News - 12.12.2022

La Tunisie à la recherche de son positionnement stratégique

La Tunisie à la recherche de son positionnement stratégique

Faut-il changer d’alliances, chercher de nouveaux partenaires, trouver des ancrages plus solides et plus bénéfiques ? Le questionnement stratégique se pose à la Tunisie, dans ce nouveau monde qui se façonne. Comment l’aborder ? Qui doit porter cette réflexion globale et la faire aboutir ? Et aurions-nous les moyens de mettre en œuvre les nouvelles orientations ? Autant de questions qui ont bénéficié d’un débat de fond initié par le Centre tunisien des relations internationales (Ctri), présidé par Khemaies Jhinaoui. Une cinquantaine d’experts, triés sur le volet, ont été réunis en conclave, pendant deux jours, mi-novembre dernier, pour réfléchir sur le positionnement stratégique de la Tunisie. Quatre thèmes ont été retenus pour cette première session appelée à se poursuivre en d’autres éditions sur un an : la géostratégie, l’économie, l’énergie, l’eau et le climat, et la sécurité.

La qualité des participants et leur diversité (économistes, diplomates, chefs d’entreprise, anciens militaires, chercheurs universitaires, etc.) a enrichi les débats. La nécessité d’élaborer une vision globale et de réunir en sa faveur un large consensus s’est imposée en filigrane des différentes interventions. Mais, quelle vision ?

Les constats sont convergents. Jadis à l’avance par rapport à tous les pays du Maghreb, la Tunisie n’y est plus. L’indépendance et le développement avaient constitué, sous l’impulsion de Bourguiba, les déterminants, plébiscités, de son positionnement initial marqué par une alliance totale avec les Etats-Unis d’Amérique et des positions sur la question palestinienne, différent de celui d’autres pays arabes. Ben Ali maintiendra le même cap avant de céder à la gestion de dissidences intérieures. La Tunisie sera à la Une en 2011. Mais son dividende démocratique finira par s’éroder. Le pays, tiraillé de toutes parts, semble fatigué, montrant une incapacité à mettre de l’ordre dans ses finances, et donnant l’impression que la démocratie n’est pas faite pour les pays arabes.

La succession des évènements majeurs intervenus depuis 2020 change davantage la donne. La pandémie de Covid, l’inflation, la guerre en Ukraine, la montée du populisme et de l’extrême droite, la dérive autoritaire et l’émergence de nouvelles alliances autoritaires compliquent la situation pour la Tunisie. Le pays s’isole de plus en plus, montre des signes de lassitude, ne suscite plus le même intérêt que lui avaient témoigné de nombreux pays occidentaux, et n’offre plus un projet commun. L’épuisement de la démocratie représentative, l’émergence du populisme et l’entrée dans de nouvelles zones d’influence inquiètent ses voisins du Nord.

Pour prendre le cas de l’Europe, sa principale préoccupation est l’énergie ainsi que les flux migratoires, avec ce qu’ils posent comment question religieuse. Son unique objectif est de se fixer la Méditerranée comme frontières.

Dans notre propre contexte régional, on perd pied en Libye, le Maghreb est en panne, l’Algérie brigue d’autres alliances internationales.

En Tunisie, le système public est enrayé. L’économie s’essouffle et le social est dans l’impasse. L’urgence institutionnelle se double d’une urgence économique et financière. On ne peut pas briguer une place sur l’échiquier mondial sans reposer sur des assises solides. Accéder à une croissance soutenue n’est pas impossible. Mais pour pouvoir nous hisser d’un pays à revenu moyen au niveau d’un pays à revenu élevé, nous devons développer par 11 notre croissance actuelle en une génération, c’est-à-dire réaliser une croissance annuelle de 10% au moins. Se contenter de PME et de start-up ne le permettra guère. Seuls de très grands groupes, internationalisés, et pouvant jouer un rôle de locomotives pour les autres, feront de la Tunisie un acteur significatif.

Trois grands maux au moins freinent, cependant, la relance du pays : un Etat dominateur, un contrat social inique et un développement régional abandonné. Aussi, la Tunisie ne parvient-elle pas à déployer une diplomatie économique (différente de la diplomatie commerciale), et à l’ancrer en épine dorsale du ministère des Affaires étrangères. De même, toute la transition énergétique et celle plus large écologique sont à repenser en profondeur et à activer en grande priorité.

C’est ce débat qu’il convient d’enrichir et d’approfondir. En reprenant dans les pages qui suivent certaines interventions, Leaders entend y apporter sa contribution.

Un premier jalon est posé avec ces journées de réflexion sur le positionnement géostratégique de la Tunisie. Le Centre tunisien des relations internationales qui en a eu l’heureuse initiative a été confirmé dans son choix, par la pertinence des échanges, lors de cette session inaugurale. Il va falloir  persévérer.

Lire aussi

Quels déterminants pour repositionner la Tunisie dans le monde : un intense débat qui manquait

Journées de réflexion : Quel positionnement stratégique de la Tunisie
 

Vous aimez cet article ? partagez-le avec vos amis ! Abonnez-vous
commenter cet article
0 Commentaires
X

Fly-out sidebar

This is an optional, fully widgetized sidebar. Show your latest posts, comments, etc. As is the rest of the menu, the sidebar too is fully color customizable.