Le patient africain

A la lumière de mes diverses missions en Afrique de l’Ouest durant ces dernières années et des échanges réguliers que j’ai avec les patients africains, il est clair que le secteur de la santé en Afrique représente un potentiel de développement énorme et que la Tunisie pourrait avoir une place importante et privilégiée dans ce développement. La maturité de nos infrastructures, la compétence de notre corps médical et enfin notre positionnement géographique et notre appartenance au continent africain sont autant d’atouts pour que la Tunisie soit le meilleur accompagnateur de ce développement.

Les populations africaines sont des populations majoritairement à revenu moyen, voire faible. Ainsi, une relative faible proportion de ces populations a la capacité de se déplacer pour des soins en Tunisie ou ailleurs.

De ce fait, une solution est à considérer et consisterait à exporter notre savoir-faire sur place. Ce savoir se traduit à deux niveaux : notre capacité à gérer des établissements sanitaires et la compétence de notre corps médical.

L’installation de nos jeunes médecins sur place dans les centres de soins (hôpitaux, cliniques….) a un double effet positif : octroyer des soins de qualité sur place et permettre de rapatrier les cas difficiles et nécessitant des soins spécifiques en Tunisie.

Toutefois, pour que cette solution réussisse, il faut absolument que l’échange soit gagnant-gagnant et que, de ce fait, la Tunisie négocie au mieux l’expatriation de ces jeunes dans le cadre du programme de coopération technique.

Toujours dans le cadre de cette première solution, il n’est pas exclu que des investisseurs tunisiens puissent, en collaboration avec des investisseurs locaux, être à l’origine de la création d’établissements de santé et de capitaliser ainsi sur l’expérience tunisienne dans ce domaine. Cette option permettrait d’asseoir et de consolider notre positionnement dans le secteur et d’avoir un poids encore plus important auprès de la société aisée dans ces pays. Les classes moyennes et aisées des populations africaines jouissent le plus souvent d’une couverture sanitaire auprès des compagnies d’assurances étrangères et le plus souvent françaises en Afrique de l’Ouest. Ces classes privilégiées sont tentées de se faire soigner hors de leurs frontières et plus particulièrement en Occident. Les plus aisés y arrivent et vont en Europe, voire aux Etats-Unis. Les autres (qui sont nombreux en termes de volume) s’orientent vers des destinations plus proches et plus économiques telles que le Maroc et la Tunisie.

Pour que la Tunisie soit une destination de soins médicaux qui draine le plus grand flux, outre son infrastructure sanitaire et la compétence de ses médecins, il faut absolument qu’elle ait une meilleure couverture aérienne des différents pays africains.

Aujourd’hui, le transport aérien est un frein au développement de ce secteur. Il y a peu de vols directs sur l’Afrique. L’installation de la Banque africaine de développement et l’augmentation du nombre des étudiants africains en Tunisie laissent peu de places disponibles en période de vacances, période pendant laquelle on a plus de chances pour recevoir des patients. Nous ne pourrons pas développer le «tourisme médical » sans transport. A tire d’exemple, nous avons plus de 15 médecins en Nouvelle-Guinée qui ne peuvent orienter aucun patient vers la Tunisie, faute de transport. Par ailleurs, les escales ont une double contrainte : l’allongement du temps du voyage d’un passager souvent à mobilité réduite et fatigué et un surcoût non négligeable des frais de transport a fortiori si cette escale se fait en Europe.

S.K.