News - 14.12.2020

Mechichi à Rome : L’impératif de convaincre l’Italie

Mechichi à Rome : L’impératif de convaincre l’Italie

Après Paris, lundi, ça sera Rome, ce mardi après-midi. Sur sa lancée européenne, le chef du gouvernement Hichem Mechichi se rendra dans la capitale italienne à l’invitation de son homologue Giuseppe Conte. La visite sera courte, de moins de 24 heures seulement, mais intensive, comme attendu des deux côtés. En franchissant mardi après-midi le célèbre Palazzo Chigi, siège de la présidence du conseil des ministres à Rome, Mechichi sera accueilli par un chef de gouvernement battant, constamment sur la brèche depuis deux ans et demi, qui vient de remporter un double succès. D’abord, celui de caracoler en tête des sondages d’opinion, avec une cote de popularité toujours en hausse, à plus de 60% d’appréciation, malgré ou grâce aux mesures draconiennes prises pour faire face au Covid-19 et à ses suites. Le deuxième, est d’avoir obtenu en dernière minute et à l’arrachée l’adoption par le parlement de la réforme du Mécanisme européen de stabilité (MES), une grande victoire qui scelle la majorité italienne.

Au menu des entretiens, l’inévitable question de la migration clandestine, l’appui budgétaire et, d’une manière plus spécifique et urgente, le soutien de l’Italie, qui préside désormais le G20, au sein de l’Europe, du FMI, de la Banque mondiale et des autres institutions financières. Sans oublier, le développement des échanges économiques et la promotion des investissements directs. Éclairages

Une ambition italienne

Les succès personnels, internes et européens, de Conte ne l’empêchent pas ainsi que son gouvernement de s’inquiéter de ce qui se passe sur la rive sud de la méditerranée, notamment en Libye et de s’intéresser de très près à la Tunisie. Rome œuvre activement pour une sortie de crise en Libye en espérant y reprendre pied tant pour bénéficier de ses hydrocarbures que pour y obtenir de gros contrats en faveur de ses entreprises. Pour la Tunisie toute voisine, l’Italie entend renforcer sa position de premier fournisseur commercial et développer tant ces exportations que ces contrats d’exécution de projets.

Migration et exécution des projets

Unique ombre au tableau : la question de la migration clandestine qui fait débarquer sur les rivages de Lampedusa des milliers de migrants tunisiens, arabes et subsahariens. Ce ne sont plus que des jeunes qui bravent la mer, de plus en plus de familles avec enfants tentent l’aventure, au péril de leur vie. En reflux, le rapatriement des Tunisiens identifiés, en vols organisés, a porté à plus de 18000 migrants au cours des dernières années, ce qui est au crédit des pouvoirs publics tunisiens.

Renforcement de la surveillance des côtes, soutien au démantèlement des réseaux organisés de traite de migrants, aide au développement et coopération protéiforme soutenue, l’Italie n’épargne aucune voie. Sauf que ce n’est pas assez, vu de Tunis, et ce n’est pas rapide. Si la volonté est partagée des deux côtés, un retard est souvent signalé quant à l’exécution. Rome déplore que Tunis peine à consommer les financement alloués et Tunis, qui y acquiesce tout en arguant le contexte spécifique dans le pays, souhaite cependant diversifier les programmes et accroître les montants, notamment ceux de l’appui budgétaire.

Une dimension stratégique

Sans se focaliser sur la question de la migration ou encore les « questions techniques », l’entretien Mechichi-Conte aura plutôt une dimension stratégique. L’Italie, déjà membre du G7, est depuis ce mois de décembre pays président en exercice du G20 le groupe des vingt premières puissances économiques mondiales, succédant à l’Arabie Saoudite. Elle est aussi un pays incontournable, actif et significatif de l’Union européenne. C’est dire tout le rôle qu’elle peut jouer en faveur de la Tunisie dans ces instances, mais aussi au sein des institutions financières, notamment le FMI, la Banque mondiale, la BERD et la BEI, notamment.

Au moment où la Tunisie cherche à boucler le financement de son budget pour 2021, l’appui de l’Italie est précieux, tant au niveau de l’aide publique en appui budgétaire qu’en soutien auprès de l’Union européenne et des institutions financières. Mechichi aura ainsi la délicate mission de rassurer l’Italie quant à la stabilisation du pays, de lui présenter la vision globale de son gouvernement et les besoins spécifiques indispensables.

Alors que Mechichi s’entretient avec Conte au Palazzo Chigi, le ministre de l’Économie, des Finances et de l’Appui à l’Investissement, Ali Kooli, qui l’accompagne dans cette visite éclair, sera reçu par son homologue Roberto Gualtieri, Ministre de l'Économie et des Finances. En poste depuis septembre 2019, ce redoutable négociateur avait été auparavant pendant cinq ans, président de la commission des Affaires économiques du Parlement européen, un poste hautement stratégique. Lui aussi est à convaincre, arguments à l’appui.

Business as usual

Un troisième round se jouera, mercredi matin, avec les chefs d’entreprises. Le chef du gouvernement recevra le CEO de la société SNAM et d'autres capitraines d'industrie avant de s'entretenir avec une délagétaion de la Cofindustria en présence de la délégation de l’UTICA, conduite par Samir Majoul.

Si Rome n’a pas été faite en un jour, les relations bilatérales entre l’Italie et la Tunisie sont appelées tirer réel bénéfice de cette visite, courte, mais censée efficace.
 

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