Tunisie-France 1-0: L’exploit, à défaut de qualification (Album photos)
Par Mohamed Kilani - Quand la qualification tient à deux conditions simultanées dont l'une est invraisemblable, les Tunisiens peuvent verser dans le rêve ou, selon les tempéraments, dans l'auto-dérision avant le match Tunisie -France. C'est néanmoins la quatrième fois que le Onze national entame la troisième journée en phase finale avec une infime chance de qualification. Consolation ? Loin de là, et c'est pourquoi les joueurs se sont retrouvés dans l'obligation de jouer cette chance jusqu'au bout, tout en se souciant de faire honneur à leur pays.
La France, de son côté, s'est libérée du spectre de 2002 quand, tenante du titre et championne d'Europe, elle avait connu l'humiliation de se faire éliminer au premier tour, sans marquer le moindre but, ce dont Roger Lemerre avait endossé la responsabilité pour atterrir chez nous et nous conduire sur le toit de l'Afrique en février 2004.
L'équipe de Tunisie doit aborder ce match avec une disposition psychologique ambivalente : six joueurs sont nés en France et possèdent, à ce titre, la double nationalité. Certains sont familiers avec des joueurs adverses à travers le championnat français, ce qui peut réduire de l'ascendant des champions du monde. Les changements opérés par Kadri, au nombre de six, sont de nature à secouer toute l’équipe d’autant que les joueurs se valent. L’entame du match révèle une intention constructive et carrément offensive avec un but signé Ben Romdhane, annulé pour un hors-jeu d’une courte main (10’).
Soulagée par l’absence du quatuor d’attaque Mbappé-Dembélé-Griezmann-Giroud, l’équipe tunisienne crut en ses chances et parvint à rivaliser avec assez d’assurance. Mais le manque de punch l’empêche d’inquiéter sérieusement Mandanda, tout heureux de retrouver la titularisation après une longue absence. C’est même la France qui faillit ouvrir le score sur une action très rapide (25’). La réaction tunisienne produit une chaude alerte, annihilée sans peine par le portier (30’). Khazri, mieux en jambe que Msakni lors des deux premiers matches, brille même par son sens de l’organisation, lui qui est souvent adepte des tentatives personnelles tout azimut.
Effectuant un repli de quarante mètres, suivi d’un tir puissant repoussé par Mandanda, il justifie la confiance du sélectionneur (36’). A ses côtés Ben Romdhane et Ben Slimane se sentaient à leur aise en multipliant les incursions, ainsi que Kechrida et Maaloul. Durant toute une mi-temps, l’équipe tunisienne impose à son adversaire une pression sans disposer pour autant d’attaquants de métier portés vers l’abordage. Mais l’animation offensive se poursuit néanmoins avec des attaques massives et rapides comme celles des 41ème et 47ème minutes, procurant même du plaisir aux yeux.
Grâce à son application, la Tunisie boucle la première période avec un nul reflétant une bonne tenue et une capacité à croire encore en ses chances.
La reprise confirme l’ambition de l’équipe. La propension des excentrés à monter en attaque est révélatrice des consignes tactiques. Même Laïdouni attaque franchement au point de frôler l’ouverture du score (52’). Le public, tenu en haleine, joue son rôle et ressent par moments le plaisir de se trouver dans le stade avec le fol espoir de contribuer au miracle. Les scores des deux matches sont de nature à autoriser la réalisation du rêve, encore faut-il marquer ce but suffisant pour les huitièmes. Un but qui tarde à récompenser les efforts de la sélection depuis le premier match, malgré les nombreuses opportunités créées. Et c’est à la 58ème minute que ce but arriva enfin : Khazri engage une incursion solitaire et bat avec métier Mandanda.
Le stade entre en transe et toute la Tunisie du football commence à se projeter dans le second tour, même si l’Australie est parvenue à ouvrir le score au même moment. Aussitôt, Jebabli remplace Khazri, une mesure qui ne manque pas de conforter la confiance de l’équipe. Ce joueur communique d’emblée à ses camarades une autre rage de vaincre, étant au four et au moulin. La France, quant à elle, s’appuie sur l’entrée de Rabiot et Mbappé (63’), Griezmann (74’) et Dembélé (78’), pour résoudre ses problèmes, Dahman ayant été très peu inquiété. Elle parvient à opérer une certaine pression en fin de match alors que les supporters tunisiens, partout, avaient les yeux sur leurs Smartphones, guettant une égalisation danoise.
Le finish français inflige des sueurs froides à la défense comme cet essai de Mbappé (89’). La fatigue aidant et le mental atteint, les joueurs finissent par céder lors des arrêts de jeu. A quelques secondes du coup de sifflet final, Griezmann hérite d’une seconde balle pour égaliser alors que les Australiens fêtaient au même moment leur qualification. Mais la VAR annule le but et permet à la Tunisie de tenir sa victoire. Un moment de bonheur qui ne sera pas évacué de la mémoire.
La défaite devant l’Australie ravive sans doute les regrets du Onze national et son immense public. En terminant à la troisième place avec quatre points, devançant le Danemark, c’est néanmoins un détail à relever. Le mardi 22 novembre au matin, un ancien footballeur international puis entraîneur, âgé de 70 ans, sollicité pour donner son pressentiment à quelques heures du match Tunisie-Danemark répondit sans équivoque : « Inchallah on n’encaisse pas six buts. » A l’issue des trois matches disputés, le bilan est loin des prévisions de ce connaisseur averti. Chacun peut maintenant spéculer à volonté, et un nouveau feuilleton peut commencer après les révélations ahurissantes de Issam Jomaa…
Tunisie : Dahman, Kechrida, Maaloul,Ghandri,Meriah, Talbi, Laïdouni, Ben Slimane (Abdi 83’), Skhiri, Ben Romdhane (Chaalali 74’), Khazri (Jebabli 58’).
Mohamed Kilani
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