Les révélations de Mohamed Abbou : Les derniers jours de Fakhfakh à la Kasbah
Dans un livre intitulé "A contre-courant, une expérience à l’intérieur du pouvoir", Mohamed Abbou revient avec force détails sur son parcours politique, plus particulièrement depuis 2011. Deux fois ministre auprès du chef du gouvernement chargé au gré des fonctions de la Réforme administrative, de la Gouvernance et de la Lutte contre la malversation, en 2012 dans le gouvernement Jebali, et en 2020, dans celui de Fakhfakh, il en tire la grande frustration d’un goût d’inachevé et surtout du blocage
Elyès Fakhfakh tenté de renoncer à la Kasbah
Alors qu’il était sur la dernière ligne droite pour remettre au président la République son programme et la composition de son gouvernement, Elyès Fakhfakh était pris d’un grand doute, rapporte Mohamed Abbou dans ses mémoires. «Le 15 février 2020, je l’ai trouvé très perplexe, écrit-il. Il commençait à douter de la sincérité des partis devant le soutenir, notant leurs multiples retournements et manœuvres, à commencer par Ennahdha. Excédé, il me confia qu’il allait demander à voir le chef de l’État pour lui remettre sa lettre de désignation, renonçant à former un gouvernement. Je l’en ai dissuadé, l’encourageant fortement à aller jusqu’au bout. Si Ennahdha bloque, à cause du futur titulaire du ministère de l’Intérieur, lui ai-je dit, vous pouvez le remplacer par Qalb Tounes, en choisissant cependant lui-même les ministres parmi ses candidats. Qalb Tounès est moins dangereux, ai-je ajouté. Il peut disparaître rapidement par quelques agents de police qui appliqueront la loi. Alors que pour déboulonner Ennahdha qui a infesté les organes de l’État et de la Justice…»
Ennahdha a fini par céder en avançant deux demandes: ajouter Lotfi Zitoun (alors sous véto de Fakhfakh) et ne pas confier le ministère des Technologies de la communication à Lobna Jeribi. Mais aussi prendre deux conseillers au cabinet à la Kasbah.
Fakhfakh refuse de se retirer et de déléguer ses pouvoirs à Thouraya Jeribi
Alors que le verdict de la motion de censure était tombé au Bardo, sanctionnant lourdement Elyès Fakhfakh, empêtré dans une affaire de conflit d’intérêts, il ne s’agissait plus que d’un gouvernement d’expédition des affaires courantes. Fakhfakh, ayant perdu la confiance de l’ARP, pouvait-il continuer à le diriger ? Mohamed Abbou lui proposera de se retirer et de déléguer ses pouvoirs à la ministre de la Justice, Thouraya Jeribi. Refus catégorique.
Fakhfakh avait du mal, en outre, à accepter sa condamnation par des partis dont des ministres siègent au sein de son gouvernement. Il appellera Mohamed Abbou à venir le voir chez lui pour le consulter à ce sujet, ne lui cachant pas son intention de limoger les six ministres concernés. «C’était aussi mon avis, lui ai-je affirmé, écrit Abbou. A une exception près, Slim Choura, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, certes présenté par Ennahdha, mais étant resté à distance du mouvement. Le limogeage vaudra pour tous!»
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