News - 27.06.2016
« Comment l’Initiative Caïd Essebsi va réussir » !
"Mort-né ! Les sceptiques qui n’avaient pas cru à l’aboutissement heureux de l’Initiative du président Caïd Essebsi pour la formation d’un gouvernement d’union nationale risquent d’en avoir pour leurs frais". C’est ce qu’on affirme dans le sillage des neuf partis politiques et trois organisations nationales qui ont adhéré au projet et s’apprêtent à acter leur accord. Dernière ligne droite, avant le choix concerté (ou plébiscité) du chef du gouvernement, l’approbation du programme du gouvernement.
L’agenda est plus précis : remise ce mardi matin par le secrétaire général de l’UGTT au président de la République de la note de propositions de la centrale syndicale, réunion de synthèse, ce vendredi, concertation avant l’Aïd au sujet du chef du gouvernement avec en option la reconduction d’Habib Essid ou la désignation de son successeur. Accord final et passage à la séquence 2 : négociations pour la formation du gouvernement... Séquence 3 : investiture (lors d’une session parlementaire extra-ordinaire, prestation de serment et passation... Eclairages.
Le changement est majeur. On ne parle plus d’un gouvernement d’union nationale avec impérativement la participation de l’UGTT et de l’UTICA, mais d’un programme de gouvernement, consensuel, dûment négocié et accepté par tous. On adhère donc au Programme, sans pour autant participer nécessairement au gouvernement.
La plupart des partenaires de l’Initiative avaient remis leurs propositions et les groupes de travail ont travaillé sur les thématiques retenues. Il ne restait plus qu’à recevoir le document de l’UGTT. Cette note est désormais prête et Houcine Abassi ira la remettre officiellement ce mardi matin au chef de l’Etat. Des sources proches de la centrale syndicale révèlent à Leaders qu’il ne s’agit point d’un inventaire de revendications, mais d’une vision globale d’avenir. Reste à savoir si l’UGTT accepte – et respectera– une réelle trêve sociale mais aussi serait-elle en mesure d’envisager un report des augmentations salariales dans le secteur public, déjà signées pour 2017 et dont le montant avoisinerait les 2.2 milliards (oui milliards) de dinars.
La note de l’UGTT vient clore le processus programmatique, permettant ainsi d’élaborer une synthèse générale qui servira de base à l’Accord de Carthage. Ce « pacte » dont la dénomination précise n’a pas été jusque-là convenue, sera le cahier des charges du nouveau gouvernement. Celui qui sera chargé de former le futur cabinet n’aura qu’à l’appliquer, tout en bénéficiant du soutien des signataires.
Habib Essid ou son successeur
Lorsqu’on interroge les animateurs de ce processus si l’actuel chef du gouvernement, Habib Essid sera reconduit ou non, leur réponse est à deux tours. « Le premier, confient-ils, est de savoir s’il souhaite rempiler, et s’il se sent en mesure d’appliquer ce programme. Le second est de recueillir l’assentiment des signataires. Dans la négative, c’est au président Caïd Essebsi d’avancer un nom. »
Le mode opératoire est clair : « accord sur un programme, probablement ce vendredi, sondage pour ce qui est d’Habib Essid, durant le weekend, puis décision, début de semaine, de toute façon avant l’Aïd », insiste-t-on.
Trois processus à lancer de suite
S’ouvre alors la séquence habituelle de Dar Dhiafa, avec les incontournables consultations. « Cette fois –ci, précise un connaisseur du sérail, celui qui dirigera le futur gouvernement aura la tâche plus facile : le programme est ficelé, l’architecture générale du gouvernement quasiment faite, il ne lui reste qu’à lancer de suite trois processus. Le premier est la négociation avec les signataires du nombre de sièges qui seront attribués à chacun puis, les ministères précis et enfin les personnes. Tout compte fait et déjà engagés dans le programme de gouvernement, ils finiront par accepter même s’ils négocient âprement. Deuxième processus, le programme des 100 premiers jours : que faut-il faire au juste ? Troisième et dernier processus, et non des moindres, l’audit de la situation surtout financière.
Terrorisme et effondrement des finances publiques
Si ce programme se déroule comme tel il est décrit, ce qui n’est guère impossible, Béji Caïd Essebsi aura réussi son coup et restauré son leadership politique. Quittant sa zone de confort pour prendre cet audacieux pari qu’il a fini par tenir, il reprend la main sur le paysage politique et donne du sens à la première moitié de son mandat. Les menaces restent cependant fort dangereuses : le risque du terrorisme, impondérable, bien que de mieux en mieux géré s’accompagne d’un risque de détérioration aggravée des finances publiques, voire d’un effondrement éclair. Sans être alarmiste, mais aussi sans les minimiser, ces deux grands dangers s’avèrent fort menaçants. Le nouveau gouvernement, une fois passée l’euphorie de la désignation, sera confronté à cette dure réalité. Peu importe le nom du locataire de la Kasbah, c’est sa capacité à endiguer ces flots et redresser la situation qui compte le plus.
Quant au président Caïd Essebsi, il n’aura point de répit. Quelques jours avant d’accéder à Carthage, il avait assigné, dans une tribune libre publiée sur le Washington Post le 26 décembre 2015, à son mandat présidentiel, trois grands objectifs : la démocratie, les régions, la jeunesse. Son bilan sera très attendu.
Taoufik Habaieb
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