Abdelaziz Kacem: L’éternel féminin, l’inéducable masculin
Je remercie les ami(e)s qui se sont inquiétés de mes silences, en ces temps pandémiques, au propre et au figuré. Je les en remercie en les rassurant. Je ne suis pas covidé. Je suis simplement vidé, vidé de tout enthousiasme. J’avais besoin d’une cure d’altitude. Un recueil de poésie à publier à la rentrée et un appel des lointains, de plus en plus pressant. Au reste j’écris toujours à Leaders magazine. C’est ma plume faustienne, lassée de tout, qui prit son vol, sous la proclamation du chœur goethéen final: l'éternel féminin nous attire vers le haut.
Au soixante-cinquième anniversaire du CSP, je me devais de répondre présent, pour dire non à tous les V infamants, la voyoucratie, le viol, le voile, les violences faites aux femmes. Il ne faut pas trop compter sur la police et la justice pour juguler les agressions misogynes quotidiennes qui vont jusqu’au crime le plus abject. Il nous incombe de lutter, culturellement, contre ce phallocentrisme immémorial.
Il y a chez les mâles, depuis les temps des cavernes, comme un démon qui pousse le masculin à mater la fémellité castratrice. Chez le musulman, ce diable intérieur se pare d’une barbe hirsute ou bien taillée, avec les mêmes versets, les mêmes hadiths consacrant la minorité irrémédiable de la compagne. «Désertez leur couche, battez-les» (VI, 33). En culture arabo-musulmane, l’épouse (zawja) s’appelle aussi haram (l’intouchable, l’inviolable, le sanctuaire) ou ‘aqîla (l’entravée, l’attachée [à son mari]).
Parce qu’elle appartient grammaticalement au deuxième sexe, la démocratie a vocation d’être violée en terre d’islam. Lorsque Abir Moussi a été agressée, au sein même de l’ARP, par la bande à Makhlouf , l’algarade indigna sans trop étonner. Le scandaleux, c’est le soutien des députées islamistes aux voyous, c’est le silence plus que complice d’un témoin privilégié, la ministre des Affaires de la femme, etc. Ces femmes font honte à la femme.
Je salue, à l’occasion, la parution, à l’initiative du CREDIF, du premier volume d’une encyclopédie consacrée à «Cent et une femmes» tunisiennes marquantes. Je fais partie de la soixantaine d’universitaires qui en ont établi les notices. Un tel ouvrage montre bien que, par les temps qui courent, une Tunisienne vaut 10 000 hommes.
L’exception fait la règle. Une magistrate, sur dénonciation, a été arrêtée en possession d’une importante somme d’argent en devises. Elle doit répondre de ses actes. Ce qui me laisse pantois c’est l’ampleur de la «chamâta» dont elle a fait l’objet. Ce mot arabe désigne la jouissance que l’on éprouve face au malheur d’autrui. Il n’a pas d’équivalent dans les langues latines ou anglo-saxonnes. Il est une exclusivité arabe. Pour ma part, j’espère que la malheureuse trouvera un bon avocat, qui saura nous expliquer le mécanisme infernal, les pressions ou les tentations irrépressibles qui ont poussé une jeune femme, qui a réussi dans la vie, à prendre, à l’encontre de sa carrière, de son honneur, de sa famille, des risques aussi HÉNAURMES. Pitié pour celle qui tombe !
Abdelaziz Kacem
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Pardon Si Abdelaziz.Je ne suis pas misogyne.Pour preuve j'ai publié 2 livres sur la presse féminine en Tunisie l'un en arabe et l'autre en français publié à Paris intitulé l'information au féminin.Mais je ne vois pas pourquoi il faut avoir pitié d'une magistrate qui a commis une grave infraction parce que tout simplement c'est une femme.La loi doit s'appliquer à tout le monde sans discrimination