Une mairie de Lyon en deuil pour Gaza

Au grand dam des sionistes et des suppôts d’Israël, pour marquer sa solidarité avec les 2080 morts et les 10 000 blessés des barbares attaques israéliennes contre la population civile de Gaza, Nathalie Perrin-Gilbert, maire du 1er arrondissement de Lyon,  a fait un geste fort et courageux en décidant, avec son conseil, de mettre en berne, pour 48 heures le drapeau français au fronton de sa mairie et dans l’arrondissement. Cette décision, la première du genre en France,  a été prise en accord avec la majorité Front de Gauche le mercredi 20 août 2014. Jusqu’à vendredi, la mairie de cet arrondissement lyonnais a voulu exprimer « un soutien aux victimes de l’offensive israélienne dans les territoires palestiniens » et « donner une autre image de la République française, celle d’un humanisme assumé. L’image d’une France pour qui la paix universelle est un idéal vers lequel, tous les jours, chacun doit s’efforcer de tendre. Et enfin, l’image d’une France qui n’assimile pas les crimes militaires d’une coalition gouvernementale comprenant l’extrême droite, à une religion» dit le communiqué officiel de la mairie.

Ce qui signifie que critiquer l’action du gouvernement de Benyamin Netanyahou ne signifie nullement  critiquer la religion juive ou  les juifs en général ou faire preuve de je ne sais quel antisémitisme.
La mairie ajoute : «Dans tout le Moyen-Orient, de la Palestine à l’Irak, sans oublier la Syrie, face à des actions bafouant quotidiennement les droits de l’Homme et les traités internationaux, il convient aujourd’hui d’affirmer que plus qu’un droit, la paix dans la justice, est un devoir.»

L’expression de ces sentiments véritablement humains n’est pas du goût de M. Gérard Collomb, le sénateur-maire PS de Lyon, un grand ami du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) qui a soutenu sans l’ombre d’une hésitation les atrocités commises par la soldatesque israélienne à  Gaza. Inutile de souligner ici le rôle que joue le CRIF dans la politique française, lui qui admoneste régulièrement la classe politique lors de son dîner annuel comme l’a rapporté Pascal Boniface dans son excellent ouvrage « La France malade du conflit israélo-palestinien » (Voir le site de Leaders du 22 juillet 2014).

Comme Lyon est jumelé avec la ville de Beersheva (Bir as Sabâa en arabe, capitale du Néguev) en Israël, le conseil municipal de cette dernière ville va délibérer pour revoir les rapports entre les deux cités. Mais rien de bien grave ne saurait se produire ….étant donné l’isolement diplomatique  d’Israël, malgré sa centaine de représentations diplomatiques à travers le monde. De plus,  l’image de l’Etat hébreu s’est bien dégradée en France depuis la seconde Intifada et il y a de moins en moins de motivation pour de tels jumelages comme celui « scientifique » entre Grenoble et Rehovot ou « économique » entre Marseille et Haïfa. Pour les spécialistes, les jumelages constituent un excellent baromètre de l’état des relations franco-israéliennes en permettant de mesurer le degré de motivation des élus et les sentiments de la population vis-à-vis d’Israël.

Face à la décision de Mme Perrin-Gilbert d’exprimer sa solidarité et celle de ses administrés au peuple de Gaza, un certain «Bureau National de Vigilance contre l’Antisémitisme» (BNVCA) jette des cris d’orfraie et s’adresse au préfet du Rhône afin qu’il prenne des mesures contre cette décision qui,  prétend-t-il « pousse à l’acte antijuif. » Le BNVCA ne s’arrête pas là. Il en appelle au Premier Ministre, au Ministre de l’Intérieur et au Maire de la ville de Lyon. Il ne reste donc plus au BNVCA qu’à ameuter  le Président de la République et le …Pape probablement pour amener la mairie de 1er arrondissement à ne plus dénoncer les crimes de guerre d’Israël à Gaza et à appeler pour la paix et pour la justice dans le monde!

Pour apprécier la solidarité  de cette mairie Front de Gauche dans le contexte lyonnais rappelons que  le soldat Jordan Bensemhoun, 22 ans, né à Vénissieux dans la banlieue lyonnaise, a été tué à Gaza par un missile anti-tank lors de la dernière agression israélienne contre le territoire palestinien.  Lorsqu’il a appris son décès, le rabbin Meir Cohen, de la synagogue Shaarei Tsedek à Lyon, appela immédiatement la communauté juive à venir prier et discuter de «la situation actuelle», d’après Shiri Sitbon («Fallen lone soldier mourned by Jewish community in his native Lyon», Haaretz, 24 juillet 2014).

Pour M. Meir Cohen, ce soldat israélien parti en 2008, est «l’enfant idéal. Pour nous, ce jeune homme était une partie de l’armée israélienne, et il était un symbole et une image de cette armée israélienne : une armée honnête. Il est parti alors qu’il n’était qu’un enfant. Souvent, quand les gens prennent des décisions quand ils sont jeunes, c’est qu’ils sentent qu’ils ont une mission à accomplir…Maintenant Jordan a rempli sa mission jusqu’au paradis. Nous n’avons d’autres choix que de croire qu’il est déjà au paradis. Il a eu le courage de protéger ses frères, de défendre la vérité » conclut le rabbin Cohen pour lequel donc l’armée israélienne – qui tire sur les ambulances, les hôpitaux, les mosquées  et les enfants jouant sur la plage - est «une armée honnête».

Le philosophe israélien Yeshayahu Leibowitz lui, a accusé cette armée,  en 1982,  d’avoir une mentalité «judéo-nazie.» et «elle continue fidèlement, en exécutant des ordres de ses gouvernements successifs, les doctrines génocidaires de ceux qui ont torturé, gazé et brûlé ses ancêtres. On peut même dire que sous certains aspects les disciples ont dépassé  les maîtres…» (José Saramago, «Le cahier», Le Cherche Midi, éditeur, Paris, 2010, p. 176)

En appréciant à sa juste valeur la prise de position courageuse de Mme Nathalie Perrin-Gilbert et de son équipe en faveur de Gaza, espérons que son  geste de solidarité plein d’humanité amènera d’autres municipalités de l’Hexagone à se mobiliser pour la justice et la paix en Palestine et dans le monde^**. Dans le droit fil de la  tradition de la France. La France qui, elle aussi  a connu les affres d de l’occupation voilà soixante-dix ans, et qui célèbre ce 25 août,  la libération de sa capitale et de son emblématique Hôtel de ville  de l’occupation allemande.

Le Prix Nobel portugais de littérature (1998)  José Saramago disait des Palestiniens : «Un peuple qui a résisté soixante ans résistera soixante ans de plus encore.» Le soutien de la municipalité du 1er arrondissement de Lyon est un fort encouragement pour la résistance palestinienne.

Mohamed Larbi Bouguerra

** Rappelons ici 1) le magnifique travail du regretté  Fernand Tuil, co-président de l’Association des villes jumelées avec les camps palestiniens et 2) que la ville d’Avion, dans le Pas de Calais  a nommé citoyen d’Honneur Marwan Barghouti, emprisonné  en Israël depuis 2002.