Trois ans après le départ de Ben Ali en Arabie Saoudite commémoré comme la fête du triomphe de la Révolution commencée le 17 décembre 2010 avec l’immolation par le feu de Mohamed Bouazizi à Sidi Bouzid, la question qui taraude opinion publique et journalistes après la sortie d’Ahmed Chabir, directeur général de la Sécurité militaire à l’époque sur la chaine TV « Attounisia » est : ce 14 janvier 2011, l’ancien président a-t-il fui le pays ayant échoué à contenir des événements qui n’étaient plus sous contrôle ? ou bien a-t-il accompagné sa famille à l’aéroport pour s’assurer qu’elle soit partie pour se mettre à l’abri ? ou bien enfin a-t-il été poussé dans l’avion après qu'il ait reçu des assurances sur son retour au pays, une fois les choses rentrées dans l’ordre ? Les témoignages des uns et des autres peuvent rendre l’un ou l’autre de ses scénarios tout à fait crédibles.
Puis ce qui était considéré comme une « révolution » menée par des jeunes sans leadership était-elle le fruit d’événements qui s’étaient enchaînés et avaient fait tâche d’huile du Sud au Nord et d’Ouest en Est en quatre semaines sans que l’ancien régime ne parvint à les arrêter ? Les événements sont trop récents pour que les historiens s’y penchent de façon rigoureuse. Les journalistes en « historiens de l’instant » font leur travail d’investigation et essaient de faire parler les acteurs de cette période importante de la vie tunisienne et plus tard de son histoire sinon de l’Histoire de l’humanité. Mais à côté du dit il y a plus important le non-dit qui doit être déchiffré sinon décrypyé.
En tout état de cause, la fuite ou le départ de l’ancien président ont épargné à la Tunisie des pertes en hommes et en biens comme ce fut le cas en Libye ou actuellement en Syrie. La probabilité d’un complot interne est très peu crédible car tous les ingrédients pour une explosion populaire étaient réunis en Tunisie et il suffisait d’un détonateur qui fut l’immolation par le feu de Mohamed Bouazizi. La très mauvaise gestion des événements qui s’étaient enchaînés inexorablement avait fait le reste.
Ali Sériati, le directeur général de la sécurité présidentielle a-t-il poussé Ben Ali dans l’avion après lui avoir assuré que sa vie était réellement en danger ? Son fils Samir Sériati invité des radios et télévisions le soutient à qui veut bien le croire tout en affirmant que son père n’avait fait que son travail parce que sa fonction était précisément de protéger la vie du chef de l’Etat en place. Mais en militaire formé à l’école de la République cette histoire de complot dont il est accusé ne pouvait traverser son esprit. Etait-ce un argument pour défendre son père ou était-ce la réalité.
Le procès qui aura lieu devant la justice militaire, si jamais il a lieu, pourra répondre aux questions qu’opinion publique et journalistes se posent.
Raouf Ben Rejeb