Opinions - 10.01.2012

L'année de la Tunisie, de l'âne et du fric

Au risque d’être qualifié - pour une fois - d’egocentriste , 2011 aura été l’année  de la Tunisimania, de l’âne et de la crise du fric. Pourquoi?

La révolution  Tunisienne  du 14 /01  pour la dignité et la liberté  a  catalysé  à travers le monde  un mouvement global  d’émancipation  politique et  de révolte  contre la paupérisation  et la bêtise .

La cadence  tumultueuse de ce mouvement  s’étire encore   sans que certains pays  ne parviennent à  retrouver la stabilité  susceptible  de bâtir  les socles de la démocratie politique  et de économie sociale. 

C’est comme si l’histoire s’amusait à faire écho à l’écrivaine  Helé Béji qui confessait  dans  l’essai «  Nous, décolonisés » que  «  Le monde que je laisse derrière moi est plein de secrets inaccessibles et celui vers lequel j’avance m’oppose des obstacles infranchissables « ( fin de citation ).

Au départ, rien ne prédestinait la Tunisie à assumer ce rôle de locomotive de  la mutation planétaire, n’eut été le cumul de gaffes  politiques et d’injustices sociales réprimées de manière disproportionnées.

Toujours est-il, que la fuite de l’ex- président  déchu  Zine ben Ali vers l’Arabie  a mis en branle un mécanisme  mettant  un terme à 23 ans de pouvoir sécuritaire, de pensée quasi-unique et d’enrichissement illicite.

Et quand bien même, la Tunisie semble s’en sortir avec  de nouvelles institutions chargées de préparer le terrain à l’emergence de la 2ème République, d’autres pays  arabes contaminés par le virus de la liberté  s’enlisent   dans un cycle de  la violence et la répression. Avec  en filigrane  des changements irréversibles. Sans doute.

Après  30  ans de règne, l’ex Rais égyptien Hosni Moubarak a été forcé de quitter en février 2011 le pouvoir pour la civière.

Des mouvements de protestation devaient éclater au Maroc, Algérie , Soudan, Oman et Jordanie  contraignant leurs  dirigeants à anticiper des réformes pour contenir la déferlante de la liberté issue de ce qu’on dénomme sous le vocable romancé  du « printemps arabe».

En mars de la même année, le Bahrein et la Libye  ont été  sécoués par des manifestations. Alors que la famille régnante bahareinie ne doit sa survie- provisoire-  qu’à l’intervention blindée de sa  voisine de la famille  Al Saoud,  la révolte  libyenne soutenue par des raids meurtriers de  l’Otan était venue à bout du régime de Mouamar  Khadafi.Sa fin tragique a été conclue en Octobre après quatre décennies de pouvoir « perver (s)t » .
Sentant l’odeur du  sang sur les mains , le président yéménite Ali Salah  s’apprête – après trois décennies – à abandonner le pouvoir en  février 2012  livrant  un pays martyrisé et au bord de la guerre civile. Et pour aller où ?
Par contre, son homologue syrien Bachar Assad s’y accroche , sans que la délégation de la ligue arabe  ne  parvienne à  stopper  l’effusion  de sang que connaît  le pays depuis neuf mois.

L’année de  l’âne

Hasard ou  coïncidence du calendrier ? La Tunisie, berceau du printemps arabe a franchi 2011 par une apologie théâtrale  de la « révolte de l’homme à l’ane », tiré d’un récit d’Azzedine al Madani.

Il y a onze siècles, un  Castillan de Tozeur   répondant au nom de Yazid  abou Kiddad   connu  sous le sobriquet  «  L’homme à l’âne «  entreprit  une épopée  homéro tragique .Ayant  pu  mobiliser sous la bannière de l’Islam sunnite  plus de 40.000 adeptes  , il donna du fil à retordre à l’Emirat chiite de Mahdia, réussissant à soumettre la ville de  Kairouan et à imposer le siège de Tunis  qui n’était qu’un bourg à l’époque. Sa révolte avait  pris fin par  une  répression sanglante.Et la petite histoire n’en a retenu  qu’un  sobriquet.
En  cette année  de grâce ( toujours  2011) ,l’ Arabie Saoudite a  tremblé sous la finesse  désarmante  de sa «  Femme à l’âne « . De quoi s’agit –il ?

Souvenez – vous  de  cette femme d’Arabie  qui revendiquait son droit à  conduire  toute seule  sa voiture – autant que tous les bipèdes sur  terre. Elle en a été empêchée, bien qu’elle soit titulaire d’un permis international .Mieux, aucune loi écrite de son pays ne lui interdisait d’être derrière le volant. En dépit de leur subtilité, tous les  subterfuges qu’elle a utilisés ont été  avortés par les agents saoudiens de la circulation. Et  pour mettre en dérision ce système de  rejet  inexplicable  ( logiquement ), Mme Al Mudhai, (un pseudo, probablement ) n’a  pas trouvé mieux  que ce pied de nez :arpenter  seule  les artères de  Ryadh , la capitale  à dos  d’âne, comme au temps de ses ancêtres bédouins. Rien ne fit, puisqu’aux dernières nouvelles, il lui était reproché d’entraver la circulation. Un véritable casse- tête, s’il en est  en… cette  an(e)-née !

Et  du fric

La crise  a débuté  en mars  lorsque  les agences de notation financière ont revu à la baisse la note de la dette  des  États-Unis  et  de l’ Europe.  Du mauvais usage de l’argent public. Une chaîne  de protestation populaire se déballe en Grèce,  Portugal,  Italie  et en Espagne. Conséquence: la chute des gouvernements de ces quatre  pays et le déclenchement   en septembre  du mouvement «  occupy wall street » à travers les villes américaines. Au passage, l’économie mondiale a pris un sérieux coup qui a profité aux pays du BRICAS (  Brésil, Russie , Inde , Chine et  Afrique du sud ). Les  opinions publiques ont été  édifiées  sur l’ampleur  des  dépassements  et la corruption des structures financières. En Tunisie,  une  commission d’investigation  a levé le voile  sur le trésor caché de Zine and Co. Reste à récupérer d’autres butins placés dans les paradis fiscaux où le blanchiment est monnaie courante.

A côté d’autres événements  mondains et animaliers, c’est ainsi qu’allait  le monde  en  2011 avec ses 7 milliards d’âmes et son lot de catastrophes   (20.000 morts du tsunami au Japon), des changements climatiques aux quatre coins de la planète. Israël persiste et signe dans son rejet de la paix, des attentats  réguliers en Irak, Afghanistan et au Pakistan  où  le chef d’al Qaida , Ben Laden a été liquidé en mai par un commando de marines Us.
 Bref. Un monde qui ne serait pas  le monde si  les secrets étaient  accessibles  et les obstacles   franchissables!

OH
Journaliste

 

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