News - 10.11.2018

Gilles Kepel: Sortir du chaos, les crises en Méditerranée et au Moyen-Orient (Bonnes feuilles et cartes)

Gilles Kepel: Sortir du chaos,les crises en Méditerranée et au Moyen-Orient

Depuis quand le chaos a-t-il commencé dans notre région, sapé ses fondements et porté partout ses ravages? Fin observateur depuis 40 ans de ces décennies tumultueuses, témoin direct de nombre d’évènements marquants, proche connaisseur d’acteurs significatifs, Gilles Kepel nous met en perspective toutes ces années chaotiques. Dans son livre Sortir du chaos, les crises en Méditerranée et au Moyen-Orient qui vient de paraître chez Gallimard, il pousse son analyse à l’interprétation des ‘’événements advenus à partir de l’hiver 2017-2018, dans la période qu’ouvrent la chute de Daesh et la défaite annoncée de l’insurrection syrienne, pour prendre la mesure des bouleversements tectoniques.’’

Il s’interroge sur le futur du jihadisme et du salafisme, la fracturation du «bloc sunnite», l’attitude de l’Iran dans son bras de fer avec Trump, les arbitrages de la Russie de Vladimir Poutine bien impliqué dans la question syrienne, et la position de l’Europe, au cœur d’une zone de crise.

La conclusion de Gilles Kepel est nette. ‘’Le désintérêt de la superpuissance américaine, désormais productrice majeure de pétrole et gaz de schiste, pour la région Moyen-Orient-Méditerranée, engagé sous la présidence Obama et confirmé de manière spectaculaire par son successeur Donald Trump, écrit-il, contraint l’Europe à assumer de plain-pied ses responsabilités. Dans cette configuration, la régénération du Levant est un enjeu cardinal.’’

En illustration de ses propos, des cartes inédites de Fabrice Balanche facilitent la compréhension des enjeux. et au Moyen-Orient.

Sortir du chaos: Les crises en Méditerranée et au Moyen-Orient de Gilles Kepel Cartes inédites de Fabrice Balanche Collection Esprits du monde, Gallimard, 528 pages + 8 p.hors texte, octobre 2018.

Bonnes feuilles

Tombeau pour la Syrie

Quatre décennies avant la rédaction de ce livre, en 1977-1978, je passai une année en Syrie, boursier de langue arabe à l’Institut français de Damas. C’était une étape obligée pour les arabisants en herbe, le sésame qui nous introduirait dans la caverne où étaient celés les secrets grammaticaux et phonologiques de l’Orient qui nous passionnait. À de rares exceptions près, nul n’entrait alors dans la carrière s’il n’avait séjourné au « Shâm » comme nous disions entre nous, utilisant le vieux terme sémitique encore usité dans le dialecte local qui signifie à la fois le Levant et sa capitale traditionnelle. Dans la géographie musulmane où l’on fait face à La Mecque à partir de l’Occident, le Shâm désigne la gauche, ou le Nord, et son opposé le Yémen, la droite, ou le Sud.

Aucun de mes camarades ni moi n’aurions pu imaginer que, quarante ans plus tard, ce même terme de Shâm deviendrait le cri de ralliement des jihadistes des banlieues françaises rejoignant les rangs de l’« État islamique »(ou Daesh) pour y massacrer les «apostats» – et notamment les alaouites, cette confession ésotérique à laquelle appartenait Hafez al-Assad, le président syrien (son fils Bashar avait douze ans à l’époque) – avant de revenir tuer leurs propres concitoyens «infidèles», au Bataclan ou au Stade de France. Et dans mes pires cauchemars je n’avais jamais songé que je me retrouverais en juin 2016 condamné à mort en tant qu’arabisant chevronné par un daeshien franco-algérien de Roanne et Oran, installé dans la ville syrienne de Raqqa où l’« État islamique» avait établi son éphémère capitale. La sentence avait été prononcée via l’application Facebook.live utilisée par un affidé du premier, assassin franco-marocain d’un policier et de son épouse à Magnanville, dans les Yvelines. Et que je serais par voie de conséquence contraint de vivre à Paris, en plein Quartier latin, sous protection policière. Bien sûr, à l’époque Internet était inconnu, inenvisageable, impensable, et l’atlas en deux dimensions donnait à voir des États confinés par des frontières correspondant à autant de territoires délimités par d’épais traits noirs. Telle était la carte de l’Empire romain accrochée au-dessus du tableau dans la classe de Lettres supérieures en 1974 qui suscita mon rêve d’Orient et me poussa à embarquer l’été suivant sur un bateau à Venise pour Istanbul, le Levant et l’Égypte, afin de découvrir les contrées charnelles qu’elle dessinait.

On ne pouvait aucunement anticiper l’infini carambolage que la toile numérique et les réseaux sociaux introduiraient dans les esprits et les représentations du monde, la confusion mentale qui irait de pair avec l’effacement de la distance et de la perspective, la disparition des repères de l’espace et du temps qui nous a fait perdre la boussole quarante ans plus tard.

Pourtant, si Damas elle-même était calme en cette fin des années 1970, le chaos n’en avait pas moins ravagé déjà le Liban voisin. La guerre civile, avec son cortège d’atrocités intimes, y faisait rage selon des lignes politico-confessionnelles témoignant de l’embrouillement de ces deux identités, entre  «islamo-progressistes» et «chrétiens conservateurs». Ces appellations hybrides exprimaient le conflit qui, autour de la présence armée des réfugiés palestiniens au Liban, opposait pour le pouvoir des maronites en déclin démographique, majoritairement pro-occidentaux, et des sunnites plutôt attirés par le camp socialiste – d’où leur épithète, qui paraît aujourd’hui saugrenue ou désuète, de «progressistes». Bien peu d’observateurs percevaient alors le jeu des pétromonarchies de la péninsule Arabique et du wahhabisme saoudien, fabuleusement enrichis depuis les lendemains de la guerre d’octobre 1973 par l’augmentation vertigineuse des prix du pétrole qui ferait d’eux l’acteur principal de la réislamisation virulente de la région et viserait à araser l’esprit cosmopolite du Levant de ma jeunesse. Et personne n’imaginait que la révolution iranienne surgirait dans la foulée, faisant des chiites autrefois marginaux, mais radicalisés à leur tour par une doctrine islamiste concurrente, la force politique majeure du Liban puis d’un vaste croissant de territoires traversant Syrie et Irak jusqu’à la Perse.

Mes camarades à l’Institut de Damas et moi étions fascinés par cette civilisation levantine où nous projetions nos fantasmes mêlés. Nous avions peu lu en règle générale, et n’étions guère familiers du corpus des voyageurs en Orient depuis Volney ou Chateaubriand, nos prédécesseurs oubliés. Nous étions pour la plupart imbus d’un gauchisme sommaire dont l’idéologie régnait sur le microcosme estudiantin dans la décennie écoulée depuis Mai 68.

En dix ans, il avait toutefois perdu son dogmatisme originel et il en restait une doxa approximative, une vision brouillonne du monde, articulée autour de quelques certitudes, dont l’anti-impérialisme et l’antisionisme constituaient les clés de voûte. En attendant qu’elles ne s’écroulent, la Syrie de Hafez al-Assad, fer de lance de la résistance à Israël et champion du progressisme arabe, recevait a priori nos suffrages.

J’ai assez rapidement déchanté. J’aimais beaucoup la campagne syrienne – qui me rappelait le village familial de l’arrière-pays niçois des vacances enfantines et aussi la geste de l’Odyssée tout juste étudiée en classe préparatoire où j’avais accompli mes humanités gréco-latines. Mais cette récurrence romantique ne put occulter bien longtemps la brutalité d’un régime et la violence d’une société que j’ai retrouvées parfaitement décrites et illustrées dans les albums parus en 2014 de Riad Sattouf (lui-même né cette année 1978) L’Arabe du futur – exactement comme je les avais vécues ou observées moi-même. Avec mes camarades dont la liberté n’avait souffert, au Quartier latin, aucune entrave, nous apprîmes à baisser la voix en public, à nous méfier de chacun, découvrant l’ordinaire d’une dictature «de gauche», évitant de parler de ceux qui avaient disparu dans les geôles comme de fréquenter leurs proches. Et surtout, je fis la connaissance à l’Institut français de Damas du chercheur Michel Seurat, de huit ans mon aîné (il naquit en 1947). Excellent arabisant et sociologue inspiré par Alain Touraine, il consacrait ses travaux à l’analyse du régime syrien. Résidant par la suite au Liban avec sa femme et ses petites filles, il paierait de sa vie ses recherches, enlevé le 22 mai 1985 à l’aéroport de Beyrouth comme otage par une élusive «Organisation du jihad islamique» diligentée depuis Téhéran et Damas, et mourut en détention en 1986, vilipendé par ses assassins comme «chercheur espion spécialisé».

Avant même ce traumatisme qui a marqué mon existence et profondément influencé mon regard, c’est la désillusion née du choc de la réalité syrienne qui me poussa, de retour à Paris et inspiré par l’admiration que je vouais à Michel Seurat, à délaisser les humanités classiques et la civilisation arabe ancienne qu’elles avaient hybridée pour des études politiques destinées à élucider ce drame qui se jouait au Moyen-Orient et avait mis à mal mes certitudes simplistes.

À peine admis comme élève à Sciences-Po en 1978, j’avais été confronté à cet autre paradoxe: le déclenchement de la «révolution islamique» iranienne. Malgré l’année passée à Damas, je n’avais pas le recul qui m’aurait permis d’inscrire en perspective l’islamisation «révolutionnaire», chiite et anti-impérialiste de Téhéran avec son pendant «réactionnaire», sunnite et antisocialiste à Riyad.

Pourtant, c’est dans ces années 1970 que commença le cycle du chaos dont les deux moteurs furent la croissance faramineuse de la rente pétrolière et l’exacerbation de l’islamisme politique – et qui démolirent le Levant. La corrélation de ces deux phénomènes a structuré le demi-siècle écoulé, couvrant l’histoire de deux générations. C’est dans le pays du Shâm qu’elle a atteint son paroxysme monstrueux, avec la proclamation, le 29 juin 2014, au début du Ramadan, du «califat» de Daesh. Cette année-là connut une chute inouïe de 70 % du prix du brut, contraignant à repenser les scénarios à moyen et à long terme pour le développement de la région, ses modèles politique, économique, social – jusqu’à la place de la religion en son sein. Cet événement était dû à plusieurs causes : l’exploitation du pétrole de schiste aux États-Unis, qui redevint l’un des trois premiers producteurs mondiaux, avec la Russie et l’Arabie saoudite. Mais également la transformation des comportements des consommateurs des pays de l’OCDE, avec la perspective de la généralisation des véhicules électriques – tirant les cours vers la baisse à terme par réduction de la demande. Ces phénomènes simultanés questionnent l’économie rentière telle que nous l’avons connue au cours du demi-siècle écoulé au Moyen-Orient, ainsi que la pérennité de son corollaire, l’hégémonie de l’islamisme politique propagé tant par les pétromonarchies arabes que par leurs rivaux iraniens sur la rive opposée du golfe Persique.

Un événement trivial en apparence témoigne de ce découplage inédit entre les dynasties de la péninsule et l’establishment salafiste qui a fourni durant ces décennies la légitimation religieuse de leur pouvoir, tout en se diffusant grâce à leur aval à l’ensemble du monde musulman sunnite : le décret du roi Salman d’Arabie saoudite le 26 septembre 2017 autorisant à la fin du Ramadan 2018 les femmes à conduire malgré les protestations des oulémas au nom de leur conception rigide de la morale.

Ce décret passe vingt-sept ans – une génération – après que, le 6 novembre 1990, des Saoudiennes qui avaient pris le volant à Riyad y furent poursuivies et vilipendées.

Confronté à la nécessité de réorganiser le marché du travail et d’y faire entrer la population féminine en permettant sa mobilité, afin d’assurer l’ère postpétrolière, le prince héritier saoudien Mohammed Ben Salman, âgé de trente-deux ans, une première dans cette monarchie gérontocratique, incrimine en novembre 2017 la surenchère à l’extrémisme dans laquelle le pays s’est engagé selon lui depuis 1979.

En effet, cette année charnière commença par le retour de Khomeyni à Téhéran et s’acheva par l’invasion soviétique de l’Afghanistan, prélude au jihad dans ce pays – lequel ouvrit la boîte de Pandore d’un terrorisme islamiste international qui perdure depuis lors. C’est l’essence même du système saoudo-wahhabite qui est ainsi remise en question, tel qu’il avait dominé le Moyen-Orient depuis la victoire de l’arme des hydrocarbures dans la guerre d’Octobre opposant Israël aux États arabes – dont les surnoms de «guerre du Kippour» ou «guerre du Ramadan» disent aussi combien elle serait emblématique de l’engorgement à venir de l’espace politique par le dogme religieux. Les pages qui suivent sont consacrées à mettre en perspective ces décennies chaotiques – puis à envisager les voies de sortie qui se dessinent. Parce que ce demi-siècle a coïncidé avec l’expérience de l’auteur, qui en a été sur le terrain le témoin, l’observateur et un chroniqueur, jusqu’à être aspiré dans son objet d’étude lui-même par la sentence de mort de Daesh à son encontre, elles revendiquent une interprétation personnelle qui guidera et organisera les faits, mêlant des événements simples qui me paraissent éclairants avec le recul aux scansions de la «longue durée».

Les quatre premières décennies, depuis la guerre d’octobre 1973 jusqu’aux soulèvements connus comme «printemps arabes» qui adviennent en réalité à l’hiver 2010-2011, sont synthétisées de manière généalogique dans la première partie du livre. On y suivra la montée en gamme de l’islamisation du politique, et la spirale du jihad qui envahit peu à peu la planète – à partir de l’année 1979 où la belligérance en Afghanistan, grâce aux boutefeux américains, répond à la révolution iranienne, et aboutira à la chute de l’URSS dix ans plus tard. On y verra les trois phases successives de ce jihadisme qui passera par le 11 septembre 2001, frappant les États-Unis en un retour de manivelle aussi stupéfiant que dramatique – qui marque spectaculairement le début d’un millénaire chrétien auquel se superpose un improbable millenium islamiste. Cette rétrospective se nourrit de la demi-douzaine d’ouvrages publiés sur le sujet, depuis Le Prophète et Pharaon (1984) jusqu’à Terreur et martyre (2008), n’en retenant et organisant que les matériaux qui m’ont paru pertinents pour interpréter les phénomènes contemporains cruciaux survenus durant les années 2010.

Cette décennie paradoxale, objet de la deuxième partie du livre, commence par l’espoir immense des «printemps arabes» de 2011 mais se prolonge par la proclamation de l’«État islamique» de Daesh et la généralisation du terrorisme islamiste jusque sur le territoire européen, s’achevant par la chute du «califat» en automne 2017 avec la reconquête de Raqqa, après Mossoul. L’analyse de cette contradiction – qui voit des soulèvements démocratiques ayant engendré tant d’attentes aboutir à l’horreur absolue de Daesh, d’un côté, et à la remise en selle de régimes autoritaires, de l’autre, tandis que prospèrent États rogues et zones de non-droit – s’alimente des enquêtes et recherches sur le terrain menées des deux côtés de la Méditerranée.

Nourries des questionnements posés dans Passion arabe (2013) comme dans Terreur dans l’Hexagone (2015), elles passent en revue la situation dans les six pays qui ont vécu une « révolution arabe » – respectivement la Tunisie, l’Égypte, la Libye, Bahreïn, le Yémen, et la Syrie –, à laquelle s’ajoutent des considérations sur l’Irak, car c’est à l’articulation entre ces deux derniers États qu’est né et a grandi le monstre Daesh. Grâce à la chute de celui-ci à la fin de 2017, on dispose du recul nécessaire pour appréhender l’ensemble des événements de cette période tragique. Je me suis efforcé de dresser un tableau global d’une masse de faits que nous venons de connaître – ou de subir violemment – au premier degré, d’en tirer les enseignements en inscrivant l’histoire immédiate dans la mémoire longue des décennies précédentes. Le Levant et particulièrement la Syrie, auxquels sont consacrées les pages les plus nombreuses, constitue le cœur de ce livre, tant il me paraît que dans cette région se sont cristallisées et ont été portées au paroxysme les crises qui secouent la Méditerranée et le Moyen-Orient.

On proposera enfin en dernière partie d’interpréter les événements advenus à partir de l’hiver 2017-2018, dans la période qu’ouvrent la chute de Daesh et la défaite annoncée de l’insurrection syrienne, pour prendre la mesure des bouleversements tectoniques dont se précisent les signes avant-coureurs. Ce matériau, dont beaucoup d’éléments ont été recueillis de première main en parcourant l’Afriquedu Nord et le Proche et le Moyen-Orient, doit nous permettre d’imputer au mieux les hypothèses de scénarios qui englobent dans un même ensemble les deux rives de la Méditerranée – pour le meilleur ou pour le pire.

Quelles seront les conséquences pour le futur du jihadisme et du salafisme, de la fracturation du «bloc sunnite» et des bouleversements en cours dans la péninsule Arabique? L’Iran assure-t-il l’hégémonie sur la région d’un «croissant chiite», ou l’affrontement avec l’Amérique de Donald Trump transformera-t-il ses succès en victoire à la Pyrrhus? Quels arbitrages la Russie de Vladimir Poutine, redevenue une grande puissance par son implication dans la question syrienne, fera-t-elle entre des alliés aussi improbables qu’Israël, l’Arabie saoudite, la Turquie et l’Iran? Et l’Europe, qui se retrouve au cœur d’une zone de crise l’affectant au premier chef par sa façade méditerranéenne que traversent terroristes et réfugiés, parviendra-t-elle à surmonter sa passivité et à s’imposer de nouveau comme protagoniste géopolitique? Inhibée aujourd’hui par le blocage de ses institutions, elle assiste impuissante à la poussée centrifuge des partis d’extrême droite comme d’un populisme gauchiste mêlé d’islamisme.

Le désintérêt de la superpuissance américaine, désormais productrice majeure de pétrole et gaz de schiste, pour la région Moyen-Orient-Méditerranée, engagé sous la présidence Obama et confirmé de manière spectaculaire par son successeur Donald Trump, contraint l’Europe à assumer de plain-pied ses responsabilités. Dans cette configuration, la régénération du Levant est un enjeu cardinal. Ayant été privé de ses forces vives après que sa population la plus entreprenante eut émigré vers les rives d’un golfe Persique qui devrait être impacté par la baisse structurelle des cours du brut après les massacres qui ont épuisé les adversaires en présence, la réaffirmation du Levant à l’articulation entre l’Europe et le Moyen-Orient et dans leur continuité mutuelle est l’une des voies à frayer pour éviter un affrontement culturel perpétuant les crises vécues durant les décennies passées. C’est à définir les contours de cette exigence nécessaire que ce livre voudrait modestement contribuer pour construire notre avenir – au-delà du chaos.

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