Néji Bghouri: Il y a urgence à soutenir les médias
Si les journalistes tunisiens sont de plus en plus libres, les médias, déficitaires pour la plupart, risquent de devenir de moins en moins capables de défendre leur indépendance et de garantir leur pérennité. Pas d’entreprises de presse rentables et prospères, donc pas de journalisme de qualité et de pluralité d’opinions. Des entreprises suffisamment capitalisées, structurées autour d’organigrammes et de manuels de procédures précis, encourageant les talents et leur offrant rémunérations conséquentes et conditions de travail appropriées. Toute la problématique est là. Comment assurer cette rentabilité, comme pour toute autre entreprise? La suite de notre grande enquête «Les entreprises de presse en danger».
On connaît sa gouaille revendicative en faveur des journalistes mais nous l’avons rarement écouté défendre les patrons de presse, comme il le fait cette fois-ci. Néji Bghouri, président du Syndicat national des journalistes tunisiens, est conscient des dangers qui guettent les médias. «Je suis consterné par les difficultés financières qui pèsent aujourd’hui sur nombre d’entreprises de presse, dit-il à Leaders. J’y vois une grave menace pour la pérennité des médias, les emplois, notamment ceux des journalistes, la pluralité et la liberté de la presse et l’ensemble du débat public. La presse écrite est aujourd’hui la plus exposée, la plus affectée et la plus vulnérable. Sa place est pourtant centrale dans le paysage médiatique, tant elle est nécessaire pour favoriser - maintenant que l’information est instantanée - l’analyse, le reportage, l’enquête et autres genres journalistiques approfondis».
«Des maisons de presse comme La Presse ou Assabah, pour ne citer que ces pionnières, constituent des institutions aussi prestigieuses et relèvent du patrimoine national, ajoute Bghouri. Les laisser se débattre dans le déficit financier au risque de couler sera désastreux. Les sauvegarder, ainsi que les autres, relève de l’intérêt public. L’aide publique doit cependant être bien ciblée, exigeant une bonne gouvernance et une totale transparence. Nous avons besoin de médias rentables et forts qui garantissent la production au quotidien d’une presse de qualité. Tout un débat à engager !».
«La première étape, estime le président du syndicat des journalistes, c’est la désignation auprès du chef du gouvernement d’un vis-à-vis dûment habilité à traiter du dossier des médias dans toutes ses dimensions. Nous avons des problèmes juridiques, techniques, financiers, statutaires et autres qui ne sauraient attendre davantage et doivent être immédiatement pris en charge. Lorsque le toit risque de tomber, c’est sur nous tous, sans distinction, journalistes, maquettistes, techniciens, administratifs et employeurs ! Il y a urgence en la demeure !».
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