Souad Bakalti: Sur les traces de Bourguiba… à l’ile de Groix

Ce qui est bien avec les vacances, c’est qu’il y a toujours une petite place pour l’imprévu.

Tout commence un jour de juillet ensoleillé en Bretagne (!). Nous avons décidé de partir à la découverte de l’ile de Groix, parce que c’est beau et sauvage et parce qu’on peut y faire du vélo. Il y a aussi ce souvenir concernant Habib Bourguiba qui y a séjourné, mais pas pour des vacances puisqu’il y était envoyé par la France en exil forcé pendant cinq mois en 1954.

A peine débarqués, direction le loueur de vélos. L’ile est petite, et il faut peu de temps pour atteindre les différentes plages en sillonnant les chemins étroits. Nous voilà vite revenus près du port dans le village nommé LeBourg,la capitale. Avant de quitter l’île, je tenais vraiment à retrouver la trace du passage de Bourguiba. Je cherche une pancarte, un panneau, un indice, mais rien….Passage à l’éco-musée, le haut lieu patrimonial local, mais cela ne leur dit rien. Juste avant de rejoindre l’embarcadère pour la traversée retour, une dernière  tentative désespérée à l’office de tourisme : « bonjour Madame, est ce que vous avez entendu parler d’une maison où a séjourné  le président tunisien Habib Bourguiba ? « Mais bien sûr» me répond cette dame, « c’est à deux rues d’ici ». La chance est avec moi ! En inscrivant l’adresse et le plan sur un bout de papier, elle évoque le souvenir d’une amie (alors gamine) habitant en face de la maison d’exil, et lui rapportant que Bourguiba lui avait offert des oranges tunisiennes.

Je me rends à l’adresse indiquée. C’est une petite maison à deux étages dans une petite rue calme. Mais toujours aucune plaque ou signe distinctif. Pour immortaliser l’instant, je demande à mon mari de prendre quelques photos avant de repartir. Mais notre manège a attiré l’attention des habitants de la maison, qui ouvrent la fenêtre pour savoir qui sont ces gens bizarres qui s’extasient.

Je bafouille un peu avant de retrouver mes esprits. « Je suis tunisienne, historienne et admiratrice d’Habib Bourguiba, on nous a dit qu’il avait vécu ici ». La propriétaire me le confirme et accepte ma demande de visiter les lieux. A partir de cet instant, tout n’a été que bienveillance et enchantement. Nous avons pu monter au 2eme étage où se trouvait la chambre de Bourguiba et l’émotion était forte en se disant qu’il avait été là et qu’il avait regardé par la même fenêtre. Cerise sur le gâteau, le propriétaire était le fils d’un journaliste qui avait interviewé le président Bourguiba pour le Figaro. Il en était tellement fier que la photo des deux hommes était accrochée au mur du salon. Après une longue discussion sur les rapports entre la Tunisie et la France, nous sommes ressortis un peu étourdis par ce moment de grâce.

De retour à terre (ou sur terre), quelques jours après, j’ai sollicité le maire pour lui suggérer de développer cette partie peu connue du patrimoine de l’ile de Groix. Il fallait au pire une plaque immortalisant cette page d’Histoire et au mieux une rue Bourguiba, et bien sûr une place dans le musée. Le maire m’a aimablement répondu, mais je ne sais pas ce qui a été fait depuis… C’était en 2009!

Souad Bakalti