Peut-on résoudre le problème de la saleté dans les rues sans politique environnementale locale?

Dans le cadre de mes activités de recherche scientifique, en octobre 2013,  j’ai reçu un professeur universitaire de nationalité française, de renommée mondiale, à l’université de Monastir. Comme le veut la coutume, pendant cette visite, j’ai programmé pour notre invité une demi-journée touristique. En nous promenant au centre ville, il a pris un bonbon, il a enlevé son emballage et il l’a avalé tendrement. Juste après, il a regardé autour de lui, puis il m’a interpellé en souriant : « regardons combien doit-on marcher pour trouver une poubelle ? »  Eh bien ! il se trouve que mon invité a appris qu’il ne faut pas jeter par terre dans la rue l’emballage de son bonbon, dès son plus jeune âge.  Il l’a alors gardé dans sa main, et on était obligé de marcher une bonne distance avant de trouver ce qu’on cherchait, enfin presque; la poubelle était débordante !! L’excuse qui m’est venue à l’esprit était à l’époque: « Notre municipalité est dirigée actuellement par une délégation spéciale non élue. Il s’agit d’une situation temporaire qui  devrait changer dès l’arrivée d’un nouveau conseil municipal issu des urnes ». Depuis, les élections municipales n'ont toujours pas lieu et les conditions environnementales ne se sont pas améliorées, et contrairement à ce qu’on avait prévu, notre invité étranger n’a pas voulu revenir en Tunisie.

La morale de l’histoire : s'il est vrai que depuis le 26 Juin 2015 le terrorisme a fait fuir les touristes de la Tunisie, force est de reconnaître que depuis la révolution du 17 décembre 2010- 14 Janvier 2011, la saleté est devenue l’un des facteurs principaux de la baisse des entrées des touristes, notamment Français, Allemands, Italiens, Britanniques et Polonais, soit la clientèle européenne classique du marché de tourisme Tunisien.

Face à l’impuissance des délégations spéciales municipales à résoudre ce problème, les bonnes initiatives volontaires ne manquent pas. On a récemment vu une association qui organise une journée de nettoyage d’une plage. La semaine dernière une réunion sur le sujet a été organisée par un député et quelques actifs au sein de la société civile. J’ai appris également qu’un citoyen a donné une importante somme d’argent pour aider à acquérir du matériel de propreté urbaine. Je ne peux qu’encourager tous ceux qui ont pris ces initiatives à  poursuivre leurs efforts pour résoudre le problème de non propreté, ne serait-ce que partiellement, ponctuellement  et temporairement. Mais franchement, face à l’ampleur et la gravité du problème de poubelles, débordantes d’ordures, il nous faudra des initiatives, débordantes de créativité. Des initiatives, permettant de trouver des solutions durables et renouvelables. Encore faut-il que la municipalité ait une politique environnementale pour guider le conseil municipal, son administration et ses citoyens à gérer ses activités de façon responsable en conformité avec les principes du développement durable, c’est-à-dire en tenant compte des aspects économiques, sociologiques et environnementaux afin d’arriver à un résultat optimal.

J’invite tous ceux qui songent à se présenter aux prochaines élections municipales à réfléchir à l’élaboration d’une telle politique, précisant les grandes orientations de la municipalité, fixant des objectifs pour atteindre des résultats concrets à moyen et à long terme,  et détaillant les moyens nécessaires pour la mise en œuvre de cette politique.  Un plan d’action devrait également accompagner cette politique, spécifiant,  entre autres, comment faire venir l’argent à la municipalité pour appliquer la stratégie proposée.

En tout cas, j’espère bien que les futurs conseils municipaux seront élus sur la base de leurs programmes et les politiques environnementales qu’ils présentent.

Justement, à propos des élections municipales, c’est pour quand ?!

Mounir Zili
Professeur universitaire
Université de Monastir
24  Août 2015