Les messages subliminaux du feuilleton براءة
Sihem Bouzgarou-Ben Ghachem - Les messages subliminaux transmis par le feuilleton el baraa (l'innocence) a été décrié, à juste titre, par les téléspectateurs.
Les lois instituées par le CSP, sont implicitement dénoncées : quand le personnage principal évoque la sharia pour imposer le mariage orfi à sa première épouse il-lui dit : باش نعرس على سنة الله و رسوله ! شبيني انا نعمل في الحرام؟
En outre, avant de contracter ce deuxième mariage, Ouannes s’est adressé à l’imam, comme ultime recours, qui lui a accordé son blanc-seing et sa bénédiction ! Par cet acte inconsidéré, on perçoit un rejet des lois positives au profit de la sharia, le rejet de l’exégèse et, surtout, la négation de l’effort humain, puisque le législateur tunisien s’est référé au verset 129 de la sourate Les Femmes, (وَلَنتَسْتَطِيعُوا أَن تَعْدِلُوا بَيْنَ النِّسَاءِ وَلَوْ حَرَصْتُمْ), pour abolir la polygamie.
Par ces simples paroles, et l’évocation du verset du coran le personnage principal, et, par-delà, le scénariste, remettent en cause l’existence même du CSP. Des esprits malléables et influençables s’inspireront sûrement de ces paroles et de ces actes pour justifier leurs attitudes et comportements. Pourtant, l’article 18 du CSP interdit l’union qui n’a pas été contractée conformément à la loi tunisienne, et sanctionne pénalement le mariage coutumier (orfi : la prison et une amende).
Le port du voile: après avoir eu une relation sexuelle avec son amoureux et avoir subi une hyménoplastie la jeune fille s’est voilée. Le voilement de la jeune femme est loin d’être anodin! Le message subliminal que cette scène va transmettre : le voile est le synonyme de la chasteté et de la décence !
Les téléspectateurs ne manqueront pas d’établir une comparaison entre les voilées et les non voilées, par une dichotomie manichéenne qui veut montrer que les filles avec les cheveux dans le vent, souriantes, et épanouies sont des débauchées, des dévergondées qui se permettent de mentir, de commettre des péchés et d’enfreindre les lois de la société ! Alors que celles qui sont voilées, elles sont vertueuses, réservées sincères, franches, loyales et ne tolérant aucune entorse aux lois de Dieu. Dès qu’elle a mis le voile, la nouvelle mariée a été submergée par un excès de religiosité lui faisant éprouver des remords quant à ses agissements envers son époux, la poussant à consulter un imam pour se confesser, lui demander un conseil sur son comportement futur et sur sa sincère repentance!
De plus, l’absence de 'Anis, l’impunité dont il a bénéficié montrent que seule la femme est obligée de subir l’ostracisme social.
Seule la femme est obligée d’assumer les conséquences d’un acte commis à deux !
Seule la femme est coupable de tout acte répréhensible (si acte répréhensible y est).
La banalisation de la violence contre la femme qui doit subir sans broncher, sans protester, sans réagir que son père, son frère ou son mari exerce sur elle une violence physique, morale et économique. La femme est considérée comme une marchandise qu’on vend au plus offrant, contre un lopin de terre, ou contre monnaie sonnante et trébuchante. Et pire, on se permet aussi de marchander, pour obtenir le meilleur prix possible, comme si elle était une propriété qu’on achète et vend à sa guise ! Le pire, c’est un objet dépourvu d’émotions et de sentiments : après avoir été battue comme plâtre, presque défigurée, Baya n’a rien trouvé de mieux que de revenir auprès de son bourreau, se résigner et accepter les piques et insultes de sa première épouse !
La place qui sied à une femme c’est son foyer et rien d’autre ! Elle n’a aucun choix, ni aucun autre rôle à part s’occuper de son ménage, et veiller au bien-être de son mari et sa famille.
D’ailleurs, la seule qui pourrait représenter la femme tunisienne, Chiraz, est délaissée, abandonnée par son amoureux et surtout traitée comme une une dévergondée, une dépravée par le père de ce dernier, simplement parce qu’il l’a vue en bikini.
Le charlatanisme et les charlatans jouent également un rôle prépondérant dans cette fiction qui dit s’inspirer de la réalité des femmes tunisiennes ! La mise en scène d’une blonde plantureuse descendant d’une belle berline de luxe (même si son apparition était furtive) devant la maison du charlatan qui a fourni à Zohra le philtre magique qui fera avorter Baya n’est pas innocent ! Potion qui a eu immédiatement son effet, puisque la jeune femme a immédiatement perdu son bébé !
Comme si, insidieusement, l’auteur de ce morceau d’anthologie voulait confirmer la puissance de ces charlatans dont le pouvoir dépasse celui des médecins et de la médecine moderne ! Et que, en outre, toutes les classes sociales sont touchées par ce phénomène : aussi bien les femmes analphabètes issues des quartiers populaires que celles qui semblent issues d’un milieu dit « supérieur » et habitant les beaux quartiers de la capitale (enfin, c’est ce qui est suggéré par les clichés de la voiture luxueuse et des cheveux blond platine).
Le rôle de la religion : La part du lion revient à ce volet important de ce feuilleton : les premières scènes commencent par un appel à la prière lancé par le muezzin aux premières lueurs de l’aube, un jeune père de famille réveille son fils de moins de cinq ans, qui parle à peine correctement, pour l’emmener avec lui à la mosquée accomplir la première prière de la journée ! Dans une autre scène, on voit Islam psalmodier un verset du Coran et un Hadith qu’il connaît par cœur.
Dans une autre encore, l’enfant a réussi à « convertir » son compagnon de jeu qui, dorénavant, l’accompagnera à la mosquée pour y accomplir sa prière.
Pourquoi avoir choisi un enfant de cet âge et lui faire endosser ce rôle et cette responsabilité ? Simplement (du moins, à mon avis) pour indiquer que la jeunesse actuelle est perdue : elle a été corrompue par les effets de la vie moderne, elle s’est éloignée de la religion, l’espoir d’un avenir meilleur est incarné par la génération qui vient! Le choix du prénom, n’est pas non plus anodin : Islam : sous-entendu, la religion incarne l’avenir, la planche de salut qui sauvera les âmes égarées, les pécheurs et autres impies qui se réfugieront dans son giron et gagneront la grâce divine !
D’ailleurs la dernière scène du feuilleton est, à cet égard, très significative : elle montre le rôle que, dans un futur proche les enfants assumeront une responsabilité salvatrice : Quelqu’un n’a-t-il pas dit en confidence et en substance, à cet oiseau de mauvais augure, venu d’Égypte : « Ce sont leurs enfants que l’on cherche à atteindre, nous n’avons plus aucune prise sur eux, ils sont bel et bien perdus, concentrons-nous sur leur progéniture ! »
Sami El Fehri, par ces clins d’œil répétitifs ne cherche-t-il pas à caresser les islamistes dans le sens du poil ? Malheureusement pour lui, si c’est le cas, it’s too late !
Sihem Bouzgarou-Ben Ghachem
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toujours deux poids deux mesures, sinon, pourquoi vous pas parler de caresse des poils, lors du feuilleton wled moufida, et de ce que ce feuilleton propageait , et même dans baraa" vous n'avez pas remarqué la violence sur les femmes, sur l'enfant le pauvre que des images resteront imprimés à jamais dans sa vie. des acteurs et actrices qui fumaient des cigarettes et narguilés et avec avidité, ce qui influence petit et grand.
Tout en étant contre la polygamie et la violence et très averse aux feuilletons de la chaîne El Hiwar, je déplore les messages négatifs de l’article qui sont explicites à travers les graves faiblesses suivantes: - Premièrement, le manque de différentiation entre les paroles de l’acteur principal ( son message ) et celui que veut communiquer le film. Si l’acteur principal est un cambrioleur, peut –on en déduire que le film soutient le vol ? . - Deuxièmement, le flagrant manque de différentiation entre l’Islam et l’islamisme ou l’intégrisme. Il importe de distinguer entre la religion et les actions et comportements de ceux qui s’en proclament. Qu’y a t-il de grave que l’Islam incarne le futur ? N’est ce pas la religion de la grande majorité des Tunisiens. - et enfin la contradiction entre d’une part vouloir défendre l’émancipation et la liberté de la femme et d’autre part nier la liberté de la femme de porter le hijeb qui n’est interdit par la loi.