Une Tunisie la tête haute face à la Covid-19: Les dix morceaux de bravoure
L'écriture de cet article n’a pas été une tâche facile. J’ai dû esquiver à maintes reprises les sentiments de fierté pour garder mon objectivité.
La pandémie de coronavirus a révélé la fragilité de nos systèmes économiques, sanitaires, politiques et a dévoilé la perniciosité de l'être humain à sa planète.
Un peintre de mon imagination a immortalisé les moments forts de cette pandémie avec des tableaux ironiques:
• La planète, Terre blessée qui remercie la Covid-19 pour la baisse historique de la pollution,
• L'économie mondiale qui s'avère aussi fragile que la flamme d'une chandelle,
• Le duel éternel entre les pays trouvant sa vocation dans tout événement perturbant la routine planétaire.
On s'aperçoit, aujourd'hui que, malgré nos prouesses scientifiques, l'homosapiens après des millénaires de sa création, demeure toujours fragile face aux aléas de la nature.
Mais dans tout cela, un faisceau de lumière illumine, de la pointe septentrionale de l'Afrique, les amazighs, le royaume de Alissa et Hannibal, la terre de Ibn Khaldoun : La Tunisie.
La Tunisie a établi son plan de lutte contre le virus de Wuhan très tôt, par une belle nuit de janvier. Malgré une transition gouvernementale, en cours, la continuité d’activité a été assurée et la passation s’est bien effectuée.
La Tunisie compte parmi les pays qui ont enregistré le plus faible nombre de patients atteints et morts par le virus [1051 cas confirmés, 48 morts ; source : Observatoire National des Maladies Nouvelles et Emergentes Tunisie, le 27/05/2020].
Malgré un trafic intense avec l'Europe, des moyens réduits et des tensions politiques internes, la Tunisie a réussi son défi et la voilà, déjà debout, et prête à contribuer à l'éradication de la pandémie.
I - Les dons
Dès l'annonce du premier cas de coronavirus à Gafsa, au sud du pays, de nombreux tunisiens se sont précipités pour aider très généreusement de partout dans le monde. Les dons des pays amis se sont multipliés.
Des pousses-seringues de l'Allemagne, des respirateurs de la France, du matériel de protection de la Chine, des cagnottes des Pays de Golf... Un téléthon a été organisé et a récolté une somme historique en un temps record, témoignant de l'engagement éternel envers ce petit pays. En deux mois, des unités spéciales Covid-19 ont été construites, des services d’urgence et de réanimation ont été équipés.
La première unité Covid pour hospitalisation traditionnelle et de réanimation construite par des hommes d'affaires au CHU de Sahloul Sousse.
II – Les Rapatriements
La Tunisie est l'un des rares pays qui a rapatrié tous ses citoyens de tous les coins du monde, USA, Thaïlande, Europe, Vietnam…
Les rapatriements étaient gratuits et pris en charge par l'état. Cette promesse a été faite et respectée par le gouvernement et l'armée tunisienne. Profitant des vols aller, des citoyens du monde entier ont pu rentrer chez eux : vingt-cinq citoyens indiens, à titre d'exemple.
Photo de rapatriement des Tunisiens par un avion militaire
III – Le Dépistage Et La Transparence
Le dépistage a été une réussite en Tunisie. Nous avons été classés parmi les dix premiers systèmes dans le monde dans l'efficacité du dépistage ciblé. Ce dispositif a réussi grâce à une logistique très efficace de traçage des malades atteints et des personnes ayant eu un contact avec eux, tout en respectant leurs vies privées.
La Tunisie demeure l'un des rares pays du tiers-monde à avoir partagé ses statistiques avec l'OMS pour l'analyse initiale de la propagation de l'épidémie. Le laboratoire dU prix Nobel de médecine, le docteur Charles Nicolle, a rapidement décodé l'ARN du virus et a publié les résultats pour contribuer à l'analyse de l'évolution de son génome en Afrique.
Le docteur Tedros Adhanom, président de L'OMS, a remercié la Tunisie pour avoir partagé son plan de prévention en toute transparence.
Source: Our World In Data Tweet du président de L'OMS
IV - La concertation et l’initiative
L'un des moments les plus marquants de cette épidémie a été une réunion organisée par le ministre de la Santé en exercice, le docteur Abdellatif Elmekki avec les anciens ministres pour un "brainstorming", chacun se départant, pour l’occasion, de sa casquette politique. Tout expert reconnu a eu la possibilité d'exprimer son avis, d'où la pertinence des initiatives tunisiennes. La Tunisie semble avoir été parmi les premiers pays à avoir anticipé des coups à l'avance de la Covid-19.
La Tunisie est à l'origine du concept de confinement obligatoire de tout arrivant sur le sol tunisien, décision appliquée depuis le 14 mars. Cette décision a été prise en concertation entre les experts en médecine, les experts en sociologie, les politiciens ainsi que la Chambre d'hôtellerie qui a proposé l'idée géniale de confiner gratuitement les arrivants dans les chambres d'hôtel. Une idée qui a probablement sauvé des milliers de vies en Tunisie.
Réunion des sept derniers ministres de la santé au début de l'épidémie
V - L’intelligence artificielle
Les ingénieurs tunisiens, connus par leur haut niveau de compétences, ont eu l'ingéniosité de créer les deux prototypes robots dont le concept a fait le tour des réseaux sociaux et des grands journaux : le robot policier et le robot médecin.
Ces robots policiers assuraient les patrouilles dans les ruelles de Tunis pour le contrôle des motifs du déplacement. Le robot médecin était utilisé dans l'unité de référence Covid au CHU Abderrahmane Mami pour orienter le premier interrogatoire clinique des patients suspects.
Robot Covid Robot policier
VI - La responsabilité
Dés l'annonce du confinement, le gouvernement tunisien a rapidement mis en place une stratégie d’aide sociale à l’intention des catégories sociales susceptibles de ressentir le plus durement les impacts l’épidémie Covid-19, passant du chômage partiel au report du paiement des prêts bancaires.
Des dons de nourriture ont été acheminés à de nombreuses familles sur tout le territoire tunisien. Kais Said, le président de la République en personne, a prêté main forte, au sens propre du mot, pour garantir un acheminement rapide de ces aides aux familles les plus nécessiteuses.
Les responsables tunisiens n'ont pas hésité, dès l'atteinte du 10è cas avéré, à sacrifier l'économie pour mieux garantir la santé de leurs citoyens ; tout à fait conscient des répercussions prévisibles sur leur mandat au pouvoir mais aussi des difficultés que va engendrer cette prise de décision. Seulement, leur avis à tous était unanime : la santé avant tout.
Le président de la république tunisienne participant à l'acheminement des aides sociales
VII - Les médias
La communication, en Tunisie, a constitué un point fort de la gestion de cette épidémie. Les chaînes radio-et télévisées ont multiplié les points « infos Covid-19 » et n'ont pas hésité à encourager et soutenir les décisions comme à critiquer et dénoncer les défaillances. La chaîne Watanya a préféré les spots d'information des gestes barrière, à la publicité très rentable surtout au cours du mois de Ramadan. Les journaux électroniques ont ouvert leurs pages aux médecins pour s'exprimer et orienter les citoyens. Le rôle joué par les medias tunisiens dans cette épidémie a été la motivation du citoyen à défendre sa liberté.
Un message qui a été largement partagé sur les réseaux sociaux tunisiens contenant les conseils de distanciation physique.
VIII - Le citoyen
Le civisme des Tunisiens, au cours de cette épidémie, a été la preuve que la Tunisie demeurera toujours une exception. Dès l’annonce du confinement, les citoyens s’y sont appliqués en limitant au strict minimum leurs déplacements, en se lavant les mains dans les stands publics mis en place par le ministère de la Santé et en portant obligatoirement un masque. Le tunisien a prouvé son niveau exemplaire de civisme et de savoir vivre.
Un autre fait s’est rapidement imposé au cours de cette épidémie : Une remise à l'honneur sur les plans social et médiatique de la science et des scientifiques et de toutes les branches médicales sans exception qui ont repris la parole et l'initiative et capté l'attention et l'intérêt des citoyens et ont jouit de leur totale confiance ce qui a beaucoup facilité la tâche des gouvernants et des politiques dans la légitimation de l'application des décisions prises.
Fermeture des mosquées et interdiction de la prière en groupe y compris la prière du Vendredi.
IX - L’intérêt
Les politiciens ont fait preuve de maturité en priorisant la sécurité sanitaire des citoyens avant leurs propres intérêts politiques. Rapidement, la majorité des partis de L'ARP, y compris quelques partis de l'opposition, ont joint leurs voix pour voter rapidement les décrets nécessaires et faciliter la gestion du plan de lutte contre cette épidémie.
Ce fut de même une occasion d'affirmer, encore une fois, le désir et la volonté de nombreux tunisiens de voir consacrer chez eux les principes de la bonne gouvernance, la transparence et la démocratie comme fondement de la gestion des affaires de l'état.
Avec 178 voix, le parlement a confié une partie de ses pouvoirs au gouvernement pour faciliter la promulgation de décrets lois dans le cadre de la lutte contre la Covid-19, il s'agit de l'application de l'article 70 de la constitution tunisienne.
X – Les tunisiennes
Encore une fois, les Tunisiennes ont confirmé leur rôle de composante essentielle et fondamentale dans la société. A l’image de Professeur Benalaya Nissaf ,directrice de l’observatoire nationale des maladies nouvelles et émergentes, il y a eu des femmes sur le front de la lutte anti covid-19 et ce à tous les niveaux d'interventions au côté de leurs collègues masculins, tant de praticiennes de terrain à l'hôpital (médecins, personnels paramédicales jusqu'aux agents d'entretien) que décideurs de stratégie au niveau institutionnel ou encore en tant qu'experts au sein des comité d'orientation scientifique et médical.
Point de presse Covid19 Tunisie avec professeur Ben Alaya Nissaf directrice de l’observatoire nationale des maladies nouvelles et émergentes.
Pour conclure cet article, sur la même note positive, je reviendrais sur cette histoire très significative en terme de solidarité et d’engagement patriotiques, qui a ému tous les tunisiens et a eu de nombreux échos à l’étranger. C'est l'histoire d'ouvrières et d'ouvriers qui a fait le tour du monde. Dès le début du confinement, ils se sont isolés loin de leurs familles pendant 40 jours, dans leurs usines de confection de masques de protection, pour faire face aux besoins de leurs citoyens, à commencer par le personnel médical. Ce geste de sacrifice et de patriotisme envers la patrie est une preuve, si besoin est, que la fibre des Tunisiens est faite d'amour pour la patrie.
kaissar sassi
- Ecrire un commentaire
- Commenter
Et le rôle fondamenl de Dr Sonia Ben cheikh, comment l'ignorer ?????????