Que faut-il attendre de la visite de Mehdi Jomaa en France ?
Après Alger, Rabat, les pays du Golfe et les Etats-Unis, le chef du gouvernement, Mehdi Jomaa sera dès dimanche soir à Paris pour une visite officielle de deux jours, lundi et mardi. Auréolé du soutien exprimé à son gouvernement par ses différents interlocuteurs, notamment tout récemment Barack Obama et les dirigeants du FMI et de la Banque mondiale, il devra cependant obtenir de Paris un appui encore plus substantiel. « Consolider les rapports avec la France, notre premier partenaire économique, souligne-t-il et essayer de les pousser un peu plus loin ». Sixmembres du gouvernement s’y emploieront à ses côtés à cette occasion, chacun avec un programme spécifique : Mongi Hamdi, ministre des Affaires étrangères, Nidhal Ouerfelli, ministre chargé de la Coordination et des Dossiers Economiques, Amel Karboul, ministre du Tourisme, Tawfik Jelassi, ministre de l'enseignement supérieur, de la Recherche scientifique et des TICs, Ridha Sfar, ministre Dlégué à la Sûreté nationale et Noureddine Zekri, secrétaire d’Etat au Développement et à la Coopération Internationale.
L’aide publique de la France, économique et financière, avait déjà été annoncée par le président François Hollande lors de sa visite le 4 juillet dernier à Tunis. Les accords signés à cette occasion portent sur 500 M€ avec une reconversion de la dette de 60 M€ en investissements. Mais, comment aller au-delà de ces montants et surtout explorer d’autres opportunités ?
« Tunis a fixé des objectifs très précis pour cette visite, explique à Leaders une source bien informée. Renforcer la coopération bilatérale dans tous les domaines, sécurité comprise, bénéficier du soutien de la France au sein de l’Union européenne et auprès des institutions financières internationales, relancer les flux touristiques français vers la Tunisie et donner un signal fort aux investisseurs et aux partenariats tuniso-français ».
Le programme bien chargé établi pour Mehdi Jomaa à Paris semble répondre à ces objectifs. C’est ainsi qu’il s’entretiendra dès le lundi matin à Matignon, avant de rencontrer le Président Hollande, mardi après-midi à l’Elysée, avec son homologue Manuel Valls, puis au Quai d’Orsay avec Laurent Fabius qui a pris l’initiative d’organiser à cette occasion une table ronde-déjeuner sur le tourisme tunisien et rencontrera en fin de journée le président de l’Assemblée nationale, Claude Bartolone (natif de Tunis). Mehdi Jomaa sera reçu lundi après midi à l’université Paris-Dauphine où il donnera une conférence traitant des « défis et enjeux de la transition démocratique en Tunisie ». Il s'entretiendra également avec Arnaud Montebourg, Ministre de l'Economie, du Redressement Productif et du Numérique.
Au MEDEF, une priorité à l’investissement
La deuxième journée de sa visite sera aussi intensive. Mehdi Jomaa démarrera tôt le matin au siège du Medef où il rencontrera des chefs d’entreprise français et tunisiens. Zohra Driss (UTICA) qui a bien concocté cette séquence avec son homologue Eric Hayet a su attirer avec elle à Paris plus de 50 dirigeants des plus grands groupes et entreprises concernés et l’on s’attend du côté français à une participation aussi équivalente.
Mehdi Jomaa y sera en fait face à d’anciens confrères. Jusqu’à sa nomination en mars 2013 à la tête du ministère de l’Industrie, il était chef d’entreprise française appartenant à Hutchinson A. Aerospace, filiale du groupe Total, qui a implanté en 2008, une unité industrielle à Sousse, pour la fabrication des systèmes de structures métalliques destinées à l’aéronautique et l’automobile. Aujourd’hui chef du gouvernement, il connaît bien les problèmes rencontrées, les attentes des investisseurs et les engagements que doivent tenir les autorités publiques. Le débat, sous les auspices des présidents de l’Utica (Ouided Bouchamaoui) et du MEDEF (Pierra Gattaz) s’annonce alors intéressant.
Que sortira-t-il de l’Elysée ?
Mais, c’est l’entretien Jomaa-Hollande qui retiendra le plus l’attention. Ce jour-là, François Hollande a un agenda bien garni : inauguration de l’exposition « Naissance d’un musée », au Louvre, entretien avec le président angolais José Eduardo Dos Santos, remise du rapport d’activité du Conseil d’Etat et à 16 heures, entretien avec le chef du gouvernement tunisien. La durée n'a pas été précisée, l'engagement suivant, inscrit à l’agenda du président français est fixé 18 heures (cérémonie de remise collective de décorations).
« Au menu des discussions, les dossiers économiques et financiers certes, mais aussi et surtout les questions de sécurité, souligne à Leaders une source informée. Laurent Fabius n’a pas manqué lors de sa visite vendredi à Tunis de réitérer le soutien de la France à la Tunisie en matière de sécurité intérieure et extérieure. Au sujet des otages tunisiens détenus en Libye il avait souligné que si l’aide de la France est sollicitée, elle sera fournie ». De son côté, Mehdi Jomaa avait affirmé le jour-même à l’AFP que cette "nouvelle Tunisie, une Tunisie apaisée (...), une démocratie naissante a a besoin de tout appui de solidarité de la part de nos partenaires". S’il a affiché la détermination de son gouvernement « à combattre le terrorisme, à l'éradiquer en Tunisie », indiquant que la menace n'est plus celle qu'elle était il y a quelques mois et ce qui se passe à Chaambi est plutôt rassurant car on ne les attend plus, on va les chercher maintenant", il n’a pas pour autant occulté l’ampleur des menaces terroristes qui pèsent sur la Tunisie. La dégradation de la situation sécuritaire en Libye ne fait que les attiser. Un dossier de haute priorité.
Mais aussi…
D’autres séquences figurent au programme de la visite : entretiens avec Abdou Diouf, le président de l’Organisation internationale de la Francophonie qui s’apprête à passer bientôt le relais, et Jack Lang, président de l’Institut du monde arabe, rencontre avec un panel d'économistes de tout premier plan spécialistes de la région et des défis auxquels nous sommes confrontés, et les Ambassadeurs accrédités à Paris, au siège Académie Diplomatique Internationale.
En 48 heures au pas de course, Mehdi Jomaa cherchera à promouvoir en version française cette fois-ci, cette nouvelle « Democraty Startup », et rallier en sa faveur investisseurs, touristes et décideurs politiques. A son avantage, une progression significative sur la voie de la transition, avec une nouvelle constitution adoptée et un gouvernement indépendant mis en place. Mais, ses préoccupations financières et sécuritaires, très fortes, doivent trouver soutien auprès de Paris.
- Ecrire un commentaire
- Commenter
Que pourrait-on attendre d'un État fauché,qui,soit dit en passant,que même pendant ses périodes les plus fastes,les trente glorieuses ne proposerait "aux quémandeurs soumis",que des miettes,l'habituel pactole diplomatique,les "deux francs six sous"! Comme le disait Jacques Chirac à propos d'un autre sujet, cette visite va faire "pschitt",à bon entendeurs...!
s'il s'occupait des prochaines élections, c'est tout c qu'on lui demande