Mohamed Ibrahim Hsairi: Un coup d’œil sur la nouvelle doctrine de politique étrangère de la Russie
Au moment où un nouvel ordre mondial continue, sans cesse, à se dessiner, la Fédération de Russie, qui aspire à y jouer un rôle majeur, vient de révéler le concept de sa nouvelle doctrine de politique étrangère par laquelle elle entend participer activement au façonnement du monde multipolaire en gestation.
Présenté par le président Vladimir Poutine le 31 mars 2023, lors d’une réunion du Conseil de sécurité nationale, ce concept de 42 pages et qui comprend 6 parties et 76 paragraphes, est décrit comme «un document de planification stratégique».
Remplaçant la version adoptée en 2016, il «représente un système d’attitudes envers les intérêts nationaux de la Fédération de Russie dans le domaine de la politique étrangère, des principes de base, des objectifs stratégiques, des tâches essentielles et des axes prioritaires de la politique étrangère russe».
À mon avis, ce document qui mérite d’être examiné attentivement est important parce qu’il est «truffé» de messages en ce qui concerne la manière dont la Russie perçoit et envisage d’approcher ses rapports avec les différents pays du monde, les priorités qu’elle se donne dans les affaires internationales, et les grandes orientations qui guideront, dorénavant, sa politique étrangère.
En dix points, je me propose de passer en revue, ci-après, les plus importants de ces messages, y compris ceux destinés aux sphères de l’appartenance de notre pays:
1/ Le message de la Russie au monde
Etant l’une des deux puissances nucléaires les plus importantes et forte de sa place dans le monde qui est définie notamment par ses ressources importantes, son statut de membre permanent du Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies, sa participation aux organisations et associations internationales majeures, son apport décisif à la victoire dans la Seconde Guerre mondiale, et sa contribution active à la création du système contemporain des relations internationales et à la liquidation du système mondial du colonialisme, la Russie, affirme le concept, est «un des centres souverains du développement mondial et assume sa mission historique unique qui consiste à maintenir la balance globale des puissances, à construire un système international multipolaire, et à assurer les conditions pour l’évolution paisible et progressive de l’humanité sur la base d’un agenda unifiant et constructif».
A cet effet, elle «poursuit une politique étrangère indépendante et multidimensionnelle dictée par ses intérêts nationaux et sa responsabilité particulière pour le maintien de la paix et de la sécurité au niveau global et régional».
Cette politique, précise le concept, «est pacifique, ouverte, prévisible, cohérente et pragmatique, et elle est basée sur le respect des normes et principes universellement reconnus du droit international et sur l’aspiration à la coopération internationale équitable et la promotion des intérêts communs».
D’autre part, la Russie du président Vladimir Poutine, qui se présente comme le champion des «valeurs traditionnelles» de l’Église orthodoxe face à un Occident présenté comme décadent, s’emploiera à la consolidation des efforts internationaux visant à assurer le respect et la protection des valeurs spirituelles et morales universelles et traditionnelles, la neutralisation des tentatives d’imposer des orientations pseudo-humanistes et d’autres orientations idéologiques néolibérales entraînant la perte, par l’humanité, des repères spirituels et moraux et des principes traditionnels, ainsi qu’au dialogue constructif, au partenariat et à l’enrichissement mutuel entre différentes cultures, religions et civilisations».
2/ Le message de la Russie aux différents Etats du monde
La Russie affirme que son «attitude envers les autres États et les associations interétatiques est définie par le caractère constructif, neutre ou inamical de leur politique à son égard».
De même, elle est définie en fonction de «l’époque de changements révolutionnaires» que l’humanité traverse, aujourd’hui, et du «monde plus équitable et multipolaire qui continue à se former».
Estimant, par ailleurs, que le modèle inéquitable du développement mondial appartient désormais au passé, elle se réjouit du renforcement de la souveraineté des puissances mondiales non occidentales et des pays leaders régionaux, et de l’augmentation de leurs capacités concurrentielles, car ceci donnera lieu à la restructuration de l’économie mondiale et favorisera la démocratisation des relations internationales.
3/ Le message de la Russie à l’Occident
Bien que l’Occident ait à son égard «une posture qui a pris un caractère global et qui a été fixée au niveau doctrinal», la Russie, affirme le document, «ne se positionne pas comme son ennemie, ne s’en isole pas, et n’a pas d’intentions hostiles à son égard».
En effet, elle croit que, dans l’avenir, les États faisant partie de la communauté occidentale prendront conscience de l’inutilité de leur politique conflictuelle et des ambitions hégémoniques, qu’ils prendront en compte les réalités compliquées d’un monde multipolaire et reviendront à l’interaction pragmatique avec elle en se basant sur les principes d’égalité souveraine et de respect des intérêts mutuels. Et c’est dans ce contexte qu’elle est prête au dialogue et à la coopération.
Toutefois et en attendant, la Russie qui considère, pour le moment, que «les menaces de l’Occident sont de nature existentielle», est résolue à défendre son droit à l’existence et au développement libre par tous les moyens disponibles, à tous les niveaux et dans tous les domaines.
4/ Le message de la Russie aux États-Unis et leurs satellites
Les États-Unis sont pour la Russie, selon les termes du chef de sa diplomatie, Sergueï Lavrov «l’instigateur principal et le chef d’orchestre de la ligne antirusse».
Le concept de la nouvelle doctrine de politique étrangère russe l’affirme en disant que ce sont les États-Unis qui, considérant la politique étrangère indépendante de la Russie comme une menace à l’hégémonie occidentale, «ont utilisé les mesures prises par Moscou afin de protéger ses intérêts vitaux sur le vecteur ukrainien, comme prétexte pour exacerber leur politique antirusse, et déclencher une guerre hybride d’un nouveau type qui vise à pleinement l’affaiblir, à saper son rôle civilisationnel créateur et ses capacités économiques et technologiques, ainsi qu’à limiter sa souveraineté dans la politique intérieure et extérieure et à détruire son intégrité territoriale».
Toutefois, le concept note que «la politique de la Russie à l’égard des États-Unis a un caractère combiné, compte tenu du rôle de cet État en tant qu’un des centres souverains influents du développement mondial, et en même temps l’inspirateur, organisateur et réalisateur essentiel de la politique antirusse agressive de l’Occident collectif, source des risques essentiels pour la sécurité de la Fédération de Russie, la paix internationale et le développement équilibré, équitable et progressif de l’humanité».
C’est pourquoi, souligne le concept, «la Russie a intérêt au maintien de la parité stratégique, à la coexistence pacifique avec les États-Unis et à l’établissement de l’équilibre des intérêts entre les deux pays, eu égard à leur statut de puissances nucléaires majeures et à leur responsabilité particulière pour la stabilité stratégique globale et l’état de la sécurité internationale en général».
Néanmoins, «les perspectives de l’établissement de ce modèle des relations russo-américaines dépendent du degré de disponibilité des États-Unis à renoncer à la politique de domination par la force et à revoir la politique antirusse au profit de l’interaction avec la Russie sur la base des principes d’égalité souveraine, de profit mutuel et de respect mutuel des intérêts».
En attendant, la Russie est déterminée à contrer les agissements des Américains, et elle «accorde une attention prioritaire à l’élimination des rudiments de la prédominance des États-Unis et des autres États inamicaux dans les affaires internationales et à la création des conditions pour que tout État renonce aux ambitions néocoloniales et hégémoniques».
Pour ce faire, elle aura recours à divers moyens dont particulièrement «la concentration de son énergie créatrice sur les vecteurs géographiques de sa politique étrangère qui lui offrent de vastes possibilités pour une activité réussie sur la scène internationale», car, estime-t-elle, «la plupart de l’humanité est intéressée par les relations constructives avec la Russie et le renforcement de ses positions sur la scène internationale en tant que puissance mondiale influente qui apporte une contribution décisive au maintien de la sécurité globale et au développement paisible des États».
Dans cette optique, elle veillera à «l’établissement d’une large interaction afin de neutraliser les tentatives de tous États et alliances interétatiques d’obtenir la prédominance globale dans le domaine militaire, de projeter leur force au-delà de leur zone de responsabilité, de s’approprier la responsabilité prioritaire pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales, de tracer des lignes de division et d’assurer la sécurité de certains États au détriment des intérêts légitimes des autres pays».
De même, elle intensifiera les efforts politiques et diplomatiques visant à «prévenir le recours à la force militaire en violation de la Charte de l’ONU, avant toutes les tentatives de contourner les prérogatives du Conseil de sécurité de l’ONU et de violer les conditions pour l’exercice du droit naturel de légitime défense, garanti par l’article 51 de la Charte de l’ONU».
5/ Le message à l’Amérique latine et aux Caraïbes
Vu le renforcement progressif de leur souveraineté et de leur potentiel pluridimensionnel, la Russie développera ses relations avec des États d’Amérique latine et des Caraïbes sur une base pragmatique, non idéologique et mutuellement avantageuse.
En outre, elle soutiendra «les États d’Amérique latine intéressés qui sont soumis à la pression des États-Unis et de leurs alliés pour assurer leur souveraineté et leur indépendance, y compris en établissant et en élargissant l’interaction dans les domaines de la sécurité, de la coopération militaire et technique». Et parallèlement au renforcement de l’amitié, de la compréhension mutuelle et à l’approfondissement du partenariat pluridimensionnel et mutuellement avantageux avec le Brésil, Cuba, le Nicaragua et le Venezuela, elle développera des relations avec les autres États d’Amérique latine, «compte tenu de leur degré d’autonomie et du caractère constructif de leur politique envers la Fédération de Russie».
6/ Le message de la Russie à «la région européenne»
Constatant que la plupart des États d’Europe mènent une politique agressive envers elle, la Russie continuera de défendre ses intérêts nationaux «en prêtant une attention prioritaire à la réduction et la neutralisation des menaces provenant de ces États, de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord, de l’Union européenne et du Conseil de l’Europe, à sa sécurité, son intégrité territoriale, sa souveraineté, ses valeurs spirituelles et morales traditionnelles et son développement social et économique ainsi qu’à ceux de ses alliés et partenaires».
Mais simultanément, elle tâchera «de créer des conditions pour que les États européens et leurs alliances cessent leurs actions hostiles, abandonnent complètement le vecteur antirusse et passent vers une politique durable de bon voisinage et de coopération mutuellement avantageuse avec la Russie».
Aux yeux de Moscou, la formation par les États européens d’un nouveau modèle de coexistence permettant d’établir la paix durable dans la partie européenne de l’Eurasie, et d’assurer le développement sûr, souverain et progressif de la Russie et de ses alliés et partenaires, est possible, sachant que «les prémices objectives pour la formation de ce nouveau modèle de coexistence sont la proximité géographique, les liens historiques culturels, humanitaires et économiques profonds des peuples et des États de la partie européenne de l’Eurasie».
Cependant, et étant donné que le facteur principal qui complique la normalisation des relations entre la Russie et les États d’Europe est le vecteur stratégique des États-Unis et de certains de leurs alliés, Moscou estime que «les États d’Europe doivent comprendre qu’il n’y a pas d’alternatives à la coexistence pacifique et la coopération égale et mutuellement avantageuse, et que la transition à la politique de bon voisinage avec la Fédération de Russie seront bénéfiques pour la sécurité et le bien-être de la région européenne et aideront les États européens à prendre une place digne au sein du Grand partenariat eurasiatique et du monde multipolaire».
7/ Le message de la Russie à «l’étranger proche»
La Russie aspire à la transformation de ce qu’elle appelle son «étranger proche», c’est-à-dire les États membres de la CEI et d’autres États limitrophes liés à la Russie, «en une zone de paix, de bon voisinage, de développement durable et de bien-être, et ce par la prévention et le règlement des conflits armés, l’amélioration des relations interétatiques, la garantie de la stabilité dans cette région, y compris par la répression de l’inspiration des «révolutions de couleur» et des autres tentatives d’ingérence dans les affaires intérieures des alliés et partenaires de la Russie».
En outre, la Russie assurera «la protection de ses alliés et partenaires dans n’importe quel scénario militaire et politique, et s’opposera au déploiement ou au renforcement de l’infrastructure militaire des États inamicaux et aux autres menaces à la sécurité de la Russie dans son étranger proche».
Moscou procédera, par ailleurs, à «l’intensification des processus d’intégration et d’interaction stratégique avec la Biélorussie et les États d’Asie centrale, à la formation d’un large contour d’intégration en Eurasie à long terme, à la prévention et la répression des actions hostiles des États inamicaux et de leurs alliances provoquant des processus de désintégration dans l’étranger proche, au renforcement de la coopération dans la région de la mer Caspienne, et au soutien global de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud».
8/ Le message de la Russie au «continent eurasien» et particulièrement à la Chine et à l’Inde
La Russie, affirme le concept, «aspire au renforcement des relations de partenariat exhaustif et de coopération stratégique avec la Chine. Elle prête une attention particulière au développement de la coopération mutuellement avantageuse dans tous les domaines, à l’entraide et au renforcement de la coordination sur la scène internationale afin d’assurer la sécurité, la stabilité, le développement durable aux niveaux global et régional en Eurasie comme dans les autres parties du monde».
De même, elle «renforcera davantage son partenariat stratégique particulièrement privilégié avec l’Inde afin d’élargir la coopération et d’en augmenter le niveau dans tous les domaines sur une base mutuellement avantageuse». Elle prêtera une attention particulière à «l’augmentation des volumes des relations bilatérales commerciales, technologiques et d’investissements, et veillera à assurer leur résistance aux actions destructives des États inamicaux et de leurs alliances».
Cette orientation vers l’approfondissement global des relations et de la coordination avec les centres globaux souverains amicaux de force et de développement situés sur le continent eurasien revêt une importance particulière pour la Russie car elle l’aidera dans «la réalisation des objectifs stratégiques et des buts essentiels de sa politique étrangère, notamment en ce qui concerne son aspiration à transformer l’Eurasie en un espace continental de paix, de stabilité, de confiance mutuelle, de développement et de bien-être».
Il est à noter, à ce propos, que la Russie prévoit «le règlement de la situation en Afghanistan, en aidant à sa restauration en qualité d’État souverain, pacifique, neutre avec une économie stable et un système politique répondant aux intérêts de tous les groupes ethniques qui l’habitent, ce qui ouvrira les perspectives pour l’intégration de l’Afghanistan dans l’espace eurasiatique de coopération».
9/ Le message de la Russie au monde islamique
Considérant que les États de la civilisation amicale islamique sont des partenaires de plus en plus sollicités et fiables dans les questions de sécurité, de stabilité et de règlement des problèmes économiques aux niveaux global et régional, la Russie s’emploiera à «renforcer la coopération intégrale et mutuellement avantageuse avec les États membres de l’Organisation de la coopération islamique, tout en respectant leurs régimes sociopolitiques et les valeurs spirituelles et morales traditionnelles».
Pour leur part, et en contrepartie, ces Etats «verront s’ouvrir devant eux, dans les réalités d’un monde multipolaire, de vastes perspectives d’établissement en tant que centre indépendant du développement mondial».
Nommément, la Russie va accorder une attention prioritaire à l’élargissement de l’interaction exhaustive et de confiance avec l’Iran, au soutien intégral de la Syrie, à l’approfondissement du partenariat multidimensionnel et mutuellement avantageux avec la Turquie, l’Arabie saoudite, l’Égypte. Pour les autres États membres de l’Organisation de la coopération islamique, les relations seront renforcées «compte tenu de leur degré de souveraineté et du caractère constructif de leur politique envers la Fédération de Russie».
Moscou envisage, également, «la formation d’une architecture exhaustive durable de sécurité régionale et de coopération au Proche-Orient et en Afrique du Nord sur la base de l’association des potentiels de tous les États et associations interétatiques des régions, y compris la Ligue des États arabes et le Conseil de coopération des États arabes du Golfe».
Dans ce cadre, elle entreprendra «une interaction active avec tous les États et associations interétatiques intéressés, afin de mettre en place le Concept russe de la sécurité collective dans la zone du golfe Persique, considérant la réalisation de cette initiative comme un pas important vers l’assainissement durable et complet de la situation au Proche-Orient».
En outre elle favorisera:
• «la promotion du dialogue interreligieux et interculturel et de la compréhension mutuelle, de la consolidation des efforts pour la protection des valeurs spirituelles et morales traditionnelles, et de la lutte contre l’islamophobie, y compris dans le cadre de l’OCI.
• La résolution des contradictions et la normalisation des relations entre les États membres de l’OCI, aussi bien qu’entre ces États et leurs voisins (avant tout l’Iran et les pays arabes, la Syrie et ses voisins, les pays arabes et l’État d’Israël), y compris dans le cadre des efforts visant au règlement exhaustif et durable de la question palestinienne.
• Le règlement et la liquidation des conséquences des conflits armés au Proche-Orient, en Afrique du Nord, en Asie du Sud et du Sud-est et dans d’autres régions où les États membres de l’Organisation de la coopération islamique sont situés.
• L’emploi du potentiel économique des États membres de l’Organisation de la coopération islamique pour la formation du Grand Partenariat eurasiatique».
10/ Le message de la Russie à l’Afrique
La Russie affirme qu’elle est «solidaire avec les États africains dans leur aspiration à établir un monde multipolaire plus équitable et à éliminer l’inégalité sociale et économique qui se renforce à cause de la politique néocoloniale ingénieuse de certains États occidentaux à l’égard de l’Afrique».
Elle aidera à «l’établissement ultérieur de l’Afrique comme un centre authentique et influent du développement mondial en prêtant une attention particulière:
• Au soutien de la souveraineté et de l’indépendance des États africains intéressés, y compris en prêtant assistance dans les domaines de la sécurité (incluant la sécurité alimentaire et énergétique) et de coopération militaire et technique.
• A l’aide au règlement et à la liquidation des conséquences des conflits armés, surtout internationaux et ethniques, en Afrique, et ce en soutenant le rôle leader des États africains dans ces efforts à partir du principe formulé par eux-mêmes de «solution africaine aux problèmes africains».
• Au renforcement et à l’approfondissement de l’interaction russo-africaine dans différents domaines sur une base bilatérale et multilatérale, avant tout dans le cadre de l’Union africaine et du Forum du partenariat Russie-Afrique.
• A l’augmentation du chiffre de commerce et des investissements avec les États africains et les structures d’intégration d’Afrique.
• A l’assistance et au développement des liens dans le domaine humanitaire, y compris la coopération scientifique, la formation des cadres nationaux, le renforcement des systèmes de santé, l’octroi d’autres types d’assistance, la promotion d’un dialogue interculturel, la protection des valeurs spirituelles et morales traditionnelles et du droit à la liberté de religion».
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Ce sont là, à mon avis, les principaux messages, tantôt rassurants, tantôt menaçants, que la Russie a voulu adresser aux Etats dits «amicaux et inamicaux». Emis à un moment où elle poursuit, méthodiquement, mais difficilement, son «opération spéciale en Ukraine», ces messages semblent avoir pour objectif de faire face à ce qu’elle appelle «la campagne coordonnée de propagande antirusse menée, systématiquement, par les États inamicaux et usant de la désinformation, de la diffamation et même de l’incitation à la haine.
Mais la Russie sera-t-elle capable de tenir les promesses qu’elle a faites et concrétiser les menaces qu’elle a proférées dans ces messages ? C’est la question que se posent les analystes.
En tous les cas, pour corroborer que le «concept» de sa nouvelle doctrine de politique étrangère n’est pas une simple profession de foi ou de la pure rhétorique, la Russie a assorti ses messages d’un vaste programme d’actions minutieusement circonstancié à mettre en œuvre.
En attendant, il semble que les pays occidentaux, par leurs premières réactions à ce «concept», n’ont pas compris ou feignent de ne pas comprendre les messages qui leur sont adressés par Moscou. En effet, ils ont considéré que la nouvelle doctrine de politique étrangère russe, qu’ils ont taxée d’anti-occidentale par excellence et de conflictuelle, entérine, en des termes agressifs, la profonde rupture qui existe entre la Russie et l’Occident depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine. D’aucuns vont jusqu’à dire que cette nouvelle doctrine par laquelle la Russie affirme sa détermination à «éliminer les vestiges de la domination des Etats-Unis et d’autres Etats hostiles dans les affaires mondiales» présage d’un affrontement digne de l’époque de la Guerre froide.
Il est, donc, à craindre que le lancement, en ce moment extrêmement précaire, de la nouvelle doctrine de politique étrangère russe marque l’entrée effective du monde dans une nouvelle ère de confrontation entre la Russie et ses alliés et les Etats-Unis et leurs satellites.
La crainte est d’autant plus grande pour les mondes arabe et islamique et pour le continent africain car ils risquent, tous, d’être condamnés à demeurer, pour longtemps encore, des sphères pour la sourde lutte d’influence et de rivalité entre les anciens et futurs «grands» du monde multipolaire à venir.
Mohamed Ibrahim Hsairi
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