L’éducation nationale, voilà le trésor de la Tunisie
Par Mohamed Larbi Bouguerra - Enfin, l’oracle est tombé. Plus de suspense braves gens : nous connaissons enfin la date de la rentrée scolaire. Car, à l’heure où les hommes reçoivent, par l’intermédiaire de la sonde de la NASA, des images exceptionnelles de Jupiter - la plus grosse planète du système solaire située à 750 millions de km de la Terre- nous restons tributaires de la vision oculaire des phases de la lune pour régler notre quotidien. Les astronomes sont en mesure même de dire que le 7 avril 2017, le Soleil, la Terre et Jupiter seront alignés mais, en Tunisie, on ne peut encore fixer le 1er Ramadan 1438. On attendra qu’une foule bigarrée gravisse, par exemple, les hauteurs de Sidi Belhassen, armée parfois d’instruments d’optique pourtant inconnus au VIIème siècle, pour en décider ! La désorganisation des transports, des plannings des gardes dans les hôpitaux, des hôtels, des pensionnats, des services de sécurité…. peut atteindre des sommets et crucifier les Tunisiens mais certains pavoisent car ils ont vu le croissant comme jadis, avant la boussole, quand les caravanes de chameaux sillonnaient le Hedjaz et le Rub al Khali guidées par les étoiles.
En fait, la rentrée des classes n’est pas une simple date administrative. Elle devrait être une fête. Dans beaucoup de pays d’Europe centrale et en Russie, à la rentrée des classes, les élèves offrent des fleurs aux enseignants. Chez nous, actuellement, pour cette rentrée, on ne parle que de sit-in, de protestations, de promesses non tenues et les dates de grève sont déjà gravées dans le marbre ! Un responsable syndicaliste du secondaire – historien de surcroît- n’hésite pas à utiliser des expressions grossières qui feraient rougir les gibiers de potence…pour appuyer les revendications des enseignants.
Est-ce avec de tels professeurs qu’on formera les jeunes Tunisiennes et les jeunes Tunisiens ?
Comment celà se passe ailleurs?
Comment changer la donne?
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Le malheur de l'enseignement chez nous vient aussi de l'absence de contrôle de l'enseignant qui se croit souvent détenir un pouvoir absolu face à des d'apprenants réduits au silence. Ceci est vrai même chez les enseignants de l'Université dont certains prétendent détenir la science infuse. Je cite le cas d'un célèbre enseignant qui a assuré pendant plusieurs années un cours en dernière année de maîtrise de chimie d'une manière assez particulière. L'auteur de l'article le connait bien. Cet enseignant entre en salle de cours avec quelques ouvrages en anglais sous le bras et commence par les étaler sur le pupitre aux pages qu'il avait auparavant repérées. Son cours consistait à débiter aux étudiants des phrases traduites sur le volet à partir de ces ouvrages ou extraites de documents de la presse écrite. Pouvait-il se rappeler des notions qu'il avait développées dans les séances précédentes? Rien n'est moins sûr. Quoi qu'il en soit, gare à celui/ou celle qui oserait poser une question ou demander des précisions quant à la configuration d'un atome de carbone présent dans une structure développée d'une molécule écrite au tableau. Certains étudiants en ont fait les frais et se sont même vu rétorquer qu'ils n'auront jamais leur diplôme tant qu'il continue, lui, à présider aux destinées de cet enseignement. Un de ses anciens étudiants m'a raconté qu'il lui arrivait même de demander, à plusieurs reprises dans une même séance, à l'un de ses étudiants féru de poésie arabe de lui réciter des vers et cela le mettait en extase. Quelle "belle image" du Professeur avait-il montré à ces futurs enseignants! Quelle mascarade dans un cours de chimie et quelle désinvolture dont plusieurs promotions d'étudiants de chimie ont fait les frais au vu et su de tout le monde sans que l'entourage ne bouge le petit doigt en raison de la chape de plomb qui règnait à cette époque. Personne n'osait critiquer les méthodes pédagogiques d'un collègue, qui plus est, se prenait pour le savant qui a atterri par erreur dans un désert scientifique. Quant à l'administration, elle avait d'autres chats à fouetter et ne pouvait, de toutes façons, rien faire faute de règlement sanctionnant ce genre de dérive. Dans notre inconscient collectif, nous avons hérité l'image du Savant Français à la parole divine et au comportement exemplaire, certains de nos enseignants étaient des charlatans et/ou des despotes. A quand une inspection des enseignants et une évaluation de leurs méthodes pédagogiques par les étudiants?
La tête bien faite, n’est pas, malgré ce qu’en disent les manuels de pédagogie et les professionnels qui vont avec, l’idéal que se proposent les prétendues « sciences de l’éducation ». En revanche, une tête bien pleine, donc pas d’intelligence, mais de la mémoire, pas de culture de la réflexion mais une habitude scolaire de la réponse. Pour s’en rendre compte, il suffit de constater combien les examens exigent un cerveau en éponge, immédiatement vidé de son contenu et manuels jetés le diplôme obtenu. Sinon, pourquoi autant d’élèves ayant pratiqué pendant tant d’années l’anglais sont-ils incapables de demander leur chemin à Londres ? Le seul remède impose beaucoup de revenir à la morale saturée de moraline, autant travailler dès le plus jeune âge à une éthique, à une exigence de valeurs et de vertus. Non pas la tête bien pleine farcie de sentences issues d’un catéchisme figé, mais la tête bien faite à même de construire une éthique digne de ce nom. Pour construire enfin des individus droit et debout pour la société, l’Etat, la Nation, la République et l’Entreprise.