Questions à ... - 26.09.2009

Young Mediterranean Leaders

ZargouniUne contribution à la relance de l'UPM et à l'édification du Maghreb ou du moins l'amorce d'un networking porteur? que faut-il attendre du forum YML (Young Mediterranean Leaders) qui tiendra sa 2ème session à Séville du 5 au 7 novembre 2009 ? Hassen Zargouni, membre du Board exécutif, répond à nos questions:

L’UPM est visiblement en panne malgré les tentatives pour la réanimer, à votre avis d’où vient le blocage ?

De la rive sud de la mare nostrum, l’Union Pour la Méditerranée, en tant qu’institution, est chargée de soupçons. Pour certains, l’UPM est une version rénovée de ce qu’on appelait jadis "Zone d’influence française", une forme néocoloniale qui ne dit pas son nom.

D’autres accusent l’UPM d’être un instrument dont l’objectif inavoué est la normalisation des relations entre le monde arabe et Israël, et à cet égard, la guerre contre Gaza a été à ce titre dramatique voire fatale pour le projet UPM. L’idée d’offrir à la Turquie par le biais de l’UPM une alternative à sa volonté d’intégrer l’Union Européenne est tout aussi vivace du côté sud de la Méditerranée.

Certains prêtent aussi à l’UPM, par son côté volontairement pragmatique et son "approche par Projets", une volonté européenne de considérer la Méditerranée uniquement sous son aspect éco-énergétique, un bassin d’eau à nettoyer, une énergie renouvelable à portée de main,… balayant ainsi les aspects humains, civilisationnels et culturels multimillénaires, privilégiés côté sud. D’autres encore accusent l’Europe, sous couvert de l’UPM et du réflexe sécuritaire, de chercher à emmurer les peuples du sud en dressant des barrières à la circulation des hommes et des femmes et d'empêcher une transhumance, quasi naturelle, ancrée dans les racines méditerranéennes.

En outre, le sud de la Méditerranée perçoit des incompréhensions entre, d’un côté, des pays "latins" familiers avec un voisinage imposé par la géographie et l’histoire et d’un autre côté, des pays nordiques dont l’exotisme méditerranéen relègue le projet UPM aux derniers rangs des priorités européennes. Ces pays soulèvent régulièrement des obstacles quant aux questions de financement, ou liées à la gouvernance… L’actuelle crise financière et économique a accentué cet état de fait. Pour finir ce tableau, plutôt sombre, des clivages sont perceptibles entre pays de la rive Sud, oscillant entre une vision économique de ce nouvel espace (Maroc, Tunisie, …) et une vision institutionnelle et politique (Egypte, Algérie,…).

Le tableau que vous dressez est plutôt sombre, y-a-il  place à l’espoir pour une Méditerranée apaisée et prospère ?

La réponse est oui. Les espoirs proviennent d’un fait simple : Le processus de Barcelone a échoué parce qu'il a placé les pays du sud de la Méditerranée dans une position de dépendance vis-à-vis de leurs voisins plus prospères du Nord en misant sur le développement du commerce et du libre-échange. Avec l'Union Pour la Méditerranée, l'ordre des priorités est inversé, l'accent étant mis sur la base du développement économique et social, la santé, l'éducation, les transports, l'urbanisme, la politique industrielle... Concrètement l’espoir provient d’une nouvelle vision fondée sur l’affirmation de l’identité méditerranéenne où l’éducation et la culture présenteraient le ciment pour dépasser les clivages culturels et religieux et la jeune élite méditerranéenne comme levier pour passer des paroles aux actes pour une meilleure intégration économique régionale.

Quel lien faites-vous entre l’identité méditerranéenne et la transition générationnelle ? Concrètement le concept "Jeunesse Méditerranéenne" existe-t-il ?

La spécificité méditerranéenne réside d’une part dans la charge historique, spirituelle, philosophique, littéraire et scientifique que représente la zone et son apport à la civilisation mondiale, et d’autre part dans le fossé économique actuel sans précédent qui sépare les populations des deux rives de la mare nostrum et où le niveau de vie des habitants de la rive Sud est le douzième de celui de la moyenne des habitants de la rive Nord. Le concept d’une "Jeunesse méditerranéenne" peut paraitre théorique, en effet, tant les trajectoires des pays du Nord et du Sud paraissent éloignées, tant les droits politiques, économiques et sociaux des jeunes des deux rives paraissent contrastés. Mais une lecture approfondie à travers les réalités individuelles, dans certains groupes professionnels et au niveau des réseaux sociaux sur le net, permet d'avancer que cette Jeunesse méditerranéenne existe. Elle se connaît, elle se reconnaît, elle communique, elle voyage, elle étudie ensemble, elle fait de la recherche dans des laboratoires communs, elle se rencontre lors de joutes culturelles et artistiques, elle se met en réseaux amicaux. Certes ces cercles sont restreints, mais ils sont nombreux.

Quelle action prioritaire à réaliser aujourd’hui pour sortir de l’impasse UPM ?

Sur le court terme, l’enjeu est de mettre en boucles ces réseaux méditerranéens de diverses origines culturelles, académiques, économiques pour une prise de conscience massive, globale pour une nouvelle ère méditerranéenne, une ère de prospérité pour tous, de développement partagé, de mise en commun des ressources qui font la richesse éternelle de cette région : les hommes et femmes, l’eau, l’énergie, les particularismes culturels, l’art de vivre à la méditerranéenne au niveau de l’architecture, des arts culinaires, … Il est de la responsabilité de la nouvelle génération et notamment de sa jeune élite de se révéler méditerranéenne par essence, de prendre en main sa destinée commune, de réfléchir sur l’édification d’une Université méditerranéenne comme ce fut le cas à Byblos (berceau de l’alphabet), à Athènes, en Alexandrie, à Carthage, à Rome, à Kairouan, à Marrakech, à Séville, à Montpellier, à Trieste, à Vukovar ou à Istanbul. Comme il est de sa responsabilité de concevoir un bassin méditerranéen assaini, écologiquement viable, avec l’émergence de cités durables nourries d’énergies renouvelables et propres, et un cadre institutionnel permettant une immigration co-choisie et une meilleure circulation des compétences.

Et l’édification du Maghreb dans tout cela?

L’histoire contemporaine impose en effet une avancée par groupes cohérents de pays. L’espace Euro-Maghreb est une priorité. Sa fragilité réside dans la faiblesse institutionnelle de l’UMA. Mais il est une réalité évidente pour les jeunes de la Méditerranée occidentale: Le Maghreb doit se faire, et il ne se fera qu’à travers sa projection dans l’Euro-Maghreb, l’espace 5+5, particulièrement, parait pertinent et productif.

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