Bourguiba Jr, l'Ami des Oiseaux
C’est une facette peu connue de la personnalité de Habib bourguiba Jr que nous fait découvrir, à travers cet hommage, M. Ali El Hili. Co-fondateur de l’Association « Les Amis des Oiseaux » et Professeur émérite à la Faculté des Sciences de Tunis, nous révèlant l’engagement écologique du défunt.
« Habib Bourguiba Junior a été conduit à sa dernière demeure le mardi 29 décembre 2009 au cimetière de Sidi Abdelaziz à La Marsa, sous un soleil radieux – changement climatique oblige -.
Parmi la foule immense qui a suivi le cortège, peu de personnes – y compris parmi ses proches – savaient ce que la protection de l’environnement en Tunisie lui devait.
C’était en novembre 1974, une vague de grand froid régnait sur l’Europe, clouant sur place des dizaines de milliers d’oiseaux migrateurs en route pour leur quartier d’hiver en Afrique. C’est ainsi qu’en Suisse des défenseurs de la nature ont recueilli des milliers d’hirondelles vouées à une mort certaine. L’un des médecins du président Habib Bourguiba contacta Bourguiba Junior pour lui demander si la Tunisie ne pouvait pas recevoir ces oiseaux acheminés sur Tunis par avion. Débarquées à l’aéroport de l’Aouina, les hirondelles furent immédiatement relâchées sur la décharge du Kram où elles ont pu trouver en abondance des insectes volants, avant de poursuivre leur migration à travers le Sahara.
Quelques mois plus tard, le 9 mai 1975, se tenait une réunion au siège de l’ONTT au cours de laquelle était créée l’Association « Les Amis des Oiseaux », avec comme président Habib Bourguiba Junior ; Hassen Belkhodja, alors ministre de l’Agriculture, étant président d’honneur et Mme Najet Mhiri, veuve du militant Taieb Mhiri, secrétaire général.
Habib Bourguiba Junior a dirigé l’Association « Les Amis des Oiseaux » de 1975 à 1989 ; c’est lui qui avait à l’époque proposé le nom « Les Amis des Oiseaux ». Mais l’association a, dès le départ, élargi son champ d’activité en s’occupant non seulement des oiseaux, mais également de l’environnement en général et plus spécialement la faune et la flore sauvages, terrestres et marines.
Pendant cette longue période, l’Association « Les Amis des Oiseaux », avec à sa tête Habib Bourguiba Junior, a pu réaliser les actions suivantes :
- Amélioration de la législation tunisienne en matière de protection de la faune sauvage à travers l’arrêté annuel relatif à la chasse.
- Formation de jeunes ornithologues tunisiens.
- Protection intégrale des oiseaux migrateurs au Cap Bon, alors qu’ils sont encore accueillis à coups de fusil en Sicile et à Malte, nonobstant la directive « Oiseaux » de la Commission Européenne.
- Elaboration de documents de sensibilisation du public : dépliants, affiches, posters.
- Participation aux tournages de films sur les oiseaux de Tunisie diffusés par des chaînes de télévision françaises, allemandes, italiennes et japonaises.
- Participation active à la création de parcs nationaux dont le premier fut, en 1977, le Parc National de Zembra. A ce propos, il faut rappeler qu’au début des années 80, l’Agha Khan, qui possède en Sardaigne une île abritant un complexe touristique haut de gamme, est venu en Tunisie sur son yacht ; apercevant, au moment où il abordait les côtes tunisiennes, l’île de Zembra, il en fit faire le tour et fut subjugué par sa beauté. Sitôt à quai, il contacta Bourguiba Junior pour lui déclarer : « j’achète Zembra ».
Bourguiba Junior lui rétorqua : « La Tunisie n’est pas à vendre ». Ce qui rappelle la réplique d’un autre grand commis de l’Etat, le regretté Hassen Belkhodja, disparu en novembre 1981. C’était en 1978. Si Hassen était alors ministre de l’agriculture. Ayant appris que l’émir d’un riche pays du Golfe, accompagné d’une suite imposante de fauconniers et de serviteurs avait franchi la frontière tuniso-libyenne pour chasser l’outarde houbara, oiseau rare en voie d’extinction et strictement protégé en Tunisie, il appela au téléphone le gouverneur de Médenine et à celui-ci qui lui signalait qu’il s’agissait d’un « grand émir », Si Hassen rétorqua: « émir fi bladou », il est émir chez lui… mais pas en Tunisie, et l’émir plia bagages et alla chasser ailleurs. Hassen Belkhodja et Habib Bourguiba Junior étaient, chacun à sa manière, deux grands commis de l’Etat. Ils avaient en commun une grande idée de la souveraineté de la Tunisie, une Souveraineté qui ne se marchande pas.
Ali El Hili
Co-fondateur de l’Association « Les Amis des Oiseaux ».
Professeur émérite à la Faculté des Sciences de Tunis.
- Ecrire un commentaire
- Commenter
Merci Si Ali pour pour ce rappel historique, sur l'avant-gardisme de notre chère Tunisie et ses grands hommes en matière de protection de l'environnement, qui constitue espoir et défi pour l'émergence de notre pays dans les décennies à venir. Et merci encore pour la contribution de votre association - Les amis des oiseaux, dans cette bataille de préservation de notre planète. Lazhar ABAAB - Paris
Ali El Hili cette grande figure de l'enseignement supérieur en Tunisie,qui a refusé un portefeuille ministériel du temps de Bourguiba nous épate toujours par sa narration exacte et honnête de l'histoire de notre pays....Merci Sidi Ali....
Je fus voisin de Ali Hili, à Mégrine ou je dirigeais la petite école française. Gaêl y était élève. Etes-vous cher Monsieur, cet Ali Hili que j'ai connu et dont j'admirais le parcours ? J'ai lu un article de vous qui me fait penser que vous avez écrit unlivre sur Kernena. Par ce message , je tente de prolonger un peu le souvenir ému que j'ai de notre passage à Mégrine, et vous salue cordialement, ainsi que votre famille. R. Poisson r.poisson@wanadoo.fr
salut monsieur Ali El Hili , je fais des nouveaux recherches scientifiques sur les oiseaux et je veux te contacter pour voir mes travaux. comment je peux te contacter ? merci beaucoup