L'université entre démocratie et gouvernance
L’université a eu le privilège d’ouvrir le bal des élections post-révolutionnaires. Pour la première fois, les directeurs des écoles et instituts universitaires ont été élus par des conseils scientifiques, eux-mêmes élus. A l’instar de leurs collègues doyens de facultés qui l’ont été de tout temps, si on exclut la courte parenthèse d’Amor Chedli.
C’est un tournant symbolique important. Pour bon nombre d’universitaires, en effet, l’élection des conseils scientifiques, comme celle des doyens et directeurs d’établissements, et demain des présidents d’université constituent la clé de la bonne gouvernance de l’université. Il est vrai que la nomination des directeurs par l’Administration avait le plus souvent conduit à installer aux commandes des serviteurs zélés du pouvoir, dont la compétence n’était plus qu’une option.
Mais pour nécessaires qu’elles soient, les élections sont-elles la panacée ? Si c’était vrai, nos facultés seraient aujourd’hui dans un meilleur état qu’elles ne le sont. Les élections des doyens résultent en général de savants compromis entre collèges électoraux, dans lesquels la politique scientifique et les orientations stratégiques de l’institution n’ont que peu de choses à voir. Comment le pourraient-elles d’ailleurs, quand c’est l’autorité de tutelle qui détient les cordons de la bourse, le recrutement des étudiants comme des enseignants, qu’elle fixe les programmes de formation, détermine dans leurs moindres détails les orientations et les partenariats des institutions, tout en contrôlant la moindre de leurs ressources ? L’autonomie des institutions s’est réduite au fil du temps comme une peau de chagrin, le doyen élu – tout comme le directeur nommé – ne représentant plus qu’un maillon mineur de la chaîne de commandement. Alors, avant de parler élections, sans doute eût-il fallu parler des prérogatives des doyens et directeurs. Les élire, d’accord… mais pour faire quoi ?
Sur un autre plan, réduire la démocratie universitaire à ces élections serait une erreur. Car les établissements publics ne sont pas la propriété de leurs salariés, ils appartiennent à la nation tout entière. Ils sont créés et fonctionnent grâce aux impôts payés par les citoyens, qui devraient donc avoir un droit de regard sur l’usage qui en est fait. C’est le cas de Tunisair, de la STEG ou de l’ONAS. Cela doit aussi être le cas pour l’université et pour le système éducatif dans son ensemble. La nation consacre à celui-ci 7% de son PIB, soit l’équivalent de la richesse produite par le tourisme grâce aux 350 000 Tunisiens qui y travaillent. Comment admettre dès lors que quelques milliers d’enseignants soient seuls à décider de l’usage à faire de cet appareil essentiel pour le devenir de la nation ?
Nul ne contestera certes qu’ils soient les plus qualifiés pour nous dire comment faire. Mais ils ne sont en rien plus légitimes que n’importe quel autre citoyen pour décider de quoi faire. La démocratie, c’est en effet « un homme, une voix », et non la confiscation du pouvoir de décision par les experts.
Alors, comment concilier l’indispensable démocratie interne au sein des établissements et l’autonomie qui leur permet d’imaginer et de conduire des politiques originales répondant aux besoins du pays et des régions, avec leur non moins nécessaire contrôle par les citoyens et leurs représentants ? La clé est multiple. D’abord, des conseils d’établissements universitaires associant à leur gouvernance, à côté des représentants des personnels, des représentants de l’intérêt public – à savoir l’Etat – ainsi que ceux de ces principaux usagers des produits de l’université que sont les entreprises. Faute de quoi l’université ne pourra sortir du rôle de producteur de chômeurs diplômés qu’elle a fini par devenir ces dernières années. Ensuite, l’élection par ces conseils d’établissement – et non par les seuls enseignants – des directeurs et des doyens, des présidents d’université aussi, sur des appels à candidatures ouverts à tous ceux qui en ont les qualifications, qu’ils appartiennent à l’établissement ou non. Enfin, que l’élection de ces dirigeants se fasse sur la base de leur projet d’établissement, et non sur la simple connaissance qu’ont leurs collègues de leur parcours et de leur personnalité.
La démocratie, cela consiste en effet à choisir un projet et celui ou ceux qui le portent, et c’est beaucoup plus qu’un simple vote.
M.J.
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La politique éducative est une affaire nationale ; quand demain la nation fait confiance à un parti politique X via le suffrage universel pour définir et gérer ce domaine je ne vois pas pourquoi et comment un conseil elu par quelques centaines d'enseignants y mettrait quelques obstacles par souci corporatiste...c'est pour celà que l 'election d'un président d'université n'aura pas de sens aprés le mois d'octobre .
en deux mots : L’université entre démocratie et gouvernance et l'universitaire entre pauvreté et misère, sauf pour ceux qui touchent deux slaires, en france et en tunisie.
l'auteur de l'article a soulevé le véritable problème de la démocratisation des institutions universitaires. A mon avis, un ensemble de doyens et de directeurs élus suffit pour constituer le partenaire direct de l'autorité de tutelle. Les présidents d'université ne servent à rien; c'est une barrière artificielle instaurée par l'ancienne dictature (on connait très bien l'historique). Si on la maintient, les élections deviennent une farce.
Du temps de la dictature, l'université et les facultés étaient au service du système despotique qui a aboutit à une floraison de diplômes dont sont nombreux ceux qui ne valent pas plus que la feuille de papier saturant l’université de compétences plus que douteuses – Les salaires de misère sont venu à bout de la résistance des vrais compétences qui ont fini par aller vers d’autres cieux dont la rémunération est plus honorable. Actuellement les choses n'ont pas beaucoup changé, pour avoir la paix sociale on laisse l'université s'auto gouverner. Le problème majeur et fondamental c'est que les élections et les élus se font sur des bases dans lesquelles les intérêts de l'université, des étudiants, de la discipline et même l’intérêt national sont quasi ABSENTS. Les électeurs et les élus sont en proportion non négligeable d'un niveau intellectuel, scientifique et technique assez faibles pour donner une quelconque valeur aux idéaux universels (le savoir, la science, le développement intellectuel) obnubilés par les intérêts pécuniaires et de pouvoir (il suffit de regarder comment se déroulent les concours et les jurys en majorité), les élections s’effectuent sur des bases de consentement de profils et d’intérêt personnels. Dans cette logique et si les autorités politiques ne mettent pas de "garde fou" et un système d'alerte basés sur la compétence scientifique, technique et professionnelle par des sortes de collèges disciplinaires supra facultaires composés de compétences reconnues et confirmées, nous risquons de voir en quelques années la destruction de l'un des plus glorieux patrimoine bourguibien par des conseils universitaires syndicaux mais en aucun cas scientifiques. Pour sauver notre université, il est salutaire de : 1- Réduire au moins de moitié le nombre d’étudiants et favoriser la formation professionnelle à fort taux d’employabilité et très souvent bien rémunérée (garagiste, tôlier, pâtissier, plombier, électricien, maçon….). 2- Réévaluer le niveau technique et scientifique des enseignants universitaires avec un échéancier d’au maximum 5 ans pour atteindre le niveau requis au poste selon les normes internationales et cela avec 3- une nouvelle grille de salaire des universitaires qui met fin à leur clochardisation sociale. 4- l’université doit être une structure financière rentable avec un excédent financier provenant des inscriptions en particulier (i) d’étudiants étrangers (qui viendront en masse pour se former dans des facultés de renommées confirmées), (ii) expertises scientifiques et techniques et (iii) une recherche scientifique productive directement branchée sur l’économie nationale – toute institution universitaire déficitaire (donc obligatoirement défaillante) qui n’arrive pas à se relever pourrait disparaitre. Au bout d’environ 15 ans, nous devons aboutir à une totale privatisation de la majorité des facultés, l’état par le ministère de tutelle, garantira la validité des diplômes et selon les orientations politiques l’éventuelle prise en charge financière des frais d’étude de certains étudiants de classe sociale défavorisée.
oui pour les elections. avec les elections ni l'auteur ni la plupart de ceux qui ont pris la direction de l'ecole polytechnique n'auraient jamais espere acceder a ce poste. Tous les profits dont il tirent actuellement proviennent de cette nomination dont ils ont tire' une notoirite'. La competence scientifique et les services rendus au developpement scietifique et technologique du pays n'avaient aucune importance. Quant au programme dont il parle. tout le monde peut presenter un programme allechant mais faut-il au moins realiser une partie
Mr jawhar propose une charabia qui n'existe nul part au monde. aujourd'hui chacun se dit lui ou personne.
Dans les grandes universités internationales, il y a un appel d'offre international sur CV pour le recrutement des responsables de sections et disciplines. En Tunisie, le système électoral aboutit inéluctablement à une représentation syndicale et en aucun cas académique scientifique et technique. Ceux qui applaudissent ce système électoral sont essentiellement ceux dont le CV est justement à ne pas mettre en avant. Ça doit être pour cela qu'ils qualifient de "charabia" ce dont il leur est intellectuellement inaccessible ou bien rejettent tout système qui les obligera à se mettre réellement à la productivité!!!
@ M. Fathallah Je dois convenir que j'aurais certes eu du mal être élu à la direction de l'Ecole Polytechnique ... car celle-ci n'existait pas avant que je l'aie fondée. Quant à votre définition du charabia, rien à ajouter à ce qu'en dit Jawhar : ce qui l'est pour vous ne l'est pas pour tout le monde.
Il est très dangereux pour son avenir de confondre l'université avec une "CHOO3BA".