Habib Touhami: Gouvernement d’union nationale, gouvernement de salut public
Le débat qui secoue une partie de la classe politique sur l’urgence de constituer un gouvernement d’union nationale ou de salut public est légitime sauf qu’il est conduit de façon à mener à une double impasse constitutionnelle et politique. Il y a en effet une utilisation abusive de concepts peu interchangeables en vérité (gouvernement d’union nationale, gouvernement de salut public) et une incapacité endémique de passer de l’analyse à l’action correspondante, du diagnostic au traitement approprié.
Un gouvernement d’union nationale est un gouvernement unissant les principaux partis politiques (voire l'ensemble) représentés dans un parlement. Sa constitution s’impose dès lors qu’un pays se trouve face à une situation exceptionnelle mettant en danger, soit son indépendance nationale, soit l'intégrité de son territoire, soit l’existence ou la continuité de son État. Mais réunir des forces politiques aux antipodes n’a jamais garanti la cohésion et l’efficacité d’un gouvernement. Nous en avons un exemple dans le gouvernement tunisien actuel. L’expérience historique montre au demeurant que les gouvernements d’union nationale constitués en temps de paix ont ajouté plus de problèmes qu’ils n’en ont résolus.
Un gouvernement de salut public est par définition un gouvernement sortant de l’ordinaire ou du convenu. D’abord parce qu’il est peut être formé avec l’accord de la représentation nationale, l’ARP en l’occurrence, comme il peut l’être sans.
Ensuite parce qu’il doit procéder d’un consensus qui surpasse les préoccupations partisanes et les jeux parlementaires (un véritable leader n’est pas un chercheur d'un consensus, mais un mouleur de consensus, Martin Luther King). Enfin parce qu’il doit réunir des femmes et des hommes en nombre restreint, en total accord sur les priorités et les modalités d’action bien avant leur entrée au gouvernement.
Il se trouve que les tenants d’’un gouvernement de salut public ne disent rien sur leur programme politique et socioéconomique ou la nature des relations qu’ils comptent établir avec les institutions en place, l’opinion publique, la presse et les forces socioéconomiques. Ce silence est révélateur de la fragilité du projet et de la mésentente qui règne dans les rangs de ses promoteurs sur ses implications constitutionnelles et politiques. N’empêche, la formation d’un tel gouvernement pourrait constituer en fin de compte la seule alternative valable pour sortir notre pays de l’impasse politique et socioéconomique dans laquelle il se trouve.
Habib Touhami
- Ecrire un commentaire
- Commenter
Tous les chemins qui menent á la democratie sont bons. La Tunisie est la seule qui a commencé le processus democratique et qui essaye de s´y maintenir, Et qu´est-ce qu´il faut sauver d´urgence, il parait que c´est l´Etat democratique autour duquel doit tourner l´eventuel accord.