News - 02.11.2023

Vivre à Gaza

Vivre à Gaza

Carnage ! Des milliers de tonnes de bombes sont larguées du ciel sur Gaza, jour et nuit, dans un pilonnage assourdissant. Des immeubles siphonnés s’écroulent subitement sur leurs habitants. Ni écoles, ni mosquées, ni églises ne sont épargnées. Les morts se comptent par milliers, le double, probablement, est encore sous les décombres. Et des milliers de blessés…

L’acharnement meurtrier des forces israéliennes est d’une rare violence. Au grand mépris du droit international et en toute complicité avec des puissances occidentales, l’horreur n’a pas de limites. Etat de siège total, privation de tout. S’ils survivent aux attaques, les Palestiniens doivent être assoiffés, affamés, effrayés, traqués, délogés de leurs maisons, contraints de se déplacer vers le Sud de Gaza, dans un nouveau «transfert».

Israël n’a d’autre objectif que d’éradiquer Hamas ! Quitte à raser une grande partie de Gaza.

Les puissances occidentales volent à son secours. Le soutien politique, sans équivoque, s’accompagne de très grands moyens militaires rapidement déployés. Le discours est quasiment le même : «Israël a le droit, le devoir, la responsabilité de riposter.» Feu vert ! Ouvrez le feu. Le respect du droit international humanitaire n’est évoqué qu’en effet rhétorique…

Une vengeance

L’invasion terrestre se met en branle. Les mises en garde prononcées du bout des lèvres ne serviront à rien. La crainte de l’élargissement du conflit (Hizboullah, Iran, Houthis…) ne réduit pas la détermination assassine du gouvernement de Netanyahou. Ses alliés faucons, son armée et la majeure partie de son opinion publique l’y poussent massivement. Ce n’est pas une guerre, c’est une vengeance.Hermétiquement verrouillé depuis près de 17 ans, le chaudron de Gaza, mis en ébullition, a fini par exploser.  Les 2.4 millions de Palestiniens maintenus assiégés dans cette bande si étroite, de 43 km de longueur et de 15 km au maximum de largeur, ne pouvaient déjà endurer davantage de précarité et d’oppression. Pour les plus jeunes, seule la voie de la résistance s’offre à eux. Ils se sont ingéniés au sein du Hamas à inventer leurs propres armes, élaborer leurs stratégies, et percer le dôme de fer sécuritaire, pour s’attaquer à l’occupant. L’onde de choc qu’ils ont provoquée à la surprise générale dépasse Israël.

Une guerre longue et atroce

La vengeance israélienne sera aveugle. Assassinat ciblé des dirigeants du Hamas et de leurs familles, de tous les combattants, de tous les activistes, de journalistes… une décapitation, du sang, des morts… démolition de maisons et d’immeubles, destruction sans discernement, un rasage total, ne laisser que des ruines : plus rien n’arrête l’armée israélienne.La guerre sera impitoyable. Elle s’annonce longue, atroce, barbare… Elle se poursuivra tant que les exactions commises et les crimes perpétrés n’auront pas atteint le seuil de l’intolérable pour l’opinion publique internationale. Le point de basculement sera alors la force d’indignation et de dénonciation qui montera aux Etats-Unis d’Amérique, en Europe, dans le monde arabe et ailleurs. La puissance de cette condamnation poussera alors les dirigeants dans les grandes puissances à se raviser et à peser de leur poids pour intimer à Israël de cesser le feu et d’ouvrir la voie à l’entrée des secours à Gaza.

C’est cette même opinion publique agissante qui incitera les gouvernants des pays qui ont normalisé leurs rapports avec Israël de suspendre tout processus. Aucun pays arabe ne se hasardera à poursuivre les relations déjà établies, bien que de grands intérêts soient en jeu.

Une diplomatie arabe amorphe

La guerre de Gaza a révélé de grandes défaillances. Le droit international humanitaire est bafoué. Le système international est ébranlé. L’ONU et sa galaxie ont montré leurs limites. Le système multilatéral s’essouffle.

La diplomatie arabe a été mise à nu. Amorphe les premiers jours, dispersée au gré des intérêts propres à chaque pays, inefficace dans son action, incapable de faire porter une voix commune et d’interpeller les grandes puissances, elle s’est réduite à de simples déclarations inaudibles. La dernière réunion du Conseil de la Ligue des Etats arabes au Caire en a offert une piètre image. Heureusement que la Tunisie a, le soir même, émis des réserves sur sa résolution finale.

C’est pourtant à cette diplomatie arabe de se reprendre pour déclencher une nouvelle dynamique en vue de relancer le processus de paix et de sécurité dans la région.

La reine Rania de Jordanie a excellé sur CNN. Avec vigueur, elle a dénoncé le «deux poids, deux mesures » des pays Occidentaux et pointé « un silence assourdissant du monde occidental».

Des médias complices

Les médias internationaux ont été d’une rare férocité pour défendre Israël et accabler le peuple palestinien et les combattants du Hamas de tous les crimes. Dans une surprenante unanimité, toutes les exactions commises par l’armée israéliennes sont occultées et les seules voix admises sur les plateaux sont celles qui défendent l’Etat hébreu. On déplore aussi le nombre restreint de personnalités arabes et palestiniennes qui ont pu franchir cette barrière pour rétablir tant de vérités. Le poids négatif de la plupart des médias, aux mains des puissances financières pro-israéliennes, sera lourd à porter pendant plusieurs années. Les Palestiniens, mais aussi tous les Aabes, en porteront les stigmates.

Reprendre le processus de paix

Un aspect positif majeur, cependant, le retour en force de la cause palestinienne au centre des préoccupations. Les grandes puissances ont finalement compris que la stabilité dans la région est sérieusement ébranlée, menaçant la paix et la sécurité dans le monde. Des solutions sont indispensables à trouver. Même si la démarche est longue, devant attendre les prochaines élections américaines, dans un an, le 5 novembre 2024.

Que va-t-il se passer?

Sans une ferme prise de position des grandes puissances pour faire renoncer Israël à envahir Gaza, imposer le cessez-feu et négocier les conditions y afférentes, le pire est à redouter. L’armée israélienne pilonnera Gaza sans relâche. Des milliers et des milliers de morts risquent d’être déplorés. En ruines, la ville de Gaza sera une ville fantôme, vidée de sa population, jonchée de cadavres, réduite au silence.

La population sera de partout parquée au Sud. Très probablement, Israël sera tenté d’occuper le nord et Gaza centre, en y établissant un no-man’s land. Puis, prendra tout son temps pour se décider en faisant monter les enchères.

Le risque de provocation de l’Iran est difficile à envisager. Mais, il reste probable. L’extension de la guerre ajouterait au calvaire du peuple palestinien une nouvelle épreuve.

Une lueur d’espoir

Eprouvé par tant de décennies d’occupation, d’oppression, et d’injustice, le peuple palestinien n’a jamais capitulé, ni renoncé à ses droits légitimes de reconquérir ses terres. De génération en génération, la résistance n’a jamais flanché, le combat n’a jamais cessé. Lorsque Israël cherche à «éradiquer» le Hamas, il ne parviendra nullement à éteindre l’âme palestinienne. L’histoire toute récente vient de le rappeler. Les combattants du 7 octobre 2023 qui ont surpris le monde entier incarnent cette génération montante qui se dévoue à la lutte contre l’occupation. La cause palestinienne qu’ont croyait reléguée au fond des tiroirs est portée encore plus haut par cette jeunesse palpitante, résolue et battante.Chaque nouveau massacre perpétré par Israël ne fera qu’exacerber l’opinion publique internationale et susciter son indignation. Le spectacle des désastres et l’horreur des carnages susciteront un mouvement de solidarité avec les Palestiniens. Chaque déclaration, chaque manifestation pèsera alors de tout son poids. De quoi donner un motif de réconfort et de maintenir une lueur d’espoir.

Vivre à Gaza aujourd’hui relève du miracle. Il faut y croire, et s’y attacher. Malgré toute la machine de guerre dévastatrice mise en branle contre le peuple palestinien.

Taoufik Habaieb

 

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1 Commentaire
Les Commentaires
makgech - 02-11-2023 17:26

+ en urgence : demander instamment la convocation d'une assemblée extraordinaire des États Parties aux Conventions humanitaires de Genève pour faire, sans délai, arrêter le carnage !

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