La Tunisie sur un nuage
Lorsque, dimanche soir l’Assemblée Nationale Constituante a entamé sa séance dédiée à l’approbation de la Constitution, adoptée auparavant article par article, personne ne pouvait imaginer que 93% de la totalité des députés présents pour une fois, seul des 217 élus manquait à l’appel Feu Mohamed Allouche décédé d’une crise cardiaque quelques jours auparavant, allaient adopter la nouvelle Loi Fondamentale. Alors que s’égrenaient le préambule et les 149 articles lus par le Rapporteur général de la Constitution et deux de ses adjoints, les espoirs devenaient de plus en plus vraisemblables avec les acclamations nourries de la salle.
Lorsqu’ à la fin de la lecture une «standing ovation» accueillait le texte dans sa totalité, que le drapeau national était brandi sur tous les bancs par tous les groupes et que des youyous de joie fusaient, le vraisemblable devenait probable. Le vote à une majorité introuvable (200 pour, 4 abstentions et 12 contre) rendait le rêve réalité. L’hymne national «Houmet el Hima» est alors entonné repris par l’assistance en chœur. Ce fut ensuite le délire. L’émotion le disputait à la joie, le bonheur à la satisfaction. Tout le monde embrassait tout le monde sans distinction ni de parti politique, ni de sensibilité idéologique. Tous se sentaient d’abord Tunisiens, foncièrement patriotes et fiers de l’être. Même l’impossible devenait possible comme cette accolade entre le nahdhaoui Habib Ellouze et le jebhaoui Mongi Rahoui hier rudes adversaires, ce soir des Tunisiens réunis autour de la Patrie. Tous les Tunisiens se retrouvaient dans le texte de la nouvelle Fondamentale. Quelques furent les oppositions, les tiraillements, les réserves formulées par les uns et les autres, tous s’appropriaient ce texte qui est devenu le leur.
Quand, le lendemain, le Palais du Bardo accueillait la cérémonie solennelle de signature de la Constitution, l’émotion n’était pas retombée. Après que les trois présidents, celui de la République Mohamed Moncef Marzouki, celui de l’ANC Mustapha Ben Jaafar et celui du gouvernement Ali Larayedh eurent apposé leurs signatures au bas du document qui sera publié aussitôt dans un numéro spécial du JORT et qu’ils eurent prononcé leurs discours, ce fut au tour des hôtes de la Tunisie de féliciter notre pays et son peuple pour cet acquis historique qui «marque le succès de l’expérience démocratique en Tunisie», pour M.Abdelkader Ben Salah, Président du Conseil de la Nation algérien, et «constitue un couronnement du processus démocratique sur la voie de la concrétisation des droits de l’Homme, des libertés et de toutes les valeurs de justice» selon M. Jean-Pierre Bel, Président du Sénat français. Pour M. Karim Ghalleb, Président de la Chambre des Représentants du Maroc la Constitution adoptée «réalise les objectifs de la révolution tunisienne et le rêve de votre peuple à la démocratie, à la liberté et à la vie digne». Le Président du Parlement arabe, M. Ahmed Jarouan y voit « la réussite de toutes les parties à dépasser leurs différends et leurs tiraillements pour ne se soucier que de l’intérêt supérieur de la Patrie». Plus lyrique, le représentant du Parlement du Portugal, Alberto Costa se félicite de la « victoire de la liberté, des droits fondamentaux, du dialogue et du consensus».
Les déclarations dithyrambiques ne sont pas arrêtées là. De partout parviennent des échos flatteurs de cet acquis historique au berceau des «printemps arabes».
Au Palais de Carthage, enfin cérémonie joyeuse où des textes de la Constitution ont été offerts aux vieux militants survivants de la première Assemblée constituante de 1956-59 et aux jeunes lauréats des écoles de la République pour montrer la continuité entre les générations. Un beau feu d'artifice sous une pluie battante comme pour marquer la joie de la nature en ce jour mémorable a couronné ces journées historiques.
Avec l’installation dans les prochains jours du gouvernement de Mehdi Jomaa qui devra obtenir demain mardi la confiance de l’ANC à une large majorité, non seulement une lueur est apparue au bout du tunnel, longtemps bouché, mais une lumière crue baigne notre pays où tous les espoirs sont désormais permis. Oubliées les déceptions, la désespérance, la longue attente. L’Histoire est en train de s’écrire en Tunisie.
Raouf Ben Rejeb
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C´est très bien fait.Nous qui sommes à l`étranger nous ne pouvons qu´ être fiers de ce travail et esperons que cette energie continuera longtemps dans l´interêt du pays.
Une pensée pour René Trabelsi qui n 'a pas eu le portefeuille du tourisme;on accepte un Feldman américain d 'origine allemande à l ANC et pas un fils de Tunisie dans le gouvernement Une démocratie intègne pleinement ses minorités
Le plus difficile va commencer.La terre longtemps en jachère doit être labourée, cultivée, arrosée et entretenue en vu de récolter ses fruits divins après maturité. En effet la terre est notre patrimoine humain, son labour est l'incitation au travail,sa cultures est la formation continue et le recyclage permanent des Tunisiens et ses fruits ne peuvent être que la richesse matérielle produite par nos sueurs comme récompense divine. Pour un agréable pays comme le notre nous n'avons pas d'autres choix que vénérer le travail productif dans des ambiances sociales,sanitaires, urbaines, architecturales, matérielles et immatérielles plaisantes.Nous y arriverons inchallah sans être politisés ni obsédés par de quelconques éphémères chaises. Notre destin est entre nos mains guidées par notre sagesse, clairvoyance et optimisme. Tout simplement pas de panique.
pouvu qu'après les élections;la chute ne soit pas vertigineuse