Les grandes lignes de la politique étrangère de Donald Trump
I. Introduction
C’est une vraie gageure que d’essayer d’anticiper ce que sera ou fera l’Administration Trump et ce que seront les lignes, même les plus générales, des politiques, des décisions et des positions d’une personnalité comme le Président Donald Trump. Comme un joueur de bridge ou de poker, il préfère ne pas révéler son jeu. Ses prises de position doivent être prises comme des annonces d’ouverture négociables plutôt comme des déclarations fermes de doctrine ou de principe. Par exemple, il a déclaré franchement dans sa campagne électorale qu’il préférait garder secret la stratégie qu’il adoptera pour combattre ISIS-Daech. Incidemment, le Général James N. Mattis, confirmé déjà Secrétaire à la Défense, soutient cette règle de Trump.
Carl Paladino, ami de longue date et chairman de sa campagne électorale de New York, prétend être un grand ami de Trump et le bien connaitre. Il affirme que le Trump que nous verrons à la Maison Blanche sera aussi différent du Trump que nous avons vu à la campagne électorale que celui-ci l’était du Trump que nous avons vu pendant les cinq à six dernières années. Trump a effectivement assumé de rôles, des activités, des fonctions, des responsabilités et des personnalités aussi diverses que celles d’un acteur de cinéma ou de théâtre. Il sait donc assumer la personnalité du rôle qu’il occupe au moment où il l’occupe pour mieux communiquer et réaliser ses objectifs. Ses positions déclarées doivent être prises comme des annonces d’ouverture que les circonstances, les analyses subséquentes, le pragmatisme et les négociations peuvent modifier.
Cependant ce qui mitige la gageure, c’est que la politique étrangère des USA, basée sur des valeurs et des intérêts largement indépendants de la personne ou même du parti qui occupe la Maison Blanche, a montré depuis Roosevelt en 1941, un degré étonnant de continuité et de stabilité. La stabilité des grandes lignes de continuité de la politique étrangère américaine a été montrée par exemple ,par Andrew Bacevich, dans son ouvrage, « Washington Rules », publié en 2010 par Metropolitan Books, Henry Holt and Compagny, LLC.
L’objectif de cet exercice n’est donc pas d’essayer de prédire, avec le plus de précision et certitude possible, les positions que la nouvelle administration adoptera en matière de politique étrangère. Elle vise plutôt à provoquer le débat, à faire une lecture ou un déchiffrement de cette politique à travers la personnalité de Trump lui-même, ses positions esquissées dans la campagne électorale, et ses choix des membres principaux de son cabinet. Cette lecture pourrait servir aussi de grille de suivi de la politique étrangère que Trump mettra effectivement en œuvre.
La lecture vise à trouver une réponse aux principales questions de politique étrangères suivantes :
- Trump remettra-t-il en cause le Consensus de Washington ?
- L’OTAN
- La lutte contre l’ISIS
- La détente avec la Russie
- L’endiguement de la Chine
II. Reading Trump’s Hand
A. Lecture à travers Donald Trump : Qu’est-ce-qui fait courir Donald?
Le public général a commencé à entendre fréquemment le nom de Donald Trump après l’inauguration du premier gratte-ciel de super luxe au centre de Manhattan, la Trump Tower, le 30 novembre 1980. C’était devenu le must des visites aussi bien pour les touristes que pour les new yorkais. On a ensuite entendu parler de ses querelles avec la ville et le maire Koch de New York sur des questions immobilières et son ambition de transformer les berges du Hudson. Beaucoup plus tard on a entendu parler de lui dans son business show Miss Univers et dans sa conduite du programme de télé Reality Show. Beaucoup d’observateurs ont souligné que Donald Trump est plus un homme d’affaires et de show-biz qu’un homme d’Etat, d’idéologie ou de doctrine politique, économique ou diplomatique. A ce titre, il est attendu qu’il apportera un style, une méthode et un contenu spécifique durant son passage à la Maison Blanche.
Sur le plan style il est attendu qu’il soit un homme pragmatique et un deal maker, faisant les calculs et les concessions nécessaires pour arriver à un « deal » et n’ayant pas de problème à revenir, s’il le faut, sur des positions antérieurement annoncées. C’est ce qu’il a fait par exemple concernant la menace de poursuite en justice de Hilary Clinton qu’il avait annoncée durant la campagne électorale et qu’il a vite abandonnée le lendemain de sa victoire. Il a aussi démontré son pragmatisme en nommant dans son cabinet des personnes qui s’étaient opposés à sa candidature et des personnes qui ne partagent pas ses positions annoncées sur beaucoup de questions importantes, comme par exemple l’OTAN. Il a nommé par exemple au poste de Deputy Trade Secretary, Todd Ricketts dont la famille a financé an anti-Trump super-PAC (Political Action Committee).
De même mettra-t-il à profit ses réflexes et son sens de l’écoute de l’Amérique profonde, Rouge et Bleue, rurale et urbaine qu’il a acquis sur les chantiers de construction et dans son expérience dans le show-biz et dans la Reality Show. Cette expérience de terrain et de contact direct avec l’opinion publique à la base, au niveau « grass roots », lui a permis de connaitre directement les espoirs, les inquiètudes, les préoccupations, et le « parler » et jargon de cet électorat. Cette connaissancele conduira quelques fois à relativiser les opinions et les conseils des experts et des professionnels de la politique à la Maison Blanche et à Washington, plus portés sur les opinions des politiciens, des élites et de l’establishment à l’intérieur du Beltway de Washington.
Un indicateur du style de ce leadership est le choix de nominés dont les points de vue sur certains dossiers importants ne s’accordent ni entre eux ni avec les siens propres. Il est certains que Trump était au courant de ces divergences comme par exemple avec James N. Mattis, confirmé Secrétaire d’Etat à la Défense, qui clairement ne partage pas les positions annoncées de Trump sur l’OTAN ou sur l’engagement avec la Russie, ou sur l’annulation de l’accord avec l’Iran. Plus indicatif encore est que les nominés au Cabinet se soient sentis libres d’exprimer clairement et franchement ces différences dans les entretiens de confirmation au Congrès et que Trump ne s’en soit ni offusqué, ni senti obligé de les réprimander, ni même de faire une mise au point. On dirait que Trump a mis à dessein dans son Cabinet des mécanismes de « checks and balances », de débat et de prise de décision contradictoires.
Sur le plan méthode, on peut s’ attendre à ce qu’il gère son cabinet comme un « Chairman of the Board » et un « CEO », focalisé sur les dossiers, les projets, les objectifs, les moyens, les coûts, les délais et les résultats d’un « business concept » qu’il aura développé pour son mandat à la Maison Blanche. De même peut-on anticiper qu’il soit plus porté sur le concret, et le court et moyen terme, à l’échelle d’une nation. Il sera-t-il plus porté sur les approches concrètes par opérationnelles par projets et dossiers que sur les programmes, les doctrines et les grands principes. Il apportera à la Maison Blanche les pratiques et la manière dont il a usé dans les affaires et en particulier, son expérience de prise de décision, de négociation et de gestion des mégaprojets dans le secteur de l’immobilier, et des grandes manœuvres, pratiques qui seront toutes familières à la plupart des membres de son cabinet.
Sur le plan contenu, on peut anticiper une focalisation beaucoup plus importante sur le géo- économique, c’est-à-dire l’investissement, la compétitivité industrielle, l’emploi, les projets d’infrastructure, le commerce et les grandes opportunités d’affaires internationales en plus de la focalisation classique sur le sécuritaire et le géopolitique. La Chine n’est-t-elle pas entrain de démontrer que l’on peut être une grande puissance globale sans les complications et le surcoût financier, économique et diplomatique d’une lourde présence militaire globale?
Trump a déjà donné un avant goût de son style et de sa méthode par exemple dans son approche à la solution de l’emploi en négociant directement avec l‘industrie et avec les entreprises concernées, la meilleure production de Air Force One, du F-35, du F-18. De même a-t-il négocié directement avec Ford et Chrysler, l’annulation de leurs projets de transfert de certaines de leurs opérations au Mexique pour leur maintien au Michigan et le maintien de l’emploi dans cet état, en attendant de faire de même avec General Motors. Il a fait de même avec les grandes compagnies pharmaceutiques, « Big Pharma ». Comme il l’a dit lui-même à sa première conférence de presse le Mercredi 11 janvier, il veut mettre au service de l’Amérique l’expérience, le savoir faire industriel qui lui ont permis de développer le groupe Trump.
Cette approche cas par cas, projet par projet, dossier par dossier, voire produit par produit, dans le cadre d’un débat contradictoire, complètera l’approche classique qui consisterait à mettre en place des programmes de création d’emploi, des mesures incitatives fiscales et financières et l’environnement d’affaires (Business Environnement) qui « faciliterait ou produirait une relance de l’emploi, des activités économiques , ou de la compétitivité industrielle». Beaucoup de Chefs d’Etats ou de Gouvernements pourraient s’inspirer de cette approche.
B. Campagne électorale
La gageure est encore plus risquée quand il s’agit d’anticiper la politique étrangère de la nouvelle Administration à partir de la campagne électorale. Tout d’abord, traditionnellement, la politique étrangère occupe peu de place dans les campagnes électorales présidentielles américaines. Les candidats se limitent en général à réitérer le soutien des USA à Israël dans les discours traditionnellement donnés par les candidats devant l’AIPAC, ou à quelques grands dossiers se rapportant directement à des questions de politique intérieure telles que l’emploi, la guerre, etc. Pour Trump, même quand elles sont annoncées, les positions de Trump dans la campagne électorales, semblent devoir être prises comme des annonces d’ouverture négociables, comme dans un jeu de bridge ou de poker, plutôt que comme des positions doctrinaires fermes et finales. D’ailleurs à plusieurs reprises Trump avait annoncé dans sa campagne électorale que la lutte contre le terrorisme international allait une très haute priorité et qu’il avait un plan secret dont il révélerait à temps le contenu.
Comme pour tous les candidats, démocrates et républicains, durant toute sa campagne électorale, à dessein ou par défaut, Trump a donné très peu d’indications conséquentes et claires sur ses orientations politiques, et encore moins en matière de politique étrangère. Il s’était plus tôt limité à dire ce qui lui garantissait de gagner des votes. Une exception cependant, et une exception de taille, pour Donald Trump, fût la promesse qu’il a faite et réitérée, de transférer l’Ambassade des USA de Tel-Aviv à Jérusalem.
C. Les nominations au cabinet Trump
Ex Donald Trump Semper Aliquid Novis!
Décidemment Trump continue à surprendre et à prendre de court tous les experts et les analystes, les morts aussi bien que les vivants.
Les observateurs étaient tous entrain de parier et d’analyser qui entre Rudy Giliuani, ancien maire de New York, Mitt Romney, ancien candidat à la présidence, Bob Corker, Sénateur de la Caroline du Sud au Congrès, ou John Bolton, ancien ambassadeur des USA à l’ONU, allait emporter la nomination au Département d’Etat, quand « Out of the Box », des bureaux d’Exxon saute Rex Tillerson, CEO de Exxon, décoré « Ami de la Russie » par Poutine ! De même pour l’Ambassade, Oh combien stratégique et complexe, des USA en Chine ! Après la polémique provoquée par l’échange téléphonique provocateur avec la Présidente de Taiwan, surprise ! Terry Branstad, un ami personnel du Président Chinois Xi Jinping, totalement « hors boîte » est nommé Ambassadeur à Pékin ! Un gouverneur de l’Iowa, de l’Amérique Profonde Rouge, et non de l’Amérique Côtière sophistiquée Pacifique ou Atlantique, doit déchiffrer la diplomatie du Pays du Sourire !
En fait toutes les nominations de Trump peuvent être décrites comme « Out of the Box » ! Eisenhower a dû sursauter dans sa tombe, ou dan le balcon céleste donnant sur la Maison Blanche et le Capitole à Washington D.C, à l’annonce des membres du Cabinet Trump. Trump a mis au pouvoir à la Maison Blanche le complexe Militaro-industriel-Financier-Energétique. Il a nommé un cabinet où le Pentagone, Detroit, Wall Street, Houston et les fortunes privées sont les plus représentés. Newsweek décrit le Cabinet nommé par Trump comme une équipe de rêve, « Dream Team », de conservateurs. Politico le décrit comme l’un des cabinets les plus conservateurs de l’histoire des USA.
Trump a nommé à son cabinet une équipe de fortes personnalités, brillantes, habituées à commander et à être obéies, des « Can Do », loin d’être des Béni Oui-Oui, ou des Yes-men. Les généraux dans le cabinet ont assumé de hautes responsabilités stratégiques, le CentCom pour Mattis, le Secrétaire nominé à la Défense,le Southern Com pour Kelly, le Secrétaire de l’Intérieur. De même pour les membres du cabinet qui viennent du secteur privés, ils sont pour la plus part des leaders très visibles du secteur privé qui ont tous fait leurs preuves dans leurs secteurs respectifs. Quelques uns des membres du Cabinet sont des milliardaires de l’industrie et de la finance, plus riches que Trump lui-même. La Presse américaine calcule que la somme des fortunes des membres du Cabinet en font l’un des cabinets les plus riches dans l’histoire de la Maison Blanche.
Il faut reconnaître à Trump le mérite/le miracle d’avoir réussi à convaincre toutes ces fortes personnalités militaires et civiles d’accepter de faire partie de son administration, qui plus est n’ont pas hésité de se démarquer des positions du président élu sur des questions majeures, telles que l’environnement, l’OTAN, la Russie, etc .. Il a dû leur donner les assurances et les arguments suffisants pour les convaincre du sérieux de sa vision, de ses intentions, de l’importance de leur contribution à la réalisation de cette vision, et du style de leadership qui rendra leur contribution possible et attractive. Rex Tillerson, ancien CEO de Exxon, au Département d’Etat, Gary D. Cohn, Président de la toute puissante maison financière à Wall Street, au poste de Conseiller en Chef pour les questions économiques, General James Mattis, ancien Chef du Central Command, General John Kelly, ancien Chef de Souhern Command, etc. , n’auraient pas accepté, de faire les grands sacrifices de leurs prestigieuses positions de responsabilité, de leadership et de revenu et faire parti de son cabinet, et prendre le risque de compromettre leurs réputations, sans ces assurances.
Beaucoup d’entre eux viennent du Heartland de l’Amérique comme de l’Oklahoma, de l’Iwoa, du Texas, de la Caroline du Sud, de l’Indiana, de Tennesse, du Kentucky, du Montana, mais aussi de l’Amérique côtière comme la Californie, New York, Connecticut, etc. Ils sont relativement des outsiders par rapport au « Washington Blob », le Beltway, le Capitole et à l’establishment de Washington D.C. Ces membres du Cabinet apporteront une connaissance de l’Amérique qui a élu Trump, l’Amérique Rouge Profonde, de ses préoccupations et de ses priorités. Aussi beaucoup d’autres encore contribueront leur connaissance de l’environnement international et leurs entrées dans des centres névralgiques de décision géopolitiques, géoéconomiques et sectoriels. Beaucoup d’autres eux apporteront également au Cabinet et à la Maison Blanche une connaissance de première main, concrète et opérationnelle de questions sectorielles de l’énergie, des investissements, de la finance, de la compétitivité industrielle, de la Chaîne Globale des Valeurs, etc. Ils apporteront enfin les réflexes militaires et privés de la rigueur, du réalisme et de l’optimisation des moyens, et de la focalisation sur la réalisation des objectifs, « à tous prix », « Regardless ». Il faut aussi noter la diversité des points de vue des membres nominés du Cabinet sur certaines questions stratégiques, diversité qui promet un débat contradictoires sur ces questions. Plusieurs nominés étaient opposés aux départements auxquels ils étaient nommés. Le directeur nominé de l’EPA, Scott Pruitt, a un procès en cours contre l’Agence. Rex Tillerson, le Secrétaire d’Etat nominé vient d’une entreprise, Exxon, qui considère que le défi du Changement Climatique, COP 21 en 2015, est un défi majeur réel auquel il faut trouver une solution. Mieux et plus encore, Exxon a des traditions d’écoute et de dialogue sur les questions de l’environnement et de prise en compte des pétitions de la société civile internationale sur ces questions. Exxon a été la première multinationale privée a fournir des chercheurs à l’IPCC, the Intergouvernemental Panel on Climate Change. Dans l’entretien de confirmation au Congrès, il n’a pas hésité à dire qu’il n’était d’accord avec l’idée du Président élu d’interdire l’entrée des musulmans aux USA. De même a-t-il refusé de qualifier Poutine comme criminel de guerre, malgré l’insistance de certains sénateurs puissants.
L’équipe que Trump a nommée est un microcosme du complexe d’intérêts militaires, industriels, financiers et énergétiques dont plusieurs présidents américains ont dénoncé l’influence. Ils ont prévenu l’opinion publique, les citoyens et les électeurs américains contre l’influence occulte et indue de l’argent et de l’industrie sur la gouvernance générale et sur la politique étrangère des USA, en particulier sur les décisions militaires et les affaires internationales, dont en particulier les décisions concernant la guerre. Thomas Jefferson déclarait en 1816 : « J’espère que nous allons pouvoir écraser dans l’œuf l’aristocratie de nos entreprises dotées en argent qui osent déjà engager un bras de fer avec le gouvernement et défier les lois de notre pays »,
Théodore Roosevelt aussi déclarait en 1912 que : « Nous considérons que l’un des premiers devoirs du Peuple est de libérer le gouvernement du contrôle de l’argent »
Franklin Delano Roosevelt écrivait en 1933 dans une lettre au Colonel E.M House : « La vérité réelle, comme nous le savons vous et moi, est que les éléments financiers dans les grands centres contrôlent le gouvernement depuis les jours de Andrew Jackson »
(Citations traduites par moi-même et prises de la page 1 du livre « The Road to 9/11 » de Peter Dale Scott, publié en 2007 par University of California Press à Berkley et Los Angeles en Californie, USA)
Dans son message d’adieu à la fin de son mandat à la Maison Blanche, à l’image du message d’adieu d’un autre général, George Washington, le Général Dwight Eisenhower, tirant les leçons de son expérience à la guerre et à la Maison Blanche, prévenait les USA contre la collusion entre les militaires et les industriels américains. Cette collusion pourrait, selon lui, fausser les décisions économiques et sécuritaires et pérenniser
Trump a-t-il mis le loup dans la bergerie en invitant à son Cabinet à la Maison Blanche les militaires du Pentagone, l’Industrie de Detroit et de Seattle, la Finance de Wall Street et l’Energie de Houston, Pourquoi autant de généraux et d’hommes d’affaires dans son Cabinet ?
Est-ce pour leur style de décision efficace, rapide, « can do » et « regardless » ? Est-ce pour leur capacité d’analyser et de comprendre les défis nationaux et globaux sécuritaires, industriels, commerciaux, financiers, et énergétiques et de contribuer à la bonne solution et à la bonne gouvernance de ces défis ?
Ou les a-t-il à dessein sorti des coulisses, du back room et mis au front desk à la Maison Blanche, les mains directement sur les leviers du pouvoir en plein jour, pour plaquer les manœuvres de résistance et parer aux objections du fameux complexe militaro-industriel et autres forces occultes aux réformes de priorités et de responsabilités, aux réductions et transferts de budget, qu’il envisage de faire pour « Rendre Sa Grandeur à l’Amérique » à se s éventuelles politiques envers l’OTAN, la Russie, la Chine ?
Ou est-ce tout simplement par ce qu’il est un outsider ?
Quelle que soit la réponse, ces nominations lui ont permis d’inclure beaucoup de régions dans son cabinet et sont susceptibles de consolider et d’élargir sa base électorale.
III. Lecture de la main Trump
La lecture du personnage, de sa campagne électorale et de son cabinet laisse transparaître les grandes lignes de sa politique intérieure et extérieure consistera. Elle consistera à reconstruire et à moderniser l’infrastructure physique, économique et sociale du pays, à régler la question de l’emploi, de l’immigration, à améliorer la qualité de vie pour toute l’Amérique et à rendre toute l’Amérique, en particulier l’Amérique Rouge du Heartland, rurale et urbaine, , prospère et fière. L’élément de fierté est très important. Trump a beaucoup joué sur cet élément dans sa campagne électorale. En politique intérieure, les thèmes récurrents se rapportent à « Rendre la Grandeur à l’Amérique » par la modernisation de l’infrastructure, par la création de l’emploi, la santé, l’éducation, l’émigration et l’amélioration de la qualité, la joie et la fierté de vivre à la Majorité Silencieuse t à l’Amérique Profonde.
La mission de leadership global des USA, la mise à jour de l’efficacité et de l’utilité de l’OTAN, la lutte contre le terrorisme, en partenariat avec la Russie et tous les pays concernés, un nouveau paradigme des relations avec la Russie qui aide à relever le défi de l’Ukraine et de la Crimée mais aussi à participer aux grands projets d’investissement et d’infrastructure , un dialogue stratégique avec la Chine sur les questions commerciales et monétaires mais aussi sur les iles dans la mer de Chine, sur les questions sont des thèmes récurrents de la campagne sur la politique étrangère des USA.
L’impératif et l’urgence de la lutte contre le terrorisme aura été un leitmotiv permanent dans la campagne de Trump et représentera avec le Moyen Orient un défi majeur.
Les défis de la question de l’Ukraine et de la Crimée pour la Russie et des îles en mer de Chine pour la Chine sont des défis majeurs.
Le respect responsable du droit international et des conventions internationales, des engagements pris, des valeurs et des libertés contitueront des défis dans la lutte contre le terrorisme et la résolution des conflits.
A. Politique politicienne
Réussir son premier mandat et être élu pour un second mandat en veillant à
1. cultiver la majorité rurale et urbaine des qui l’a élu,
- en rapatriant le maximum de « boys », appartenant pour l’essentiel à cette majorité sillencieuse, des fronts multiples, dont cinq au Grand Moyen Orient, dans lesquels sont impliqué les USA
- en améliorant la qualité des infrastructures et de la vie dans les zones rurales,
- en augmentant la fierté et la visibilité de cette Amérique profonde dans les media et dans la vie nationale politique et culturelle des USA,
2. Elargir cette majorité envers le vote Bernie Sanders que Trump avait sollicité avant que celui-ci ne décide de s’allier à Hilary Clinton
3. Elargir cette majorité vers les votes ethniques et vers le vote des femmes
4. Elargir cette majorité au-delà de l’establishment du Parti Républicain, à l’establishment des affaires, de l’industrie, des finances et de l’énergie,
5. L’Empreinte Historique (Legacy)
Comme tous ceux qui l’ont précédé à la Maison Blanche et comme les présidents de tous les pays, Donald Trump voudra légitimement laisser à son départ de la Maison Blanche en 2024 son empreinte, son héritage, et inscrire le nom Trump et le prénom Donald dans l’Histoire des USA.
B. Politique intérieure
1. Emploi
2. Infrastructure
3. Santé (remplacer le programme Obamacare)
4. Immigration
C. Politique extérieure
1. Mission de Leadership Global
Rationaliser /démilitariser la mission de leadership global et sécuritaire des USA dans le Monde, et en particulier en Europe et en Asie de l’Est
Sans renoncer à la mission de leadership global que les USA ont assumé depuis 1945, revoir la doctrine interventionniste des guerres préventives préconisée par les néo-cons républicains et continuée par la doctrine de « Hégémonisme Libéral Global » de leurs successeurs démocrates
Rationaliser la présence militaire à l’étranger des USA en démilitarisant la politique étrangère des USA, en allégeant cette présence et en transférant autant du coût et des tâches de cette présence que possible aux partenaires et alliés régionaux des USA en Europe (UK ?), en Asie (Japon), et au Moyen Orient( Israël ?), tout en évitant l’émergence de hégémons locaux (off-shore balancing)
2. L’OTAN
Mettre à jour la mission de l’OTAN
En particulier, négocier une redistribution de la charge de l’OTAN avec l’Europe et les autres pays membres
Reconfigurer la mission de l’OTAN, de manière à faire assumer certaines responsabilités et tâches de la sécurité régionale par les pays membres de la région en Europe, le Japon et la Corée du Sud en Asie du Nord Est (« off shore balancing »)
Figer l’expansion, et au moins ralentir l’expansion de l’OTAN, surtout en Europe
Le faire de manière a ne pas encourager le flirt (de l’UE, en particulier de l’Allemagne,..) avec la Russie, la Chine, etc.
3. Daech
Combattre ISI (Daech), Al Kaeda et plus généralement le Terrorisme International
Mettre fin au terrorisme international en partenariat avec la Russie, la Chine, les pays du Moyen orient, et tous les acteurs concernés
Mettre fin à la politique des changements de régime et à l’interventionnisme excessif et précipité justifié uniquement par la doctrine et non par les intérêts vitaux des USA
Mettre fin à l’immigration désorganisée et aux mouvements désordonnés de réfugiés,
Tenir responsables et comptables les pays, les institutions et les acteurs étatiques ou non-étatiques, les personnes morales ou physiques qui promeuvent l’extrémisme et la violence
Engager avec l’Islam modéré et les pays qui le représentent une campagne « Hearts & Minds » de dialogue et de promotion de l’entente, du respect, de l’acceptation et du l’enrichissement mutuel.
Veiller à la mise en place d’une gouvernance globale juste et à un respect strict de la loi et des conventions internationales
4. Engager positivement la Russie
Engager la Russie dans un partenariat stratégique pour la lutte contre ISIS (Daech), Al Kaeda et le Terrorisme international
Passer du géopolitique au géoéconomique pour enganer la Russie dans les opportunités majeures offertes par les grands projets d’infrastructure et autres projets en Russie,
Trouver un modus vivendi pour la question de l’Ukraine et de la Crimée
5. Dialogue stratégique avec la Chine,
Améliorer la balance commerciale des USA avec la Chine, et sa gouvernance monétaire et commerciale
Amener la Chine à restreindre/négocier avec ses voisins ses activités « expansionnistes et hégémoniques » dans la Mer de Chine du Sud et concernant les disputes territoriales ave le Japon et ses voisins dans le Sud Est Asiatique
Veiller à la liberté et à la sécurité des routes commerciales maritimes passant à travers la mer de Chine
Le faire sans retourner à l’endiguement et à une deuxième guerre froide, contraire aux intérêts des deux pays et de toutes manières inconcevable dans l’état et le paradigme actuel des relations bilatérales entre les USA et la Chine, et des relations régionales et globales de la Chine
Explorer la possibilité de la mise en place d’un système régional de paix et de sécurité dans le Nord Pacifique et le Nord de l’Est de l’Asie, semblable à celui en place dans le Sud Est Asiatique( l’ASEAN), et peut-être même semblable à l’OTAN (Nixon : Seize the Moment, Kissinger : De la Chine)
Donald Trump développera-t-il un ‘ business concept’ pour son mandat à la Maison Blanche, comme c’est de tradition dans les affaires, qui lui permettrait d’opérationnaliser le slogan de sa campagne électorale « Let Us Make America Great Again ! ».
IV. La Politique étrangère de Donald Trump
En politique étrangère, cinq positions ont été réitérées comme un leitmotiv.
A. Le leadership global des USA
La première position de politique étrangère concerne ce que Adrew Bacevich appelle « le Consensus de Washington » et la mission de leadership global et de présence militaire internationale des USA (Washington Rules, Metropolitan Books, 2010)
Dans sa déclaration d’ouverture devant le comité du Congrès qui doit confirmer sa nomination Rex Tillerson a fait son allégiance à ce Consensus de Washington:
1. Les USA ont un destin exceptionnel et ont beaucoup contribué à l’humanité. Ils restent la destination préférée de tous pour l’émigration à cause de son hospitalité , de ses valeurs et de ses traditions de promotion de la diversité.
2. Le leadership Global des USA est nécessaire. Il doit être non seulement maintenu mais réaffirmé. Sans ce leadership, il y a aura l’instabilité et l’insécurité.
3. Seuls les USA peuvent remplir cette mission de leadership global parce que seuls les USA ont :
a) La capacité
b) La boussole morale (the Moral Compass)
c) L’acceptabilité et le soutien de plusieurs pays pour ce rôle de leadership
4. Les alliés des USA sont impatients de voir les USA réassumer et reprendre leur mission de leadership Global.
5. Les USA reprendront leur mission de leadership global pour réaliser les objectifs de protection de ses intérêts et de ses valeurs et pour protéger l’ordre international en place, et de la sécurité et la paix internationales.
Ce consensus sera l’objet d’une grande polémique au sein de l’Administration de Trump et avec ses adversaires. Il sera un grand obstacle à un engagement stratégique avec la Russie et à un dialogue serein avec la Chine qui ne trouvent de moins en moins de justification à cette auto-proclamation de mission de leadership global. Sans retourner à un isolationnisme devenu presque impossible pour tous, surtout pour les USA, Trump évitera l’interventionnisme excessif et proactif des néo-cons et même celui de Hilary Clinton. L’intention n’est pas de réduire la présence internationale militaire des USA, mais plutôt d’alléger le coût de cette présence en transférant à ses alliés régionaux en Europe, en Asie et au Moyen Orient une partie du coût et peut être même de la mission sécuritaire de cette présence. Trump est sûr de rencontrer autant de résistance et d’inertie face aux inerties et aux intérêts retranchés aussi bien aux USA que chez ses alliés. L’establishment militaro-politico-industriel et financier mettra longtemps à admettre cette nouvelle donne et encore plus longtemps a agir sur la base de cette nouvelle réalité. Quand elle avait confronté l’impérialisme britannique et européen en 1793 avec la mission Macarteney, la Chine a mis deux siècles pour comprendre qu’elle n’est plus l’empire du milieu, admettre et agir su la base de cette nouvelle réalité.
B. L’OTAN
La deuxième position concerne la rationalisation et l’optimisation de la participation des USA à l’OTAN. Trump, entouré de généraux pro-alliances et pro-OTAN n’abandonnera pas l’OTAN. L’OTAN est une vache sacrée qui pose problème mais que personne ne veut ou ne peut sacrifier. Trump se rendra compte que l’OTAN est aussi le problème le plus épineux dans ses relations avec ses alliés européens. La volonté de relativiser l’importance de l’OTAN inquiète beaucoup de pays européens, en particulier les pays baltiques et ceux de l’Europe de l’Est. Le défi restera même si la démarche consistera non à relativiser et mettre à jour la mission et l’expansionnisme de l’OTAN mais uniquement à essayer de faire partager la charge de l’OTAN et d’élever les dépenses militaires des pays membres au niveau nominal convenu de 2% de leur produit intérieur brut (PIB), en ce temps de Brexit et de crises financières européennes.
L’OTAN est aussi le défi principal d’une nouvelle politique de Trump d’engagement des USA avec son partenaire pour la lutte contre Daech, la Russie de Poutine. Poutine, et avec lui beaucoup de russes, juge que les USA ont profité de la vulnérabilité et de la faiblesse de la Russie pendant la période transitoire de la Perestroïka pour procéder à un expansionnisme provocateur de l’OTAN aux pays baltiques, à presque 200 km de Saint Petersbourg. Poutine considère que cet expansionnisme ainsi que l’installation en Pologne, à la frontière de la Russie, de systèmes antimissiles trahissent l’esprit et la lettre des accords signés entre les USA et la Russie le lendemain de la chute du mur de Berlin. Poutine était très inquiété par le Printemps Arabe en 2011 et avait reproché à Medvedev, alors Président de la Russie, de n’avoir pas opposé un véto à l’autorisation par le Conseil de Sécurité de Nations Unies de l’intervention de l’OTAN en Libye. L’implication de l’OTAN dans la situation en Libye qui a abouti à l’exclusion de la Russie, et de la Chine, de cet espace énergétique majeur, la tentative de déstabilisation de l’Ukraine et de son incorporation dans l’OTAN, la déstabilisation de la Syrie par le recours à ISIS et aux terroristes rappellent pour la Russie la période de la guerre froide et l’expérience de l’utilisation des Moudjahidines en l'Afghanistan. Toutes ces actions, pense Poutine, sont susceptibles de faire revenir le monde à une deuxième guerre froide, à encourager le terrorisme international et à déstabiliser dangereusement la région, le Moyen orient et l’Asie Centrale, et à terme la paix et les relations internationales. De même en a-t-il voulu à Hilary Clinton d’avoir exprimé son soutien aux mouvements de protestation en Russie et à ce qui semblait être les tentatives de provoquer un Printemps Arabe en Russie.
Poutine espère que le « pivotage » de Trump vers la reconstruction de l’infrastructure intérieure des USA et vers la réalisation du retour à la Grandeur de l’Amérique par le développement intérieur exigera que les USA, redéployent ses dépenses et aboutira à une démilitarisation de la politique étrangère des USA et un gel, sinon, un renversement de l’expansionnisme de l’OTAN.
Le pivotage de la Turquie, un membre de l’OTAN, vers la Russie, un adversaire de l’OTAN et vers la Chine, ainsi que le rapprochement avec l’Iran, un autre adversaire de l’OTAN proche de la Chine chahutent le paysage et laissent entrevoir des changements structurels possibles d’une importance majeure aussi bien pour l’OTAN que pour la région.
L’OTAN pourrait être ainsi une pomme de discorde au sein du Cabinet que le leadership de Trump pourrait éventuellement surmonter. Elle pourrait aussi et surtout dérailler aussi bien la détente envisagée avec la Russie que la lutte jugée hautement prioritaire contre le terrorisme.
C. La lutte contre le terrorisme
La troisième position de politique étrangère de Trump concerne la lutte contre le terrorisme international en partenariat avec tous les pays concernés et en particulier avec la Russie et les pays du Grand Moyen Orient. Dans sa déclaration au comité de confirmation du Congrès, Rex Tillerson, le nominé au State Department a décrit la lutte contre ISI comme la première priorité des USA.
Une première motivation géopolitique du désir de rapprochement avec la Russie concerne cette intention de combattre sérieusement ISIS et le terrorisme international.
“Wouldn’t it be a wonderful thing,” then-presidential candidate Donald Trump mused in August, “if we actually got along with Russia and worked out some kind of deal where we go and knock the hell out of ISIS along with NATO and along with the countries that are in that area?” (Bruce Ackerman, The Atlantic, 21 novembre, 2016)
Si cette intention se confirme, ce qui n’est pas garanti, alors le partenariat avec la Russie, et en particulier avec Poutine, ancien directeur de la KGB, est essentiel. L’expérience et la connaissance de la Russie dans le combat du Jihadisme en Afghanistan et de l’ISIS en Syrie fait apparaître ce partenariat avec Poutine comme un facteur essentiel, pour ne pas dire sine qua non, de succès. Poutine accueille avec intérêt l’intention de Donald Trump de combattre ISIS en partenariat avec la Russie et son intention d’abandonner la doctrine de l’interventionniste des néo cons et de l’hégémonisme libéral de Clinton.
Rex Tillerson a aussi déclaré que le radicalisme islamique, est un danger très grave pour la paix et la stabilité dans le Monde et aux USA, mais qu’il n’est pas une représentation légitime de l’Islam. Dans son expérience et voyages dans les pays islamiques, en Orient et en Asie du Sud Est, a-t-il pris soin d’ajouter, il a pu se rendre compte de l’Islam est une grande religion (great faith). Il a déclaré que la lutte contre ISIS et Al Kaeda sera la priorité des priorités de l’Administration Trump. Il a aussi déclaré que les USA comptent mener cette lutte en partenariat de la Russie, de la Chine et de tous les pays concernés au Moyen Orient et ailleurs.
De même a-t-il déclaré que les USA mettront devant leurs responsabilités tous les pays, institutions et acteurs qui promeuvent ou soutiennent lSIS et le Terrorisme International sous quelque forme que ce soit.
Il a enfin déclaré que la lutte contre le terrorisme ne doit pas être seulement une guerre physique sur le terrain, mais aussi une lutte de valeurs et d’idées et qu’à ce titre l’islam modéré est le meilleur allié des USA dans sa lutte contre ISIS et Al Kaeda. Il y a lieu de signaler que le nominé à la Défense et ancien chef de CentCom, le Général James N. Mattis, pense que Hezbollah au Liban, soutenu par l’Iran, est une menace à terme encore plus grave que ISIS pour la sécurité des USA.
Rex Tillerson a insisté sur l’importante cruciale de la crédibilité, la responsabilité, et la comptabilité dans le respect des engagements et les accords internationaux et de la loi internationale aussi bien par les USA eux-mêmes, par leurs adversaires que par leurs alliés aussi bien dans propre l’intérêt que dans celui des USA.
Il est à noter que ce point de vue fait un consensus entre les nominés seniors au Cabinet, en particulier ceux d’entre qui ont une expérience solide de terrain, comme par exemple le nominé Général James N. Mattis, ou le Général David Petraeus, ancien Commandant des Forces d’Assistance en Afghanistan et ancien directeur de la CIA. Petraeus a déclaré, bien avant Rex Tillerson, qu’il ne sera pas possible ni suffisant d’enfoncer un pieu dans le cœur du terrorisme islamique, et qu’une approche soft par les idées et les valeurs est impérative pour gagner la bataille dans les cœurs et les esprits des musulmans.
C’est là une opportunité majeure de partenariat diplomatique pour la Tunisie aussi bien avec les USA, qu’avec la Russie, la Chine et les autres partenaires concernés.
D. La détente avec la Russie
La quatrième position en politique étrangère concerne l’amélioration des relations, peut-être même la promotion d’une détente et d’un partenariat avec la Russie. Tout au long de sa campagne électorale, Donald Trump n’a pas caché son admiration pour le président russe Poutine. Il est cependant un peu superficiel et risqué d’attribuer cette admiration à son intention d’œuvrer à un rapprochement, voire à une sorte de détente avec, ou d’engagement de la Russie. Trump doit avoir un concept stratégique derrière son intention de détente avec la Russie. L’entrevue avec Henry Kissinger le lendemain de sa victoire et sa récente cooptation comme conseiller donnent foi à la thèse d’une intention stratégique de détente. Les motifs à cette décision pourraient être à la fois géopolitiques et fait nouveau, géoéconomiques.
Géopolitiquement, une détente avec la Russie, enlèverait les arguments justifiant une bonne partie de la présence militaire américaine globale et en particulier l’expansion coûteuse de l’OTAN en Europe, supportée essentiellement par les USA. L’expansionnisme de l’OTAN, est le principal grief de la Russie dans ses relations avec les USA et l’Europe. Le gel de cet expansionnisme aura un effet de boucle retour positif sur la détente envisagée.
Par contre l’explication quelquefois suggérée par certains analystes qu’un rapprochement avec la Russie constitue un élément d’une politique d’endiguement de la Chine est erronée. L’expérience de cette tactique « divide and rule » de la guerre froide vécue par les deux puissances les rend toutes les deux conscientes de ce risque et de ce piège pour ne pas y tomber. De plus, aujourd’hui la Russie et la Chine sont engagées par un grand nombre de projets importants dans un partenariat stratégique qui pourrait instaurer un espace géoéconomique dans le Nord Pacifique rappelant l’espace Nord Atlantique. Ce concept a été d’ailleurs préconisé par Nixon, dans son livre « Seize the Moment » et repris modifié par Kissinger dans son livre « De la Chine » publié en 2011.
Ce nouveau paradigme des relations sino-russes suggère une nouvelle motivation possible que peu d’analystes prennent en considération et que le background d’affaires de Trump et la nomination au State Department de Rex Tillerson, ancien CEO de Exxon, encouragent à ne pas exclure et à explorer. Trump pourrait vouloir changer le paradigme des relations entre les USA et la Russie. Il pourrait vouloir conforter, et à terme peut-être même remplacer la logique géopolitique qui a prévalu jusqu’à maintenant dans les relations entre les deux pays, par une logique géo économique. En quelque sorte il pourrait vouloir substituer l’équilibre du développement à l’équilibre de la terreur et à l’ancien M.A.D, Mutually Assured Destruction, un partenariat pour le business, et un nouveau M.A.D, Mutually Assured Development. Il pourrait vouloir le faire en encourageant les entreprises américaines à participer aux opportunités, aux projets d’infrastructure et autres énormes projets que la Russie envisage de réaliser grâce à ses énormes revenus pétroliers et qu’elle a ouverts à la participation et au partenariat extérieurs. Par exemple la Russie a mis en route un projet de liaison par train rapide Moscou-Kazan-Kazakhstan-Chine auquel la Chine participe. De même la Russie a procédé à la privatisation de Rosneft, le géant pétrolier russe dont Qatar a déjà acquis 19.5% et auquel Exxon de Rex Tillerson a déclaré s’intéresser.
Ce dialogue sera étendu aux opportunités offertes à l’économie et aux entreprises américaines comme celles offertes par la Russie avec la privatisation de Rosneft. La Russie a programmé beaucoup d’autres projets semblables dans l’aéronautique, la santé, etc., donnant une dimension concrète et opérationnelle au dialogue BRICSA et à la nouvelle Banque Asiatique pour l’Investissement dans l’Infrastructure, l’AIIB qui recueillera et investissera l’essentiel des excédents commerciaux de la Chine et beaucoup d’autres pays membres. Le prix qu’exigera Poutine sera une réduction voir un renversement de l’expansionnisme de l’OTAN.
Un grand obstacle à l’engagement avec la Russie sera alors l’opposition que Trump rencontrera dans son cabinet, dans les média et dans les cercles retranchés de « l’Overworld » et du complex militaro-industrielo-financier-énergétique. La condamnation ferme et sévère de la politique de la Russie en Ukraine et de l’annexion de la Crimée par Rex Tillerson, un ami de la Russie, est à ce titre révélateur du défi que représentera l’effort d’engagement avec la Russie, malgré la présence de Henry Kissinger. De même, le Général Mattis a déclaré qu’alors qu’il soutenait une politique d’engagement positif, il faut reconnaitre les choses pour ce qu’elles sont et reconnaitre que la Russie est une menace majeure aux USA. Ou alors est-ce une tactique de division des rôles et de négociation ?
E. L’endiguement de la Chine
Enfin, la cinquième position en politique étrangère concerne la haute priorité que l’Administration Trump a l’intention de donner à ses relations avec la Chine sur la dimension géoéconomique dans ces relations pour réduire le déficit commercial des USA et l’hémorragie des investissements et des emplois avec et vers la Chine. Cependant le défi majeur dans ce dialogue sera la question de Taiwan, et plus encore celui des îles en dispute dans la mer de Chine.
Le dialogue géoéconomique portera aussi sur la participation des entreprises américaines aux grandes opportunités commerciales globales, aux grands projets d’infrastructure en Asie ou ailleurs financés par la nouvelle AIIB (Banque Asiatique pour les Investissements d’Infrastructure) ne manqueront pas d’attirer la nouvelle diplomatie des affaires de l’Administration Trump.
Il est devenu aujourd’hui à la mode de parler d’une guerre froide imminente, voir d’un conflit imminent entre Chine et les USA. En ce faisant on fait un parallèle entre la rivalité anglo-allemande qui a conduit à la première guerre mondiale au début du siècle dernier, et la rivalité sino-américaine dans le Pacifique. Une nouvelle comparaison, plus récente, est celle qui est faite avec la rivalité nippo-américaine dan les années trente (30) dans le Pacifique et qui a conduit à la guerre du Pacifique en 1941, avec le bombardement de Pearl Harbour. On fait enfin la comparaison classique avec la guerre froide avec l’ancienne Union Soviètique.
La Chine refuse l’interventionnisme des USA dans les affaires est-asiatiques et internationales et conteste son exceptionnalisme et sa mission de leadership global auto-proclamés. Ses intérêts ont débordé la Muraille et se sont globalisés. La Chine lointaine a une présence commerciale et économique en Afrique sans commune mesure avec celle de l’Europe voisine ou même de la France et du Royaume Uni, anciennes métropoles du Continent pourtant toutes les deux dotées d’instruments comme la Francophonie pour la France et le Commonwealth pour le Royaume Uni.
La Chine d’habitude indifférente aux affaires internationales, et surtout aux conflits au Moyen Orient, a aujourd’hui des intérêts commerciaux et énergétiques dans la région et en Asie Centrale, tout au long de l’ancienne route de la soie qu’elle a l’intention de reconstruire.
Elle préconise une démocratisation des relations internationales. La Chine invitée a refusé de se joindre au G7. Elle préfère une gouvernance démocratique à travers les institutions telles que celles du système des Nations Unies.
Les USA, à leur tour, accusent la Chine de vouloir les exclure du Pacifique, qui était devenu depuis la deuxième guerre mondiale « une mare nostrum », « un lac de la marine américaine », dans les mots de l’ancien Ministre de la Défense, Robert Gates (Jared McKinney, The National Interest, January 3rd, 2017). Ils accusent la Chine de vouloir dominer la région pacifique et les pays voisins. Ils citent comme preuve les incidents provocateurs de plus en plus fréquents entre les aviations et/ou les marines des deux pays. Ils citent aussi la construction d’îles artificielles en mer de Chine en travers des routes maritimes stratégiques du commerce et de l’énergie de tout l’Est de l’Asie et du commerce mondial. Ils citent également les conflits sur un certain nombre d’îles dans la mer de Chine et le Japon ou d’autres pays du Sud Est Asiatique, etc. Les USA sont allés jusqu’à porter à la Cour de la Haye le conflit entre la Chine et les Philippines et la Chine et faire condamner la Chine par cette cour. Paradoxalement, et cela est révélateur, cela n’a pas empêché le Président Duterte des Philippines le lendemain même de cette condamnation de faire une visite officielle en Chine et de décider d’un rapprochement stratégique avec la Chine, au grand étonnement des USA. Les USA citent enfin les pratiques économiques, commerciales, et monétaires et les exceptions aux libertés fondamentales et aux droits de l’homme comme des obstacles aux valeurs et aux intérêts des USA à la sécurité et la paix internationales.
Notons tout d’abord le changement radical dans les circonstances et les paradigmes de relations et de l’économie internationale. La globalisation de l’économie internationale, du commerce et des investissements des économies, les échanges sociaux et culturels entre les protagonistes a enchevêtré à un degré inimaginable au début ou au milieu du siècle dernier et a changé le jeu international d’un jeu géopolitique à somme nulle, Win-Lose en un jeu géoéconomique ayant beaucoup d’éléments Win-Win.
L’endiguement de la Chine est donc loin d’être possible ou même souhaitable. La Chine est aujourd’hui un acteur central, une « Economie du Milieu » dans l’économie mondiale et le commerce international. Elle est le premier partenaire commercial, sinon parmi les cinq premiers partenaires commerciaux respectivement des USA, de La Russie, du Japon, de l’Europe, de l’Afrique et de l’Asie de l’est et même de l’Asie du Sud.
De même pour les investissements directs qu’elle fait dans ces pays ou qu’elle reçoit d’eux. La Chine détient aussi des portefeuilles très importants de titres financiers ou de trésor américains, japonais et européens.
De même dispose-t-elle dans la plus part de ces pays et de ces régions d’une diaspora politique, industrielle, commerciale, culturelle, intellectuelle et scientifique importante. Cette diaspora, proche des centres de puissance et de décision, lui permet d’influencer les politiques et les décisions la concernant dans les pays d’accueil.
Même s’il est retenu comme une option possible, il est peu probable que la Russie, ou qu’aucun des pays de la région jouent le jeu, comme l’a montré le comportement des Philippines dans le différend sur les îles de la Mer de Chine. Mieux encore, la Russie et la Chine ont développé au cours de ces dernières années un paradigme régional nouveau qui ne va pas sans rappeler le paradigme des relations entre les USA et le Canada, ou même le paradigme NAFTA. Ce paradigme pourrait à terme inclure le Japon pour faire le Triangle Pacifique, comme l’avait préconisé Richard Nixon dans son livre « Seize the Moment ». Il pourrait même inclure la Corée du Sud, et représenter un espace nord pacifique, devenant une sorte d’ANEAN, Association of North East Asian Nations, le pendant nordique de l’ASEAN.
De plus la Chine s’est dotée d’un instrument redoutable de diplomatie régionale et internationale l’AIIB, Asian Infrastructure Investment Bank. L’AIIB a été créée en 2015 sur son initiative propre après le refus de la réforme de la gouvernance du FMI. L’AIIB se positionne comme une alternative au FMI, à la Banque Mondiale et la Banque Asiatique de Dévloppement, jugés trop dominées par les USA. Aucun pays n’a une capacité ou un droit de veto comme c’est le cas au FMI et à la Banque Mondiale où les USA ont une capacité de veto de fait.
Les USA doivent regretter maintenant d’avoir bloqué la réforme demandée du FMI et du système de Brettonwoods demandée par la Chine, et refusée par le Congrès américain. Pourtant cette réforme n’aurait fait passer le droit de vote de la Chine que de 4% à 6.4% et n’aurait baissé les droits de vote bloquant des USA que de 17.7% à 17.4%. De même doivent-ils regretter d’avoir bloqué l’initiative Miyazawa du Japon en 1998, pour créer un fonds monétaire asiatique et aider les pays asiatiques à sortir de la crise financière de 1997.
Cinquante sept pays ont adhéré dont les principales économies de l’Asie, sauf le Japon et l’Inde et les principales économies de l’Europe,sauf la Belgique et l’Irlande. Les USA, le Canada et le Mexique ont refusé d’adhérer. Les candidatures de la Corée du Nord et de Taiwan n’ont pa étét acceptées.
L’AIIB sera a 75% au service de la reconstruction de l’Asie mais aussi à 25% au service de l’Afrique et en Amérique Latine et des pays non-asiatiques. Elle accueillera les excédents commerciaux et financiers de la Chine et des autres pays membres plus facilement que la Banque Mondiale. Elle sera un concurrent redoutable aux institutions de Brettenwoods et de Bruxelles, considérés comme des instruments essentiellement occidentaux et surtout américains.
Tout cela pour dire que la globalisation a emmêlé les intérêts stratégiques des pays au point qu’il semble que nous assistions, partout dans le Monde, à un passage de la géopolitique à la géo économie, ou du mois d’une forte relativisation de la géopolitique et d’une forte valorisation de la géo économie. Et que la Chine joue un rôle central de milieu dans la nouvelle économie mondiale globalisée. La Chine un une présence commerciale, économique et sociale en Afrique lointaine, sans commune mesure avec la présence des anciennes métropoles que sont la France et le Royaume Uni ou celle des USA, du Japon ou de l’Inde. Elle fait par le géoéconomique ce les USA font par le géopolitique et la puissance et la présence militaire globalisée. Elle a perdu son statut d’ « Empire du Milieu » pour devenir l’ « Economie du Milieu ». La Chine a conforté sa présence économique par une présence culturelle globale. Elle a mis en place un réseau global de bases culturelles d’Instituts internationale Confucius, considéré par ses adversaires comme un réseau de propagande, mais qu’elle considère comme fondement la sa puissance soft semblable à sa puissance soft culturelle multimillénaire qui lui a permis d’être la Grèce de l’Asie de l’Est, le berceau des arts, des métiers et de la culture.
Liste des partenaires commerciaux les plus importants de la Chine (Imports +Exports) pour 2013
Rank | Trading Partner | Total trade |
1 | United States | 521 |
2 | Japan | 312.55 |
3 | South Korea | 274.24 |
4 | Taiwan | 197.28 |
5 | Germany | 161.56 |
6 | Australia | 136.37 |
7 | Malaysia | 106.07 |
8 | Brazil | 90.27 |
9 | Russia | 89.21 |
Notable changes compared to 2011 include India dropping out of the list and Malaysia joining the list at 8th place.
The largest Chinese partners in billions of US Dollars for 2011 were as follows:
Region | Exports | Imports[2] | Total trade | Trade balance |
European Union | 356.0 | 211.2 | 567.2 | +144.8 |
United States | 324.5 | 122.2 | 446.7 | +202.3 |
Hong Kong | 268.0 | 15.5 | 283.5 | +252.5 |
ASEAN | 170.1 | 192.8 | 362.9 | -22.7 |
Japan | 148.3 | 194.6 | 342.9 | -46.3 |
South Korea | 82.9 | 162.7 | 245.6 | -79.8 |
India | 50.5 | 23.4 | 73.9 | +27.1 |
Russia | 38.9 | 40.3 | 79.2 | -1.4 |
Taiwan | 35.1 | 124.9 | 160.0 | -89.8 |
As of 2013 EU - Chinese trade makes the EU the largest trading partner of China and China the second largest trading partner of the EU.[3]
China is a dominant trading partner of many countries. The following tables are based on 2014 data as shown on the CIA World Factbook unless otherwise indicated.
V. La Tunisie et les USA
La Tunisie a été le premier pays arabe et islamique à ouvrir une ambassade aux USA en 1805. C’est l’une des premières et rares occasions où les relations entre les deux pays avaient pris une tournure stratégique. Les USA nouvellement indépendants, avaient perdu la protection de la puissance navale du Royaume Uni pour leur commerce actif en Méditerranée. N’ayant pas encore construit une puissance navale et n’ayant pas pu obtenu la protection de la Marine Française, ils ont demandé et conclu avec le Bey de Tunis un accord les protégeant contre les activités des corsaires tunisiens et autres corsaires en Méditerranée Occidentale, considérée comme une « mare nostrum » du Maghreb, c’est-à-dire du Royaume du Maroc, et des Régences barbaresques de Tunis, de Tripoli et d’Alger. Suite à ces accords des relations diplomatiques entre la Tunisie et les USA ont été établies et l’ambassadeur tunisien, Souleiman Mellimelli, avait été reçu à Washington avec des égards et une pompe exceptionnels.
Il y a eu un deuxième moment stratégique dans les relations entre les deux pays au début des années cinquante, c’es-à-dire de la guerre froide et de la rivalité des USA et de l’ancienne Union Soviétique, en particulier entre les internationales ouvrières des deux camps. Le leadership politique de la lutte pour l’indépendance a analysé la situation et fait des choix et des alliances internationales stratégiques judicieux que d’autres pays comme l’Egypte, et beaucoup d’autres pays africains et arabes n’ont pas faits ou su faire. Ces choix ont été cruciaux dans la lutte militaire et surtout diplomatique pour l’indépendance. Ils ont permis à la Tunisie d’inscrire sa cause à l’ordre du jour dans les débats du Conseil de sécurité de la jeune ONU. Plus tard le président Habib Bourguiba a été reçu par John Kennedy à Washington et à New York avec des égards et une pompe encore plus exceptionnels que ceux réservés au premier ambassadeur tunisien en 1805.
Aujourd’hui nous avons un troisième moment stratégique. La lutte contre le terrorisme, souvent perçu comme extrémisme islamique, fait l’objet d’une résonnance et d’un consensus forts aussi bien parmi les principaux nominés au Cabinet de Trump, qu’avec sa base électorale populaire, qu’avec l’opposition démocrate, qu’aves les alliés internationaux des USA, et avec l’opinion mondiale officielle et populaire. Le Secrétaire d’Etat nominé et toute son équipe ont déclaré la lutte contre Daesh comme une première priorité.
La lutte contre le terrorisme est un impératif vital pour la Tunisie. Elle constitue aussi une opportunité de contribution efficace et significative et de partenariat diplomatique stratégique, avec les USA et avec l’Administration Trump. Ce moment est d’autant plus stratégique que les USA reconnaissent enfin la limite des approches purement sécuritaires et militaires. Ils reconnaissent l’importance de la justice, la comptabilité, la responsabilité et le respect du droit international. Ils reconnaissent enfin et surtout que la bataille n’est pas uniquement sur le terrain, mais aussi comme l’a déclaré Rex Tillerson, « les cœurs et les esprits de tous et que dans cette bataille les alliés les plus précieux des USA sont les pays islamiques modérés » dont en premier lieu et depuis la fondation de Kairouan et de la Zitouna, la Tunisie.
Salah Brik El Hannachi
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Merci Si Salah. Le dernier paragraphe (V- La Tunisie et les USA) est à méditer. Il mériterait de construire un think-tank qui développe ces idées et propose des visions