De la fraude électorale et du danger de l'isoloir
Le plus grand défi que l'ISIE doit relever est celui de la fraude électorale. En effet, aucune élection, même dans les pays ayant une tradition démocratique certaine, n'en est immunisée.
Aussi revenons-nous aujourd'hui sur cette question au moment où les langues commencent à se délier sur les conditions de déroulement de la précédente élection présentée pourtant en modèle du genre et qui ne le fut pas.
La fraude, une constante électorale
La fraude est pratiquement une constante électorale qu'on ne peut éliminer totalement, mais contre laquelle la lutte doit être sans faille. C'est au degré de limitation ou d'élargissement de la fraude que se jugent les élections.
Nous évoquerons ci-après quelques-unes des techniques les plus utilisées, histoire de savoir jusqu'à quel point l'ISIE prend la question au sérieux. Nous avons d'ailleurs déjà posé ici à l'ISIE des questions, restées sans réponse, au sujet à l'utilisation folklorique de l'encre sympathique qui n'a d'intérêt que pour ceux qui la commercialisent.(*)
En effet, cette encre n'agirait, au mieux, qu'à la marge, le double vote n'étant plus la technique la plus prisée par les fraudeurs ni la plus efficace. Les plus utilisées ont lieu dans l'isoloir et sont donc favorisées par le principe du caractère secret du vote qui n'a plus de sens en notre monde d'aujourd'hui.
L'isoloir favorise la fraude
Aussi, la technique la plus radicale contre la fraude, surtout chez nous, consisterait à se passer de l'isoloir pour que le vote soit public et ainsi véritablement franc. Quel intérêt peut avoir désormais l'isoloir et le secret du vote ? De plus, à lui supposer un quelconque intérêt, est-ce qu'il ne devient pas dérisoire avec ce fait avéré qu'il favorise la fraude ?
En effet, toutes les techniques de fraude rapportées chez nous se passent dans l'isoloir où l'on est aise, à l'abri des regards, de violer la loi, en substituant par exemple une copie au bulletin officiel.
Certes, la loi exige ce caractère secret; mais elle est l'illustration parfaite de ces textes juridiques copiés sur l'Occident qui a une autre culture et surtout d'autres moyens bien efficaces que nous pour contrer la fraude et limiter au strict minimum l'abus fait de l'isoloir.
Or, nous ne les avons pas ou nous ne les utilisons point. Aussi, une dérogation à ce principe de vote secret est-elle recommandée. Après tout, dans notre culture, il n'y a pas nécessité de se cacher quand on est dans le vrai et qu'on agit selon sa conscience !
Techniques pour contrer la fraude
L'utilisation de copie des bulletins officiels est la technique constatée la plus répandue en amont. En aval, c'est celle de l'annulation de bulletins pourtant valides lors du décompte et ce par une intervention illégale de la part de ceux préposés au dépouillement. Dans ce dernier cas, c'est responsabilité est absolue des observateurs et de ceux qui procèdent au dépouillement; on ne peut que compter sur leur sérieux et leur intégrité.
Dans le premier cas, il y va en plus du recours ou non à des parades utiles. Bien évidemment, la plus efficace est de se passer d'isoloir pour que toute l'opération puisse se dérouler d'une manière franche au vu et au su de tout le monde. Mais il y en a d'autres, comme de numéroter les bulletins de vote, un moyen pratique pour détecter et éliminer, lors du décompte final, les bulletins aux numéros qui se répètent.
Il y a aussi la possibilité du recours à un tampon relief à sec, comme celui utilisé pour les diplômes, par exemple, avec lequel les copies sont plus difficiles à réaliser. Il y a enfin et surtout le papier sécurisé avec filigrane. Il s'agit d'une méthode largement répandue et recommandée pour la sécurisation des documents officiels permettant la détection des photocopies. Or, d'après les témoignages nombreux, il semble que l'une des techniques de fraude la plus répandue est l'usage de photocopie des documents officiels.
À notre connaissance, l'ISIE n'a pas donné suite aux offres qu'on lui a faites pour recourir à cette parade plus efficace que l'encre qu'elle semble vouloir réutiliser, reproduisant les erreurs de la précédente instance.
Les témoignages s'étant multipliés sur les techniques de fraude, nous demandons donc de nouveau à l'ISIE de nous éclaircir sur le degré de fiabilité de ses listes électorales qui, si elles sont parfaitement tenues, doivent amener à bannir le recours à l'encre électorale, nous évitant le ridicule du stigmate d'incapables et de tricheurs.
À l'ISIE d'innover pour contrer la fraude
Nous aimerions aussi savoir si l'ISIE, pour parer efficacement à la fraude, a pensé sérieusement à l'utilisation de papier sécurisé avec filigrane ou encore avec fils de sécurité comme celui utilisé pour les billets d'argent et qui empêchent tout copiage. Le recours à cette technique a-t-il été envisagé eu égard à son efficacité et surtout coût réduit, abordable pour l'IISIE. En tout cas plus efficace et pas pus cher que l'encre ?
Par ailleurs, outre l'idée de se passer d'isoloir qui semble hors de portée pour les élections actuelles, pourquoi ne pas innover en recourant à une formule consistant à authentifier le bulletin plié, une première fois au moment du retrait et une seconde fois avant qu'il ne soit glissé dans l'urne et ce par une personne chargée sous contrôle de cette mission ? Ainsi, seuls les bulletins authentifiés seront considérés comme valides au moment du dépouillement ce qui permettra d'éliminer toutes les photocopies ainsi que toute tentative de rendre invalides les bulletins au moment du décompte.
Afin de garantie la vraie transparence des élections et leur parfaite honnêteté contre une fraude inévitable, l'ISIE ne doit pas hésiter à interpréter le texte de la loi électorale selon ses visées, quitte à le faire lato sensu. Et qu'on arrête surtout d'user du mythe d'élections sans fraude, car cela n'existe nulle part même avec la plus parfaite bonne volonté !
Farhat Othman
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