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???? ?? ???? ???" (1"Que de fois n'ai-je pas entendu cette phrase en discutant avec un jeune et que de fois n'ai-je pas tancé mon interlocuteur, lui reprochant son ignorance et son manque de curiosité. Il est vrai que, parfois, je me demande s'il ne s'agit pas d'une réaction épidermique de ma part. Quel est le tort d'un jeune ou moins jeune tunisien, aujourd'hui, s'il n'a jamais entendu parler de Hafedh Ibrahim (non pas le poète égyptien mais le grand militant tunisien décédé dernièrement  à Madrid), ou si ces noms évoquent pour lui (dans le meilleur des cas) de simples noms de rue comme Ali Zlitni, Salah Ben Youssef, ou Mongi Slim, ou encore, si certains faits historiques ont été occultés.  Il y a plus grave.

C'est la petite histoire qui nous aide à comprendre la grande. Les spécialistes parleront d'histoire totale. Quel est notre tort à tous si nos historiens et nos érudits, témoins avant tout de leur époque,  ne se sont pas assez intéressés à ces Tunisiens anonymes, héros à leur façon qui, à travers les siècles, ont  bâti ce pays. J'envie les Français de tout connaître sur leurs ancêtres les Gaulois, leur mode de vie, leurs coutumes,  et pas seulement les hauts faits de Vercingétorix; "le mariage dans la France féodale", la vie des Français de "l'an mil"  "le mariage au XIIIe siècle" grâce à Georges Duby ou Jacques le Goff, alors que nous ignorons tout de la vie de nos grands-parents, de leurs préoccupations.

J'en veux à nos érudits des siècles passés qui se sont désintéressés de leurs contemporains, laissant le soin aux missionnaires et aux voyageurs étrangers de nous décrire par le menu détail la vie quotidienne de nos ancêtres. 

J'en veux à ces puits de science et à leur égoïsme  d'avoir gardé par devers-eux des connaissances et des documents hérités de leurs parents sans avoir jamais pensé à en faire profiter les spécialistes et  les jeunes. Ne cherchez pas davantage. S'il y a des problèmes d'incommunicabilité entre les générations, c'est  bien à cause de ça. Entre adultes et jeunes on ne ne parle pas des mêmes problèmes, on n'a pas  les mêmes repères, les mêmes références et finalement on se regarde en chiens de faïence parce que tout simplement, on  ne se connaît pas.

Hédi Béhi

(1) "je n'en ai jamais entendu parler"