News - 18.10.2023

Tunisie: Profession, livreur (Album photos)

Tunisie: Profession, livreur

Devant ce centre commercial de renom à El Manar, une nuée de motos, dotées de caisses de livraison, se fait et se défait à l’heure de pointe. Des livreurs aux aguets s’empressent de prendre les cartons garnis, tout chauds, de les mettre dans leur caisse et d’enfourcher leur engin, faisant vrombir le moteur. Téléphone en main, carte de géolocalisation activée, ils foncent droit vers leur client.

Au cœur de la concrétisation de l’achat en ligne : le livreur. C’est lui qui vous contacte pour préciser votre localisation et l’heure de son arrivée chez vous. Pour les commandes de repas, les délais sont courts et le livreur est en moto. Pour les autres achats, plus lourds à transporter, des voitures sont utilisées et les rendez-vous sont à convenir d’avance.

Dans les quartiers de la capitale, le livreur de repas en moto fait désormais partie du paysage. La petite caisse fixée derrière le siège, ou portée sur le dos, est à l’enseigne de la marque de la plateforme de livraison à laquelle il appartient. Il essaye d’être rapide pour vous livrer, espérant mériter un petit pourboire, et surtout capter une nouvelle livraison à effectuer. La réactivité aux nouvelles commandes est en effet essentielle pour augmenter ses gains. Mis en compétition avec d’autres livreurs, il doit être le premier à cliquer sur la commande qui s’affiche sur son smartphone à partir de l’application, aller au plus vite chez le fournisseur, s’assurer de l’adresse du client, et s’y rendre immédiatement, par le chemin le plus court et le plus rapide. S’égarer en cours de route, c’est faire des détours qui lui seront coûteux en termes de carburant pour sa moto et mécontenter le client, voire rater la livraison. Ses gains en seront pénalisés.

En fait, le livreur travaille en dehors de tout statut, pour son propre compte, en plein dans l’informel et la précarité. Il s’achète lui-même sa moto, qui doit être assez puissante pour monter les côtes, payer les frais de carburant, d’entretien et d’assurance, et s’équiper d’un casque… Il contactera alors une des plateformes de commande en ligne ou l’un de ses prestataires intermédiaires, pour proposer ses services. C’est le prestataire intermédiaire qui sera son vis-à-vis. Parfois, il lui propose un contrat de travail (le plus souvent à durée déterminée), mais, généralement, il le laissera s’organiser pour travailler à son propre compte.

Précarité et risques

Le phénomène n’a pas échappé à l’attention de la fondation allemande Friedrich-Ebert. Elle vient de lui consacrer une étude de cas socio-anthropologique sur les livreurs de repas à Tunis, intitulée : «Jeunes, applications et clients: une sociologie de la livraison de repas en Tunisie», publiée fin septembre dernier sous la forme d’un «Policy Paper». Réalisée à partir d’enquêtes sur le terrain et d’entretiens dans le Grand Tunis, elle apporte des éclairages utiles. Le livreur est essentiellement un jeune homme (80%), d’un âge moyen de 27 ans, et d’un niveau d’instruction ne dépassant pas l’enseignement secondaire (80%). Sans se résigner à l’échec scolaire et au chômage, il se prend en main, s’engage en tant que livreur et consacre toute son énergie pour y réussir.

Les avantages sont multiples : flexibilité des horaires (surtout entre 11h et 15h, puis le soir à partir de 17h), autonomie par rapport à un chef direct, potentiel de gains en fonction de sa rapidité et de sa disponibilité, et opportunités de faire connaissance avec des clients avec qui il pourra nouer de bonnes relations.

Les inconvénients ne manquent pas cependant : la précarité, l’absence de sécurité sociale, les risques d’accidents et autres. Mais aussi de plus en plus la hausse des coûts du carburant, de l’entretien, etc. Avec le risque du vol de sa moto, alors qu’il monte dans un immeuble pour livrer la commande.

Généralement, une course peut rapporter au livreur entre 4 et 7 dinars. Une fois qu’il a livré la commande et encaissé son règlement, il doit verser intégralement le montant perçu à son vis-à-vis dans un compte ou dans un point désigné. Celui-ci lui reversera à la fin de chaque semaine le prix de ses courses.

Le système semble convenir à de nombreux livreurs qui s’y plaisent et parviennent à gagner des montants significatifs. «Un bon livreur, assidu et travailleur, peut gagner facilement 1 200 D par mois, indique à Leaders un connaisseur du dossier. S’il y consacre plus de temps, et se débrouille bien, il peut atteindre 1 500 D, voire 1 800 D. Le sourire aidant et la courtoisie de mise, il sera gratifié par un pourboire du client satisfait de sa rapidité.»

Le statut reste précaire et informel. L’absence d’un cadre juridique qui encadre cette activité et la protection sociale sont pointés du doigt.

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1 Commentaire
Les Commentaires
Citoyen - 20-10-2023 15:16

Un peu dangereux sur les routes !!

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