Démocratie, Politique et République
« La démocratie est le régime politique dans lequel le peuple est souverain. Elle est essentielle pour la construction d'une nouvelle République »
Cette thèse repose sur trois notions que sont la démocratie, la politique et la république.
L’étymologie de ces trois mots nous renvoie directement vers la Grèce et à sa civilisation.
Nous nous intéressons au sort réservé à ces mêmes notions, dans la langue arabe.
La démocratie n’est pas traduite, elle est juste transcrite en lettres arabes.
La politique, gestion de la cité, est traduite par conduite, sans autre forme de précision.
La république est quant à elle traduite par Jomhouria. Le terme renvoie davantage à un grand rassemblement qu'à un système politique particulier.
Les transpositions d’une civilisation à l’autre, de valeurs mêmes supposées être universelles, peuvent parfois poser problème.
De nombreux pays arabes tentent toujours péniblement aujourd’hui de traduire ces trois notions au quotidien.
Notre Tunisie a quant à elle connu il y'a plus de deux mille ans la République de Carthage.
Elle a ensuite connu sa seconde république le 25 juillet 1957, après l'indépendance et l’abolition de la royauté.
Cette seconde république a apporté une prospérité certaine mais a aussi souffert d'un déficit démocratique important.
Aujourd'hui
Aujourd’hui, le pays est censé mettre en place les assises d'une nouvelle république. 107 partis politiques et de nombreuses listes indépendantes pourront participer à l’élection démocratique, le 23 octobre 2011, des membres d’une assemblée constituante. Les préparatifs vont bon train.
Le parti Ennahdha met la touche finale à ses listes qui devraient couvrir la totalité des circonscriptions.
Rached Ghannouchi a déjà proclamé à certains médias sa victoire avant d'avoir livré bataille et annonce surtout un million d'adhérents. En effet, ce parti pourrait tirer profit d'un mode de scrutin qui lui aurait été taillé sur mesure, mais les différents sondages ne le créditent que d'un score moyen de 15 %. Il est aussi utile de préciser qu' Ennahdha tire aussi avantage d'un scrutin qui sera tenu en un tour seulement.
L'organisation d'un second tour aurait été défavorable à ce parti, les reports de voix se seraient fait le plus souvent à son détriment.
Ennahdha compte aussi une dizaine de partis satellites, même si elle compte aussi beaucoup de détracteurs qui l'accusent d'aliéner l'islam à des fins strictement politiques. Les intégristes refusent généralement toute évolution au nom de la tradition ; la chariaa étant la seule source de droit reconnue.
L'adversaire direct d’Ennahdha, le Parti Démocratique Progressiste, accuse plusieurs points de retard dans les sondages. Le leader du PDP, Néjib Chebbi vient d’appeler toutes les forces démocratiques à constituer un front uni.
Mais à qui est adressé réellement cet appel?
Le pôle de la modernité constitué autour d'Ettajdid ( ex parti communiste), Ettakatol , Afek et la nouvelle étoile, l 'Union Patriotique Libre du milliardaire Slim Riahi tenteront, à des degrés divers, de confirmer leurs présence sur un maximum de circonscriptions électorales.
Ce quarto complétera la liste des partis qui devraient siéger dans l’assemblée constituante.
Toutefois, en politique comme dans le football, une partie n'est jamais gagnée d'avance. De nouveaux éléments pourraient perturber l’issue du scrutin. En effet, quatre partis politiques se proclamant de la mouvance destourienne, viennent d’annoncer la constitution de listes communes dans une série de circonscriptions.
Ces nouvelles listes pourraient être totalement rejetées par certains mais pourraient être aussi portées à bouts de bras par d’autres, exaspérés et même écoeurés par le désordre et la désorganisation qui règnent depuis plusieurs mois.
D’autre part, de nombreuses listes indépendantes sont annoncées dans de nombreuses circonscriptions. Certaines sont construites autour de personnalités reconnues dans le domaine du sport ou du spectacle. Elles peuvent constituer une offre de substitution dans des régions ou le crédit des partis politiques est au plus bas.
Le scrutin permettra aussi aux partis de l'extrême gauche et aux mouvements se proclamant du panarabisme de prendre la mesure de leur réelle représentativité au sein de la population tunisienne.
Et pour finir, soixante dix partis risquent de ne pas participer au processus électoral. En effet ils souhaitent associer le peuple à la définition des prérogatives de l’assemblée constituante ainsi que sur la durée de ses travaux. Ces partis pourraient, dans un cas extrême, appeler la population à boycotter les élections ou appuyer région par région la liste républicaine, la mieux placée.
En conclusion
Ennahdha et le PDP sont aujourd’hui les partis qui devraient peser le plus sur ce scrutin.
Les listes indépendantes pourraient déjouer les pronostics électoraux dans certaines régions.
Les listes seront connues au plus tard 07 Septembre 2011, mais nous assisterons, dans les semaines qui suivent, à de nombreux retraits.
Les désistements pourraient dégager, même de manière imparfaite, deux pôles : un conservateur autour d’Ennahdha et, un moderniste, autour du PDP.
Mais, le chemin pour atteindre la date du scrutin est long et parsemé d'embûches.
Le silence du gouvernement face aux appels à référendum est étrange. Pourtant, la constitution avant la date des élections d'un gouvernement de salut national et l’organisation du référendum pourraient constituer la meilleure garantie pour la réussite des élections.