Zouheir Ben Jemaa : la vie autrement
De l’hôtellerie où il avait officié pendant plus de 40 ans de par le monde, il n’a gardé que l’amour de la bonne cuisine. Saine, pure et raffinée. Après une longue éclipse dans sa superbe ferme de Medjez El Bab, Zouheir Ben Jemaa, qu'il avait acquise après avoir revendu la chaîne d’hôtels Caravansérail, pousse la porte, un magnifique livre de cuisine à la main. Toujours le même regard brillant, le verbe charmeur et juste une petite barbe poivre et sel. A bientôt 60 ans, le fermier qui a succédé à l’hôtelier se révèle aujourd’hui fin cordon bleu doublé d’un auteur de livre de cuisine. Mais, là aussi, le titre qu’il choisit à son ouvrage rappelle son sens inné de la distinction : «Cuisiner autrement.»
Sacré parcours ! Sacré destin. Son bonheur est immense. Toute sa vie n’a été faite que d’une série continue de concours de circonstances. Matheux, il se destinait à une carrière d’expert comptable et de gestionnaire. Il arrive à Paris, en 1969, découvrant une France non-encore remise de son Mai 68, s’inscrit au CNAM pour préparer le DECS et la révision comptable. L’hiver est rude, sans bourse, il n’arrive pas à tenir longtemps le coup ni à allier petits boulots et cours intensifs. Les yeux humides, il s’en ouvre, en dernier recours à l’Ambassadeur de Tunisie, feu Hédi Mabrouk. Affable et serviable, il lui trouve rapidement la solution : « pourquoi ne ferais-tu pas des études de gestion hôtelière ? Pour cette formation, il y a des bourses disponibles et tu resteras toujours dans ton domaine de prédilection. » Et c’est parti pour lui !
Un déclic déterminant
Dès sa sortie en 1973, Zouheir Ben Jemaa est embauché par le groupe indien Oberoi qui l’envoie à 23 ans, à Bombay, comme Assistant-Manger. La chance lui sourit, lorsqu’il devra assumer l’intérim de son patron, initialement pour quelques jours et finalement pour toujours. L’Oberoi Sheraton Bombay, c’était 500 chambres, 7 restaurants et 1200 employés, dans le pur style british et indien. Zouheir y fait ses premières armes et excelle. Mais, il a d’autres ambitions. Retour à Paris au siège de Sofitel, Porte de Versailles, pour s’occuper de la zone Afrique-Moyen Orient. Fort de son expérience enrichie, il sera ensuite débauché par Holiday Inn, pour étendre sa zone au Pacifique avant d’être basé à Bahreïn.
L’année 1987 sera pour lui celle de grands changements. Il rentre à Tunis, participe à la relance d’une grande unité hôtelière de Zarzis, redécouvre le Sud et tout son potentiel, puis, porté par le nouvel élan qui souffle sur le pays, se lance en 1989 dans l’implantation de son propre hôtel à Nafta. Son ambition est grande, créer, avec des partenaires, une enseigne tunisienne dans les zones jusque-là peu explorées : Tozeur, Douz, Tataouine et monter au Nord, à Tabarka. Un banquier visionnaire, feu Sadok Bahroun, le chaperonnera. La chaîne se monte, Foued Elleuch, en super architecte, redouble de créativité, sans se répéter, pour concevoir des hôtels typiques, fonctionnels et agréables. L’œuvre est exigeante mais la réussite commence à poindre. Pris dans le tourbillon, il s’oublie et se laisse défoncer au travail, jour et nuit. Jusqu’à ce qu’il eut un déclic déterminant.
Quand l'hôtelier devient fermier
C’est au tout début de l’an 2000, en plein passage au nouveau siècle. Zouheir Ben Jemaa se passera en tête, une nuit durant, le film de sa vie, le rythme de son quotidien l’acharnement au travail, et la course effrénée qui ne lui laisse aucun loisir, aucun moment de respirer et de se ressourcer. Sa décision est prise : il se recentre sur lui-même et décide de s’aménager de nouveaux horizons. Petit à petit, il commence à se désengager de l’hôtellerie, parvient à décrocher une ferme de 88 ha, à Medjez El Bab et entend s’y consacrer en partageant sa vie entre son grand hobby le Golfe et sa passion l’agriculture. Vivifié par l’air frais du Nord, il se retrouve aujourd’hui avec 8000 pieds d’olivier et autant d’agrumes, tirant lui-même son huile, l’une des meilleures et transplantant dans la région de Béja, la magnifique orangeraie du Cap Bon. L’hôtelier devient fermier : l’âme n’en est que plus épanouie. Son bonheur est de promener en calèche sa petite fille chérie Aïchoucha entre oliviers et citronniers...
Avec des produits frais, au goût exceptionnels et de bonne qualité, Zouheir Ben Jemaa profite de son temps libre pour faire la cuisine. Ses amis découvrent alors ce don inné, longtemps caché et savourent avec délices ses merveilles. A force de lui demander la recette, il finit par la consigner, puis la dupliquer et enfin par l’éditer. Son ouvrage « Cuisiner autrement » vient juste de paraître. Fidèle à son caractère, Zouheir a toujours été « autrement ».
- Ecrire un commentaire
- Commenter
Trés bel article qui me rappelle beaucoup de souvenirs personnels.Bravo et felicitations pour "Cuisiner autrement",dans l'attente de feuilleter ce livre et profiter de ses recettes. Bravo Zouheir et que dieu te préserve Aichoucha et tous les tiens
Et moi qui croyait bien le connaître....finalement je ne sais rien de mon ami.Zouheir est un être généreux à l'image de sa cuisine. Il me tarde de posséder son livre et de réaliser ses recettes. Une amie cuisinière de France
Un article qui résume le parcours d'un grand Monsieur dont on a été, dont nous sommes et dont nous resterons toujours très fiers. Bonne continuation... et toute ma curiosité tourne autour de ton prochain chantier!
il aura certainement une récompense divine pour le partage de ce don et ce savoir faire tant caché !
un grand bravo et bon courage
Et oui! Il a toujours été et il restera toujours "autrement". Je suis très fière d'avoir un oncle comme lui.
Bravo Si Zouheir Je découvre encore en vous de nouveaux talents dissimulés. Bon courage et en avant. Que le bon Dieu vous préserve Amitiès Monji MSALLEM
Le parcours de mon grand frère Zouheir BEN JEMAA est exceptionnel et ne peut laisser personne indifférent. On apprend toujours de ce grand Monsieur. C'est l'art de bien faire. Bravo Si Zouheir pour tout ce que tu fais et bonne continuation
Pour cuisiner autrement il faut vivre autrement;cet article montre une vie autrement à ceux qui ne vous connaissent pas ;le livre nous montrera comment cuisiner autrement !!! Bravo notre Jean Pierre coffe.
Je connais très bien Zouheir Ben Jemaa pou l’avoir côtoyé pendant de longues années et dont j’apprécie le parcours fait de philosophie, de poésie et de créations. Après avoir été l’hôtelier autant innovateur qu’incompris, Zouheir s’est révélé l’agriculteur passionné et le golfeur chevronné. Le voilà aujourd’hui l’artiste chef-cuisinier : son livre « cuisiner autrement », loin d’être une simple collection de recettes, nous fait savourer une gastronomie faite de passion, d’amour et de talent. Merci Zouheir pour ce cadeau qui rehausse la gastronomie en Tunisie... Et à bientôt avec une autre révélation.
Cher si Zouheir, Je découvre votre magnifique parcours, bonne continuation. On s'était connus, lorsque j'était à Doremail. A bientôt
CUISINER AUTREMENT La bibliothèque de l’art culinaire vient d’être enrichie par la parution d’un excellent ouvrage. Il a pour titre « Cuisiner autrement » et il est entièrement consacré a un ensemble de plats typiquement à la méthode de Zouhayr mais dont les modes de préparation et de présentation épousent parfaitement le présent, et aspirent à une internationalisation de ces plats. L’auteur de cette œuvre n’est autre que M. Zouhayr Ben JEMAA ; doté d’une plume prodigue qui conférait à ses écrits une force de référence, il appartenait à la famille des hôteliers avant de quitter cette profession pour se consacrer à la mise en valeur d’une exploitation agricole. Son succès dans ce domaine démontre bien qu’il s’agit d’un homme aux talents multiples. Par la qualité d’impression qui fait honneur encore une fois à la Maison SIMPAR, par les magnifiques illustrations des mets proposés aux fins gourmets et aux professionnels de l’art culinaire, ainsi que par l’heureux choix des recettes qui y sont présentées, ce livre est franchement captivant et mérite qu’un large écho lui soit fait auprès des restaurateurs, des hôteliers et des ménages. En un mot, je me dois de saluer cet ouvrage qui est une véritable merveille et qui constitue un sujet de fierté, non seulement pour la restauration et l’hôtellerie tunisienne, mais également pour la Tunisie, car le tourisme y est depuis plus d’un demi-siècle un secteur vital pour la croissance économique et le développement social, et la composante culinaire s’inscrit parmi les activités essentielles de ce secteur. Mounir BEN MILED
Si Zouheir a former aussi tout une generation des jeunes hoteliers, ou il les a presenter ses conceils,et son assistance. Merci pour l'article qui me rammene a un souvenir de mon debut de carrier, et je serrai toujours reconnaisant pour lui.
Ben je veux dire bon courage pour cet homme, je connais son hôtel dans la ville de Nefta dans laquelle j’ai vécu 3 ans ,ainsi que le niveaux de responsabilité qui porte tout ses personnel, personnellement je connais cet homme de loin mais il est un ami a mon père qui la côtoyé pendant son travaille a Nefta , vraiment j’ai bien aimer son parcours universitaire et ses sacrifices qui sont certainement ses clés du réussite, entre un hôtelier puis un fermier et un auteur et surement un bon cuisinier c’est un chemin vraiment exceptionnelle pour un homme bien cultivée et sait bien ce qui entrain de faire donc un leader.
Cher Zouhair, tu nous étonneras toujours.Un grand bravo.
un ami qui a beaucoup compté pour moi , on voulait refaire le monde I J ai visité sa ferme en 1995 ; il venait de l acquérir et me parlait de ce qu il révait d en faire entre une visite aux lapins à qui il voulait changer la vie , et les pieds de vigne qu il venait d importer d Italie il m a prlé de ses projets et de la"" tentation de Venise"" qui l interpellait déja je suis très heureux de voir qu il a la peche et qu il a réalisé ses reves a bientot l ami je rentre en tunisie après 15ans et je viendrai te saluer dans ton paradis farid jeddi