"Chaque pas doit être un but", Les mémoires de Jacques Chirac
Finalement, il aura pris une belle revanche, du moins en librairie, sur Valery Giscard d’Estaing ! Jacques Chirac qui vient de publier, début novembre, ses mémoires connaît en effet un franc succès avec plus de 350 000 exemplaires vendus. Alors qu’avec La Princesse et le Président, racontant une love story avec Lady Di, publié en septembre, Giscard ne dépasse pas les 25 000 exemplaires. Sacrés Français ! Les voilà repris d’affection pour Chirac.
A première vue volumineux (500 pages), mais, en fait, il laisse le lecteur sur sa faim. Certes il s’arrête avec l’arrivée à l’Elysée, mais retrace l’enfance turbulente, la prime jeunesse, avec cette « fugue » juste après le bac à bord d’un cargo charbonnier qui l’emmènera à Alger où il fera son bizutage à la Kasbah et sa tournée américaine. On le suit à Science-Po où il fera la connaissance de Bernadette, l’accompagne durant son service militaire en Algérie et atterrit avec lui à Matignon sous Georges Pompidou.
La saga commence
Le portrait qu’il dresse de son mentor est exceptionnel. On découvre un Georges Pompidou travailleur, séparant nettement sa vie privée de sa vie publique, ses amis de ses collaborateurs, se dédiant aux côtés du Général de Gaulle, à la grandeur de la France. Avec l’éminence grise, Pierre Juillet, Chirac est parmi les rares qui demeurent à Matignon durant la tourmente de Mai 68, menant en coulisse les contacts qui aboutiront aux accords de Grenelle. Arrachant son siège de Député de la Corrèze, il acquiert alors toute sa légitimité. Secrétaire d’Etat à l’Emploi, il fera son entrée au Gouvernement et sera plus tard en charge du Budget, puis ministre de l’Agriculture et en fin, de l’Intérieur. C’est de la place Beauvau qu’il vivra le décès de Pompidou, se rallie à Giscard d’Estaing qui, élu, en 1974, le nommer Premier Ministre.
La course à la magistrature suprême ne fera que commencer pour Chirac. Démission du gouvernement, création du RPR, élection à la Mairie de Paris, retour aux affaires sous Mitterrand, puis la grande course vers l’Elysée qu’il finira par remporter en 1995. Le tout sur fond de conquêtes, de trahisons de certains proches, de déception, d’accomplissement et surtout d’une grande détermination. Les anecdotes ne manquent pas, les révélations aussi, mais sont parcimonieuses. Chirac se livre à travers ses mémoires surtout à rappeler ses grandes positions et ses meilleures réalisations. On apprendra beaucoup sur l’homme, simple, pudique, amoureux de vieilles civilisations, de sumo, de bière et d’air frais.
Bernadette et la Tunisie
Quelques pages intimes sont consacrées à ses filles, Laurence dont il porte profondément la souffrance et Claude qui a été sa conseillère en communication. Alors que Bernadette est présente directement ou en filigrane dans plusieurs chapitres. On apprendra d’ailleurs, pour la première des liens très anciens entre la famille maternelle de Mme Chirac et la Tunisie. « Bernadette, révèle-t-il, est issue, du côté de sa mère, d’une lignée de très vieille noblesse, la famille Buisseret, dont les armes figurent depuis le Xème siècle sur la clef de voûte de la cathédrale de Tunis, pour avoir pris part aux croisades… »
Un livre agréable à lire qui traverse à grandes enjambées chiraquiennes les 30 dernières années de la France. La suite des mémoires, prévue pour 2011 sera sans doute encore plus captivante.
Editions du Nil
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