Opinions - 19.05.2016

Lettre ouverte au Ministre des Affaires Sociales et à la Direction de l’UGTT

Lettre ouverte au Ministre des Affaires Sociales et à la Direction de l’UGTT

Nous avons entendu parler  que le Gouvernement envisage de prendre certaines mesures pour limiter le déficit abyssal des caisses de retraite et particulièrement celui de la CNRPS.

Au nombre de ces mesures figurerait la réduction des pensions de retraite.

Si une telle mesure portant atteinte aux droits acquis était prise, ce serait là une mesure inacceptable pour les retraités et surtout pour les foyers où seule une personne travaille.

Du jour au lendemain ce serait une chute de leur niveau de vie à la fin de leurs jours.
Certes, il y a les sans emplois et ceux qui ne sont pas bien rémunérés mais il y a aussi de hauts cadres qui ressentent la réduction de leur pouvoir d’achat et sont amenés à réduire leurs trains de vie en se privant de certains besoins essentiels pour eux et pour leurs familles.

Ceux qui échappent à ce rouleau compresseur ont eu la chance de gravir les échelons plus rapidement grâce à leur « compétence », peut être, les « services rendus » et les « parrainages ».
Ceux qui gagnent  facilement 30000 dinars par mois, un peu moins, un peu plus, ne  ressentiront pas l’effet des mesures de réduction de leurs retraites, c’est certain.

L’état dans lequel se trouvent le secteur  bancaire, d’une manière générale, montre, si besoin est, que l’homme qu’il faut n’a pas été à la place qu’il faut. Le système de rémunération dans ce secteur devra être revu et corrigé pour diminuer les écarts patents et insupportables.

Je connais un Directeur Général (sans fonction), retraité depuis 13 ans, qui n’arrive pas à renouveler sa voiture et garde sa petite cylindrée achetée à crédit depuis 2000 ! Il ne peut accéder ni à la voiture populaire ni aux autres voitures !

Pour maintenir son train de vie accepteriez-vous qu’il songe à  vendre sa villa (comportant un rez-de chaussée) pour l’échanger contre  un logement dans un quartier populaire pour renouveler sa voiture ?

Au nom de la solidarité sociale l’Etat ne peut porter atteinte, d’un trait de plume, à la pension des retraités qui ont servi loyalement ses institutions et n’ont pas eu ni l’idée, ni le temps, de créer d’autres sources de revenus, occupés à servir.

L’Etat doit savoir, et on est tous là pour le lui rappeler, qu’il est le seul responsable du déficit des caisses et doit, par conséquent, assumer  ses responsabilités.

Je ne divulgue  pas de secret en affirmant que la question du déficit des caisses de sécurité sociale a été étudiée, en long et en large, par des commissions interdépartementales et des CIM  mais aucune mesure n’a été prise à temps pour limiter la dégringolade des déficits.

Aujourd’hui, le Gouvernement songe à réduire, par voie unilatérale, les pensions des retraités qui ne sont pour rien dans ce déficit ! C’est là une solution de facilité et de surcroit injuste.

Un de nos dictons ne dit-il pas  que la tête du chauve est proche de Dieu ?

C’est l’Etat, avant le 14 janvier 2011 et après cette date, qui a manqué de courage et de compétence  pour prendre, à temps, les mesures qui s’imposaient.

Pourquoi voulez-vous que le retraité fasse les frais de cette mauvaise gestion, passible, au moins, d’une sanction politique?

Il y a bien d’autres solutions que l’Etat devrait prendre plutôt que de se rabattre sur la réduction des retraites. 

Il ne devra pas le faire unilatéralement mais par voie référendaire car le premier intéressé aura le droit de choisir ce qu’on lui propose .Ce n’est pas une affaire de mesure réglementaire ni même de loi. Il va sans dire que les organisations salariales auront aussi leur mot à dire !

Le salarié ne peut plus accepter d’être le dindon de la farce, prêt à être plumé à chaque fois.

Certes, l’Etat s’est engagé sur la voie de la réforme fiscale dans la loi des Finances pour 2016 mais ce sont là des mesurettes et tous les experts en fiscalité s’accordent à dire que l’Etat peut faire plus,mieux et plus vite, s’il prenait le taureau par les cornes.

Il y a aussi des entreprises qui ne paient qu’une partie des cotisations à leur charge. Qu’attend l’Etat pour recouvrer d’abord ses créances ?
Enfin, voilà bientôt cinq ans que l’économie peine à redémarrer avec toutes les conséquences néfastes sur les finances de l’Etat, et  par ricochet, sur les  ressources des caisses sociales vu la diminution des cotisations alors que le nombre des retraités augmente.

Que fait l’Etat de tangible  pour que l’économie redémarre enfin ?

La résorption du déficit des caisses passe, essentiellement, par le redémarrage de l’économie, la bonne gouvernance, la réforme urgente de la fiscalité et la  révision d’un système de répartition qui a montré ses limites en le confortant par une dose de capitalisation nécessaire, par ailleurs, au développement du marché financier.

Si l’Etat tient à inclure le remodelage du mode de calcul des pensions, il se doit de respecter les droits acquis des retraités bénéficiant déjà d’une pension car ce n’est pas à cet âge qu’il est possible de pallier au manque de ressources générée par une réduction drastique des pensions.

Si le salarié savait  dés le départ que sa pension ne devrait représenter que 50% de son dernier salaire, il aurait  pris ses précautions.Maintenant c’est trop tard.
Dans toute réforme urgente à envisager, le montant des pensions servies est une ligne rouge à ne pas franchir.

A bon entendeur salut.

Mokhtar El Khlifi

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