Quand le peuple force le destin
Personne, à l’intérieur comme à l’extérieur du pays n’a pu prévoir cette révolution, véritable épopée des temps modernes, dont le héros n’est autre que le peuple Tunisien, connu pour son pacifisme.
La première étincelle qui a jailli de Sidi Bouzid a allumé un feu qui s’est vite propagé à travers tout le territoire, prouvant une unité nationale admirable que les historiens colonialistes ont essayé de renier dans le passé, lorsqu’ils prétendaient que les tunisiens étaient une « poussière d’individus ».
Grâce à la prise de conscience de tous les tunisiens, et notamment les jeunes, et à leur sentiment d’oppression et de marginalisation et à la répression dont ils ont souffert pendant des décennies, les masses populaires se sont soulevées et n’ont pas reculé devant la violence de l’appareil policier. Au contraire, ils ont imposé leur volonté, acculant le président déchu à fuir le pays.
Cette révolution a suscité l’étonnement et l’admiration des peuples frères et amis, qui ne s’attendaient pas à ce qu’un petit pays comme la Tunisie réalise ce que les grandes nations, seules, peuvent réaliser.
Le 14 janvier 2011 est une journée décisive, qui fera date, à l’instar du 14 juillet en France.
Ce soulèvement populaire aura, certainement, une répercussion sur beaucoup de pays arabes, dont les peuples sont encore victimes de la même répression ; et lorsque ces peuples deviendront les décideurs dans leur pays, alors seulement le problème palestinien trouvera de lui-même sa résolution.
Le succès des derniers événements en Tunisie a été possible grâce à l’obstination des jeunes et à leur bravoure, lorsqu’ils se sont exposés aux balles réelles et ont pu grâce à la technologie moderne transmettre au monde entier l’image de leur soulèvement pacifique et ensanglantée que la chaine Al Jazeera a retransmis.
Leur mouvement n’a aucunement été endoctriné ni encadré par un parti politique ; c’est un soulèvement spontané, émanant d’un sentiment d’injustice et de l’aspiration à un lendemain meilleur.
Le slogan souvent répété par le système mis en place par Ben Ali, à savoir que « la jeunesse n’est pas le problème mais la solution » a été authentifié aux dépens de ceux qui l’ont lancé sans vraiment y croire. Car en effet, la jeunesse tunisienne a bien couronné l’année de la jeunesse en offrant à son pays un cadeau inestimable celui de la libération.
Si les partis politiques, en tant que tels, ne se sont pas joints tout de suite au mouvement de la foule, les syndicats de base de l’UGTT, quant à eux, ainsi que les avocats, et toutes les forces vives du pays y ont adhéré dés le début et ont favorisé le glissement des revendications, de leur caractère social pour en faire progressivement une exigence politique, celle du départ immédiat de Ben Ali, faisant fi des concessions faites par ce dernier.
L’armée tunisienne s’est révélée être, une nouvelle fois, une armée républicaine qui a refusé de réprimer le peuple et a précipité le départ
de Ben Ali.
Cette armée s’est comportée avec beaucoup de patriotisme et de clairvoyance, contribuant ainsi au succès de cette révolution.
Aujourd’hui la Tunisie vit une période transitoire et décisive de son histoire et voit la mise place d’un gouvernement de salut public qui prendra en mains les affaires du pays en attendant des élections présidentielles qui devront avoir lieu selon la constitution dans un délai ne dépassant pas 60 jours. La question qui se pose alors est de savoir d’un côté, si la formation gouvernementale satisfera l’ensemble de l’opinion publique, et de l’autre côté si la sécurité dans le pays sera assurée assez vite afin de permettre l’organisation d’élections présidentielles dans les délais fixés par la constitution.
L’étape suivante constitue une épreuve éminente nécessitant de la part de tous les citoyens une maturité suffisante pour éviter les règlements de compte personnels et permettre l’application de la loi d’une manière rigoureuse et souveraine.
Notre jeunesse se trouve dans l’attente de maintes réformes dans les domaines : économique, social, et politique, qui permettront de résorber le chômage et assurer le développement des régions intérieures déshéritées, en dotant les conseils régionaux de suffisamment
de fonds, après les avoir, bien entendu, restructurés.
Tous les obstacles qui entravent le fonctionnement normal des partis politiques devraient être aplanis, les comportements de suspicion, ancrés depuis des décennies par un pouvoir répressif, devraient être éradiqués.
Le RCD héritier du parti destourien créé en 1924 devrait effectuer un retour aux sources et un assainissement intérieur, en écartant les opportunistes qui s’y sont incrustés peu de temps après le 7 novembre, qui ont provoqué sa gangrène, le transformant, d’une institution politique militante, en brigades d’acclamations. Ce parti est appelé immédiatement à dissoudre ses structures à tous les niveaux et à limoger les éléments responsables de sa déviation, et ce en instaurant un comité supérieur composé de nouvelles personnalités honnêtes et nationalistes, qui croient vraiment à la démocratie et au principe de l’alternance dans le pouvoir.
Pour donner un nouveau souffle à ce parti il faut commencer par changer son nom, comme par exemple l’appeler le parti socialiste tunisien, car il doit revenir à ses origines populaires et se tourner davantage vers la justice sociale.
Le congrès extraordinaire qui doit être convoqué au courant de cette année pourrait être l’occasion de le repositionner sur la scène politique pluraliste prochaine.
Que cette révolution soit préservée et que la Tunisie puisse avancer, unie et solidaire, sur le chemin de la démocratie.
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