Le secrétaire exécutif de la Commission économique pour l'Afrique, Carlos Lopes: les causes des conflits en Afrique
Addis Abeba, de l'envoyé spécial de Leaders Abdelhafih Harguem - Ceux qui ont assisté à la cérémonie d'ouverture de la 28e session du Conseil exécutif de l'Union Africaine mercredi à Addis -Abeba ont dû relever la remarquable allocution de Carlos Lopes, secrétaire général adjoint des Nations Unies et secrétaire exécutif de la Commission économique pour l'Afrique.Un ton nouveau, une vision perspicace,une profonde connaissance des réalités du continent et un style imagé qui tranchent nettement avec ce qu'on a l'habitude d'entendre en pareilles occasions.
Carlos Lopes a trouvé le moment propice pour livrer son point de vue sur une partie du discours sur le continent qui fait moins l'objet d'analyses stratégiques par les Africains eux-mêmes: les causes des conflits.
Il cite d'abord le plus grand génocide depuis la seconde guerre mondiale, celui du Rwanda qui a fait des centaines de milliers de victimes.
Cette effroyable réalité, dit-il, nous oblige à comprendre comment cela a été possible.L'un de ceux qui ont pris part à ces tueries effroyables a raconté : " la règle numéro un,c'était de tuer. La règle numéro deux...Il n'y avait pas de règle numéro deux".
"Chez ceux qu'on appelle terroristes, qu'il s'agisse d'Al Shabbab, de Boko Haram ou des auteurs des carnages en République centrafricaine ou au Soudan du Sud discerne-t-on un même code de conduite?Tuer sans remords? Le faire comme un travail,qui vaut mieux que de cultiver ou de survivre à la périphérie,et s'offrir après un bon verre et rire de la panique provoquée et de l'attention des médias. Comment cela peut-il se produire?Comment cela peut-il continuer à se produire ?", s'interroge Carlos Lopes.
Pour cet expert international, d'énormes écarts dans la répartition et l'exercice du pouvoir politique engendrent des conflits violents, en l'absence de mécanisme politique s'attaquant aux inégalités.Les inégalités entre groupes, plutôt qu'entre individus sont sans doute la première cause de conflits en Afrique. Elles se manifestent sur trois niveaux,qui se renforcent mutuellement: économique, social et politique.
L'exclusion des jeunes, avertit-il, mérite une attention particulière.L'existence de jeunes non instruits et au chômage est une caractéristique des pays qui ont connu des conflits.Cette fraction de la population marginalisée et exclue figure au premier plan pendant le conflit, dans les rangs des combattants, et est moins visible en temps de paix.
Après avoir fait remarquer que sur les 54 États que compte l'Afrique, seuls huit n'ont pas connu de conflit armé ou violent depuis leur indépendance, Carlos Lopez souligne que la guerre offre des occasions pour piller, tirer profit des pénuries et de l'aide,du commerce des armes,et pour se livrer à la production et au commerce illicites du pétrole, ainsi qu'au trafic de stupéfiants, de diamants, de bois et d'autres matières premières.
Carlos Lopes estime que la priorité pour l'Afrique consiste à s'attaquer de toute urgence aux causes des conflits,sinon tout le monde paiera le prix lié à la perception de la fragilité.
Et de conclure: «soit l'Afrique a déjà une forte immunité pour lutter contre les effets viraux des groupes terroristes, de par la force des institutions et de ses capacités, soit elle doit développer de toute urgence un vaccin pour se prémunir des dégâts causés par ces groupes». Ce vaccin pourrait s'appeler «antidote à l'exclusion".
Carlos Lopes, originaire de la Guinée- Bissau, est devenu en septembre 2012 le huitième Secrétaire exécutif de la Commission économique pour l'Afrique, avec rang de Secrétaire général adjoint. Il a occupé de mars 2007 à août 2012 les postes de Directeur général de l'Institut des Nations Unies pour la formation et la recherche (UNITAR) à Genève et de Directeur de l’École des cadres du système des Nations Unies à Turin.
Auparavant,Lopes avait été Sous-Secrétaire général de l’ONU et Directeur des affaires politiques au cabinet du Secrétaire général de 2005 à 2007.
Lopes a largement contribué à la recherche dans le domaine du développement. Spécialiste du développement et de la planification stratégique, il a écrit ou édité 22 livres et a enseigné dans des universités et institutions académiques à Lisbonne, Coimbra, Zurich, Uppsala, Mexico, São Paulo et Rio de Janeiro. Outre qu’il appartient à un grand nombre de réseaux académiques, il a contribué à la création d’organisations non gouvernementales et d’institutions de recherche en matière de sciences sociales, notamment en Afrique.
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