Jusqu' où iront ces fauteurs de crises?
La situation de crise à répétition que nous traversons ne sera pas sans conséquences sur l'histoire de la Tunisie. On risque de la payer très chère. Elle n'est pas normale, prévisible, naturelle. Cette période n'est pas une période comme une autre, elle est, au plan social, le stade terminal d'une maladie chronique (l''anarchie ) contractée depuis belle lurette et jamais soignée et au plan sécuritaire un enlisement effectif et complet de notre pays dans un bourbier infernal. Elle a été rendue possible par l'inconscience et la passivité de quelques dizaines d'individus. Ceux-là avaient et ont toujours les moyens de faire quelques choses pour stopper cette dérive suicidaire mais ils ne l'ont pas fait.
Mais, à vrai dire, chacun de nous a cassé le pays ou la révolution à sa manière : dans sa morale, son moral, sa mémoire, sa dignité, son éducation, son économie, bref dans sa globalité soit exprès soit par ignorance .
Sans pérorer sur le " pourquoi " et le " comment " de nos échecs, on retient seulement que nous n'avons pas su identifier ce masochisme qui nous guide dans cette quête de la régression dans la plupart des aspects de la vie quotidienne. Nous ne savourons le plaisir que si nous humilions ou écrasons les autres ; nous nous empoisonnons mutuellement la vie de l'aube au crépuscule. Nous sommes devenus, ex abrupto, des égos inconciliables.
Il est clair que la TUNISIANITE, qui s'est forgée avec le sang des Martyrs de la lutte pour la libération et celle plus récente pour la dignité et la démocratie, s'effiloche à vue d'œil.
Peut - on voir surgir de cette situation un collectif soudé, un ensemble uni , une nation fiable et durable ? Non, plutôt un peuple en vrac, sans projet commun, sans boussole, sans raison d'être, prêt à toutes les aventures talibanes ou kalifales .
Avons-nous besoin de ces multiples crises qui sont venues se greffer sur la situation économique déjà chaotique ?
Cette crise générée par le projet de réconciliation économique montre sur l'échelle de Richter de la vie socio-politique que le risque de séisme a atteint la côte d'alerte maximale et que les ferments d'une rupture irréversible existent réellement.
Il y a pire, le courant islamiste fomente une autre réconciliation, à l'algérienne, celle avec les repentis terroristes. Pour l'instant, on en est au stade de la rumeur. Mais en Tunisie, généralement, on "rumérise" pour mieux passer la pilule. On rumérise pour mieux désinformer et on laisse la rumeur enfler pour semer plus de troubles et récolter in-fine le fait accompli. De toute façon, c'est une nième crise qui pointe à l'horizon .
S'il n'y avait que cela !
Faut-il rappeler qu'un courant dit "mahabba" mijote lui une réconciliation qui consiste à amnistier la bande des trabelsi et les pro-Ben Ali ! !
Face à ces tentatives controversées de réconciliation, se dresse le courant des gauchistes qui lui croit qu'il n'y a rien à espérer, tout est noir, tous les clignotants sont au rouge, les horizons sont bouchés et le sol s'enfonce sous nos pieds .
Rajoutant une couche à cette dépression généralisée , la presse nationale exhale à longueur de manchettes des lendemain catastrophiques.Si cette presse est dans son rôle de grossir les traits et d'attirer l'attention des responsables, c'est une véritable tornade de pessimisme qui se saisit du pays au point de mettre tout le moral de la société en berne .
Avons-nous besoin de ces piètres acteurs politiques qui distillent un discours défaitiste et entretiennent de véritables laboratoires à crises ?
Il est clair qu'ils cherchent des alibis pour s'insurger ou s'attaquer de front contre le Pouvoir faute de ne pouvoir faire partie ou pour d'obscures raisons dont ils ne voient même plus l'utilité d'en parler publiquement.
Peut-on voir une TUNISIE autrement que ce qui est sciemment présentée par ces fauteurs de crises à répétition ?
Au rythme où vont les choses , on est tenté de croire que le pays s'en va à vau- l'eau à moins que réaliser des ablations in vivo dans le corps de la société ou alors appliquer, ne serait-ce que dans son esprit, le proverbe suivant:
Le clou qui dépasse appelle le marteau
Il s'agit d'un proverbe japonais qui a son équivalent arabe mais plus cruel puisque le sabre remplace le marteau ( EL Hallej ) .L'image du coup de marteau sur la tête du clou est plaisante et vraie au sens propre. Le menuisier, le charpentier, le cordonnier, le maçon, le bricoleur ect..le font quotidiennement et à bon escient. Mais la stratégie de chasse du "clou qui dépasse" a pratiquement disparu du monde civilisé. Chez nous elle était le label, la marque déposée de l'ère précédente. De nos jours, les clous qui dépassent dans l'édifice tunisien ce sont des clous rouillés, pourris qui ne devront pas être enfoncés avec un marteau mais arrachés avec un arrache-clou pour ne pas contaminer l'édifice entier.
Mais enfin auprès de qui peut-on se plaindre de cet attentat contre l'intérêt du pays ?
Auprès de Dieu ? Il faudra attendre la fin du monde pour connaître notre destin.
Auprès de l'armée comme il se fait ailleurs et pas très loin ? Celle-ci est très disciplinée pour se fourvoyer dans les marécages politiques.
Auprès du premier magistrat du pays? Il est le maître d'œuvre de cette polémique de réconciliation économique
Des lors, s'il n 'y a rien à attendre dans l'immédiat du ciel, si l'armée reste muette, si le premier magistrat n'est pas un recours mais la source du problème, il reste l'ultime solution qui est nous-même, le peuple qui selon les termes de la constitution en vigueur est le détenteur de la souveraineté nationale.
Mais si cet ultime recours s'avère inopérant, alors il faut se préparer à faire comme l'émir Bouadil après la perte de son royaume en Espagne, Grenade en 1492 : " Pleurer comme une femme ce qu'il n'a pas défendu comme un homme " et les mots sont d'une femme, sa mère .
Mohamed Kasdallah
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