Tu es l'agneau , Elle est le loup... L'instance ou la méfiance à l'égard d'un certain décret-loi nommé 116
Posons nous d'abord deux questions:
- Combien de chaines de télévision existe-t-il en Tunisie ?
- Qu'est ce qu'une autorité de régulation ?
A la première question ludique, la réponse classique soit une dizaine de stations Tv. Erreur.
Le citoyen Tunisien muni d'un écran, d'un récepteur et d'un dreambox dispose donc de quelques centaines de chaines, entre Free to Air (FTA) et chaines à péage piratées (PayTv). Le téléspectateur ne s'intéresse guère à l'adresse postale, au guichet fiscal du diffuseur. Sa télécommande zappe selon ses habitudes de consommation visuelle, en ces temps de révolution, est beaucoup plus portée sur le fait national mais écarlate en temps normaux.
On est donc dans un environnement extrêmement concurrentiel. Penser le modèle économique en termes de "Secteur Abrité " est totalement irrationnel, car on devrait plutôt parler de "Secteur fortement Exposé ".
Quelles incidences dites-vous ?
Il existe deux incidences directes sur l'opérateur économique national , je nomme le diffuseur / éditeur :
- D'abord l'accès, au statut de diffuseur, ne doit pas être plombé par une Juridiction / Réglementation / Régulation, désavantageuse par rapport à ce qui se passe sous d'autres cieux. Essentiellement les chaines et bouquets embarqués sur Nilesat, Arabsat, Hotbird ... dont les foot-print inondent notre parterre.
- Ensuite l'incidence sur les sources de financement des chaines locales par le biais de l'investissement publicitaire (IP), bien que la télévision du service public semble épargnée puisque gavée en bonne partie par la Redevance.
Les chaines du secteur privé bénéficient, théoriquement aussi, du paiement par les abonnements de leurs services rendus ( Télé à péage) et le Pay per view. Un tel système est inapplicable sous nos cieux, zone de non droit, et de piratage systématique et de Spoliation des droits d'auteurs. Encore faut-il que les chaînes privées nationales à faible revenu potentiel puissent avoir accès à des droits exorbitants (sport , cinema) qui sont et seront l'apanage de firmes en situation monopolistique, pour encore un bon bout de temps.
Qu'en est il donc du financement par la pub? On observe aujourd'hui une fuite de capitaux, de ces investissements vers d'autres chaines "non résidentes" et ce malgré la réglementation de changes , dans un silence assourdissant des pouvoirs publics. La ressource rare pub, doit être protégée par la réglementation pour financer le métier (diffuseur, producteur..) mais certainement défendue par l'autorité aujourd'hui absente. Imaginons que toutes les chaines non résidentes se mettent en mode "bath tajribi" et que aljazira sport acquière les droits du championnat local, quelles miettes publicitaires pourront se partager les autres chaines ?
De même, si l'autorité arrive à faire respecter la loi, pour combien de temps encore, résistera t-elle aux injonctions du marché ouvert et arriverons nous à faire respecter une Clause d'exception Culturelle ?
Première conclusion s'impose: si l'on considère que le secteur d'activité audiovisuelle est un secteur stratégique , innovant, employeur de compétence qualifiée, bénéficiant d'un code d'investissement spécifique, axant sur la formation et investissant dans les infrastructures de base onéreuses, on récoltera un secteur apte à ce que sa production réponde à une large partie de la demande intérieure et secteur candidat à gagner des parts de marché à l'export.
Ceci est avant tout un devoir, une volonté et une affaire de pouvoirs publics et non le rôle ni la mission d'une quelconque Autorité de Régulation.
Or les prérogatives d'une autorité de Régulation à la Tunisienne (au 2e degré et avec beaucoup de non-dits) tels que inscrits et/ou prescrits dans le décret-loi 116 ( la toubachir bikhair) enfantent une ogresse omnipotente qui rejette toute autorité, tout contrepouvoir et s'octroie une "indépendance" qui désengage les pouvoirs publics légitimes de leur rôle et bloquerait de ce fait tout développement du secteur.
Sans le savoir(!) la nouvelle autorité imaginée par feu décret-loi 116 s'accapare les prérogatives des trois pouvoirs:
Le législatif (réglementation),
L'exécutif (détention de fonds de provenance autre que le budget, octroi de licences.. "Retributif" )
Le Judiciaire (retrait, punition.. "Coercitif")
Autant dire un Vatican ou une principauté au droit régalien.
A la deuxième question qu'est-ce qu'une autorité de régulation et/ou pourquoi une telle autorité ?
Il convient avant d' y répondre, d'étendre quelques axes; le temporel, le culturel économique et l'instrumental.
Nous vivons l'ère du troisième millénaire, où les innovations technologiques, les applications scientifiques font rage et orienterons notre mode de choix, de décision et donc de vie.
Nous vivons une Révolution socio-économique des temps modernes.
Nous vivons l'interactivité, l'explosion des besoins de communication, d'expression et de l'exercice de la libre opinion.
Le modèle politico-économico-culturel des années 70 est obsolète, où pour le politiquement correct le meilleur des mondes: un demi et un sandwich grec au quartier Latin. Où, à" vingt ans", On sait tout , dominateur, inquisiteur et pour qui la modernité est arrivé à bon port. Un modèle qui ne peut répondre aux besoins nouveaux. Un modèle que traine encore certains concitoyens détenteurs de vérité, issus d'une certaine gauche de gauche incertaine.
Ecoute "si Saleh" Le meilleur des mondes se trouve à deux heures vingt minutes de là. Embarquons âme et bagages. RE VO LU TI ON oblige.
Alors que nous vivons l'ère du citoyen actif et réactif, libre d'entreprendre sans l'accord préalable des " grands citoyens " fussent ils, même "libertaires humanistes" et donc "Corrects".
Nous vivons le passage du statique à l'ère dynamique post-moderne (f(t)dt) , où nous entrons de plain-pied dans la pratique de la démocratie directe.
Il est donc tout à fait légitime de repenser un nouveau modèle apte à accompagner ces évolutions.
Toute entité éprouve un besoin évident de communication. Une communication non plus linéaire mais plutôt à dimensions multiples et en mode Va-et-Viens. L'homme, l'entreprise, l'association, l'organisation, le politique, l'autorité, la région.. émettent tous ce besoin vital et fondamental de plus en volumineux et rapide. Le message revêt la forme du texte, du son et de l'image combinés et/ou en solo. Ce message induit s'attelle à tout support technique classique et innovant.
La Presse (papier) quand ce fut le message texte.
La Radio quand c'est le son ou parole.
La Télévision quand le message prend la forme de l'image et de la parole.
La révolution internet déboussole ces supports techniques classiques et nous offrent une multitude de choix de jour en jour innovants et en mode interactif. L'homme moderne est de plus en plus " connected " à la vie et à la chose publique.
Tous les supports techniques, "diffuseurs de messages", ont le droit naturel d'exister, d'exercer , de s'auto-promouvoir. Ils doivent être logés à la même enseigne "d'éditeurs" en font leurs métiers, tenus par les mêmes responsabilités et obligations. Pourquoi donc permettre le libre accès à une certaine catégorie d'éditeurs et le conditionner, le soumissionner, l'octroyer pour d'autres? L'hypothèse de biens rares (fréquences) n'est pas de mise pour les télévisions même classiques et ne le sera plus pour longtemps pour les radios avec l'introduction des multiplex en mode numérique.
La liberté d'entreprendre veut que l'accès au statut d'éditeur doit être LIBRE donc acte DECLARATIF, répondant à un cahier de charges non discriminatoire, non sujet à une forme d'octroi de licence à caractère subjectif et limitative des libertés.
Le droit aux libertés fondamentales et universelles d'expression, d'opinion, d'information, de communication et d'entreprendre doit être inscrit dans les textes de la constitution. Le conseil constitutionnel se doit de les garantir.
Une Loi fondamentale sur les libertés et la communication (règlementation) doit être promulguée.
Vient, ensuite, le rôle de l'instance de Régulation dans le domaine des services des médias audiovisuels pour superviser la conformité des programmes. C'est donc Réguler le contenu par rapport à une loi fondamentale votée par les élus du peuple et non pas réglementer le contenant et le contenu.
Comment une autorité de régulation, plus qu'indépendante, au financement insolite, pouvant disposer de dons , donations, aides.. d'origine non limitative et indéfinie peut nous rassurer ?
Cette forme d'instance ne peut que semer le doute et la méfiance à l'égard de cette institution omnipotente disposant d'un droit quasi divin.
Méfiance, Méfiance donc envers une autorité juge et partie non élue et sans contrepouvoir aucun. Dernière petite question: et si par un quelconque hasard des "gens" d'un autre bord arriveront à la tête de cette nouvelle instance, est-ce que les instigateurs du 116 accepteront que le décret-loi garde les mêmes prérogatives ? La réponse : Ya dhnoubi
A bon entendeur Merci.
Rafik Amara,
Expert en communication
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