Prisons surpeuplées et législation inadaptée sur les drogues douces
Dans le récent rapport de l’ONU sur les prisons en Tunisie, présenté jeudi 3 avril au bureau de Tunis du Haut Commissariat des Nations Unies aux Droits de l’Homme, le constat est accablant : les prisons sont surpeuplées, les conditions de vie très pénibles et une législation répressive inadaptée sur les stupéfiants aggrave la situation.
On y assure qu'outre le surpeuplement et le délabrement très avancé des infrastructures en mauvais état, la détérioration de la santé des détenus est pour grande partie due à une hygiène insuffisante avec des pratiques restrictives,comme en termes de temps insuffisant affecté à la douche. Aussi constate-t-on la multiplication de maladies comme la gale, notamment en période de chaleur et durant l’été.
L’âge de la population carcérale oscille entre 18 et 49 ans avec 60 % de récidivistes. Du fait du surpeuplement, on voit cohabiter dans les mêmes cellules les auteurs de délits mineurs et les meurtriers et les plus dangereux criminels. Parmi les auteurs de délits mineurs figurent surtout des étudiants et des jeunes arrêtés pour consommation de cannabis.
Le constat est d’ailleurs accablant: 53% des emprisonnements le sont pour infraction à la législation sur les stupéfiants, particulièrement pour la consommation du cannabis. En effet, les drogues dures,telles la cocaïne et l’héroïne, sont quasiment absentes du territoire tunisien.
Or, outre les peines alternatives à la prison, comme des condamnations aux travaux d’intérêt général, de plus en plus de voix autorisées s'élèvent pour proposer de modifier la législation sur les stupéfiants comme solution radicale pour désencombrer les prisons.
Il s'agit plus particulièrement de la loi n°92-52 du 18 mai 1992 réprimant la consommation de cannabis,dénoncée comme étant l'une des plus répressives dans le monde. Certains spécialistes la considèrent même trop rigide au point d’être injuste et injustifiable en matière de drogues douces. Ils vont jusqu'à assurer qu'il serait judicieux de dépénaliser le cannabis eu égard aux dégâts que cette législation occasionne, faisant des criminels de nombreux jeunes qui, pour un simple joint, se retrouvent systématiquement emprisonnés pour un an ferme pour le moins, et finissant par basculer dans la délinquance à la faveur de leur passage dans des prisons devenues ainsi des fabriques de la délinquance.
Les chiffres les plus fiables estiment à plus de 30% de la population carcérale les consommateurs de substances illicites. Et ils montrentque le nombre de condamnés pour consommation de cannabis augmente d'une année sur l’autre. Ainsi, à la afin de septembre 2013, sur 25 000 détenus, 8 000 l’étaient pour infraction aux stupéfiants, et la plupart l’étaient pour consommation de cannabis. Ce qui fait dire à nombre d'observateurs que c'est là une preuve supplémentaire sur la nécessité de réformer la législation actuelle.
Farhat Othman
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