Cinéma: La nostalgie du 14 janvier 2011 et celle de l'ère Ben Ali hantent les Tunisiens
A un mois des élections législatives, deux films réalisés par des Tunisiens montrent la situation paradoxale dans laquelle la population est plongée du fait de cette révolution.Inachevée pour les uns, devant aller à son terme par l’aboutissement de la transition démocratique pour les autres, alors qu'un grand nombre de Tunisiens s'est réfugié dans la nostalgie de l’ère précédente, celle de Ben Ali regrettée parce que les fruits se semblent pas à la mesure des promesses.
Deux films documentaires portent témoignage de cette nostalgie pour le moins paradoxale . «7½» est le titre du long-métrage documentaire de Nejib Belkadhi qui sera projeté dans les salles à partir du 1er octobre 2014. Filmé dans «l’urgence de l’Histoire», ce long-métrage retrace toute cette période «tumultueuse» allant du lendemain de la chute de l’ancien régime au rendez-vous du 23 octobre 2011, où la Tunisie vivait au rythme du changement espéré. C’est le flash-back de l’euphorie pour des lendemains qui chantent qui représente le fil conducteur du film.
Des foules des sit-ins à la Place de la Kasbah aux longues files d’attente devant les bureaux de vote en ce dimanche ensoleillé d’octobre 2011, en passant par les meetings électoraux pleins de promesses, Néjib Belkhadhi veut «témoigner de ce qui se passait en Tunisie, tout en tendant un miroir dans lequel nous pourrions, nous citoyens, nous regarder et demander des comptes à nous-mêmes», dit-il.
«C’est à l’approche du rendez-vous électoral de 2014 que le film a commencé à me hanter l’esprit, et comme j’ai tourné une grande partie de la campagne électorale de 2011, nous nous sommes décidés à reprendre le banc de montage en travaillant sur l’axe des élections», indique le réalisateur. Quatrième œuvre cinématographique de Nejib Belkadhi «7½» est aussi son second long métrage documentaire.
Le second film est un documentaire d’Amine Boufaied et Lilia Blaise. Il s’intitule «Sept vies» et est construit autour de la «nostalgie de l’ère Ben Ali». Il part d’un constat qui commence, selon ses auteurs, à prendre de l’ampleur : des Tunisiens de différentes conditions sociales regrettent la révolution et souhaitent retrouver le dictateur.« Entre propagande, désinformation et illusion l’image de l’époque Ben Ali est restée, jusqu’aujourd’hui, ancrée dans la mémoire collective de beaucoup de Tunisiens», indique-t-on dans la présentation de ce documentaire.
«Cette observation a développé chez Amine Boufaied et Lilia Blaise une frustration et une envie de résoudre l’énigme derrière la puissance du culte de personnalité de Ben Ali. Mais surtout, ils ont voulu aller au-delà de la simple observation du phénomène de la nostalgie. Déconstruire ce qu’était le système Ben Ali, analyser le rapport des Tunisiens avec le dictateur, était aussi l’objectif de ce documentaire», ajoute-t-on dans le même document.
Quant au choix du titre «7 vies», le chiffre fait référence à la date fétiche de Ben Ali, le 7 novembre 1987. Le titre reprend aussi le mythe du «chat aux 7 vies», c'est-à-dire de la résurrection après la mort.
Ce film dont la projection suivie d’un débat a eu lieu le 19 septembre à la Maison de Tunisie à Paris est la première expérience cinématographique d’Amine Boufaied, 28 ans, détenteur d’un diplôme national tunisien en sciences et technologies du design, passionné de l’audiovisuel et d’une journaliste franco-tunisienne, Lilia Blaise.
R.B.R.
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