tunisiennes tout en leur fixant l’obligation d’utiliser, dans la mesure du possible, que des produits et des matériaux locaux. Autrement, nous courons deux risques majeurs:
1/ l’argent injecté dans le circuit économique, au prix d’un endettement, risquerait de relancer, en cas d’importation excessive, l’économie de nos partenaires, surtout chinois –dont la qualité des produits laisse, d’ailleurs, à désirer- et européens. L’exemple de la France en 1981 en est un bel exemple : Pierre Mauroy, Premier ministre socialiste de François Mitterrand, avait mis en place une politique de relance par la consommation. Ce choix s’est avéré contreproductif : une hausse excessive de l’inflation -près de 10% en 1983 et un taux d’intérêt qui a atteint les 14%- et, surtout, un déficit chronique du commerce extérieur. En effet, la hausse de la consommation ayant entraîné une forte augmentation des importations.
2/ Un endettement excessif pourrait avoir pour conséquence la perte de notre souveraineté à l’instar de l’Egypte en 1882 ainsi d’autres nations: Terre-Neuve (une grande île au large de la côte atlantique de l'Amérique du Nord) qui a renoncé à sa souveraineté au profit de l’Angleterre en 1934 sous le poids d’une dette devenue insoutenable. Autre exemple assez frappant : le bombardement par l’Allemagne, la Grande-Bretagne et de l’Italie en 1902 des ports du Venezuela considérée comme mauvais payeur ((in la revue Diplomatie, op. citée).
3.2.2/ recettes fiscales supplémentaires :
Pour éviter la pression fiscale afin de relancer le travail et la production, conformément au courant libéral ; il convient de repenser notre système fiscalité et surtout d’inventer de nouvelles recettes fiscales. En ce sens, je propose 4 pistes nouvelles de prélèvements fiscaux ; ces nouvelles recettes pourraient se traduire par une amélioration significative du solde budgétaire sans dégrader pour autant le pouvoir d’achat de nos concitoyens ou la compétitivité de nos entreprises:
- La création d’un impôt de solidarité sur la fortune : la France a mis en place ce dispositif en 1988. Il s’agit d’un impôt annuel calculé sur l’ensemble du patrimoine des ménages (lorsque le patrimoine dépasse un certain seuil). L’assiette de l’impôt intègre la résidence principale, l’ensemble des actifs mais il exclut l’outil de travail (l’entreprise d’un entrepreneur).
- L’instauration d’un timbre fiscale de 10 dinars par visiteur pour les touristes occidentaux.
- Soumettre les bénéfices réalisés par les entreprises non-résidentes à l’impôt sur les sociétés au même titre que les entreprises résidentes.
- Augmenter les impôts locaux tout en les indexant sur le niveau des revenus de telle manière que les familles les plus modestes auraient à payer une contribution symbolique et les familles les plus aisées contribueraient à la hauteur de la qualité de leur résidence et de leur revenus.
Bilan
Nous avons montré à travers cette contribution que les politiques publiques de lutte contre les inégalités sont soumises à des contraintes de différentes natures: Tout d’abord, les difficultés économiques limitent les ressources fiscales et conduisent à réduire les dépenses publiques. Avant même la révolution, les comptes publics étaient déficitaires. Pour combler ce déficit budgétaire, le régime déchu s’est trouvé toujours dans l’obligation d’emprunter de plus en plus alimentant ainsi la dette publique: fin décembre 2010, cette dette était de 30 milliards de dinars contre 5 milliards début 1988 (en dinars courant); aujourd’hui nous sommes endettés à près de 38 milliards de dinars. D’où la nécessité pour la Tunisie d’une part, de se prévaloir du principe de la dette odieuse pour pouvoir alléger sa dette extérieur de près de 10 milliards de dollars qui sont dus à la dictature et, d’autre part d’inventer des recettes fiscales supplémentaires tout en préservant le pouvoir d’achat des Tunisien et la compétitivité de nos entreprises.
Nous avons montré également que la lutte contre les inégalités est une nécessité démocratique. L’Etat peut revaloriser les revenus et développer des prestations sociales grâce à une politique de redistribution pour réduire les inégalités de types monétaires qui sont considérées comme étant le point d’ancrage des autres inégalités. Mais aussi, une façon décisive de réduire les inégalités consiste à offrir des services publics: Que ce soit en matière de santé, d’éducation ou de logement, ces services fournissent des prestations gratuites qui redistribuent la richesse nationale et agissent directement sur la formation des inégalités (inégalité des chances ou inégalité sociales de santé).
Enfin, nous insistons sur la nécessité, dans le cadre d’un plan de relance de confier les travaux à des entreprises tunisiennes tout en leur fixant l’obligation d’utiliser, dans la mesure du possible, que des produits et des matériaux locaux. En effet, c’est seulement ainsi pour que le principe du multiplicateur keynésien puisse jouer pleinement. Autrement, comme nous l’avons souligné plus haut, l’argent injecté dans le circuit économique, au prix d’un endettement, risquerait de relancer, en cas d’importation excessive, l’économie de nos partenaires, surtout chinois et européens.
Pr. Ezzeddine Ben Hamida
http://ezzeddinebenhamida.jimdo.com
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