Radhi Meddeb: La sempiternelle question,saura-t-on faire?
Les élections sont derrière nous. Le camp de la modernité et de l’ouverture aura gagné. Les femmes auront joué un rôle essentiel dans cette transition. L’Histoire le retiendra. Le monde entier aura reconnu notre performance et notre capacité à avancer dans le processus démocratique, dans le respect de la légalité et sans violence. Au-delà des clichés éculés et des slogans démodés, saura-t-on faire pour que le véritable gagnant soit la Tunisie tout entière et son peuple et non une moitié de la Tunisie contre la deuxième?
Saura-t-on rassembler les adversaires d’hier et éviter que le pays prenne des allures d’une mosaïque de piètre facture ou que les germes de la division et de la partition ne s’y installent?
Saura-t-on faire front contre le djihadisme, le terrorisme, la contrebande, le commerce parallèle et l’économie informelle et leurs circuits mafieux qui minent l’autorité de l’État, mettent à mal les entreprises et les finances publiques et portent atteinte à la santé physique des populations?
Saura-t-on panser les plaies encore béantes, réconcilier l’intérieur et la côte, le Nord et le Sud, le pays et sa diaspora, les jeunes et les moins jeunes, notre modernité et notre tunisianité?
Saura-t-on donner une réalité aux multiples novations apportées par notre nouvelle constitution, tant en matière de droits fondamentaux, de libertés, de gouvernance, d’institutions, d’organisation administrative du pays, de déconcentration, de décentralisation et de transparence?
Saura-t-on retrouver la modération et l’équilibre qui ont toujours caractérisé notre politique étrangère et donner à notre diplomatie une orientation résolument économique?
Saura-t-on susciter la croissance, créer de la valeur, en assurer une répartition aussi juste que possible, entre revenus du capital et revenus du travail et y intéresser l’ensemble des catégories sociales, des régions et des générations ?
Saura-t-on faire participer chacun à l’effort national de mobilisation et de solidarité qui s’impose à nous en ce moment historique de reconstruction de la Tunisie?
Saura-t-on faire valoir les droits de chacun, mais aussi exiger un plein exercice de ses responsabilités, ne pas privilégier la fuite en avant ou continuer à donner au court terme la priorité par rapport au long terme?
Saura-t-on enfin engager avec courage et sérénité toutes les réformes dont le pays a besoin, tant au niveau économique que social, ou éducatif, sanitaire ou culturel?
Saura-t-on refuser le gaspillage, favoriser l’excellence et l’innovation, l’ouverture sur le reste du monde?
Saura-t-on instaurer une gestion durable de nos ressources naturelles, mais aussi de notre endettement, dans le respect des droits des générations à venir?
Saura-t-on concilier le développement économique et le respect de l’environnement?
Saura-t-on remettre l’entreprise citoyenne, transparente et socialement responsable au centre de nos préoccupations et au cœur du processus de création d’emplois, tout en assurant un environnement des affaires incitatif et promoteur?
Saura-t-on impulser une économie sociale et solidaire de marché qui apporte du réconfort social et participe à l’inclusion économique?
Saura-t-on mobiliser toutes les forces vives de la Nation en faveur de l’investissement, du développement et de la croissance?
Saura-t-on mettre en place un plan volontariste pour désenclaver nos régions intérieures?
Saura-t-on réorienter nos diplômés chômeurs vers des métiers d’avenir à la faveur d’un programme national qui leur donnerait une deuxième chance et un passeport pour l’emploi?
Saura-t-on engager les réformes de notre système éducatif, à l’abri de l’idéologie et de la démagogie à la fois pour l’ouvrir sur la société et l’économie mais aussi pour lui donner les attributs de la compétitivité internationale?
J’arrête là l’énumération des défis qui nous attendent. Ils sont multiples et difficiles mais non insurmontables.
Leur dépassement est à notre portée pour autant que nous soyons en mesure de faire front dans l’unité, que nous mettions l’intérêt général au-dessus de toute considération et que nous nous inscrivions délibérément dans la modernité, la solidarité et la performance.
Radhi Meddeb
- Ecrire un commentaire
- Commenter